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Il y a des acclamations joyeuses et enfantines, comme "youpee !", d’autres emplies de soulagement comme "hourra", ou encore des "bravos" chargés de gratitudes. La langue française est riche en termes qui manifestent joie, bonheur partagé ou encouragement à l’effort. Il se trouve que la liturgie chrétienne a choisi dès le VIIIe siècle de mettre en valeur dans le chant du Sanctus, un mot d’une langue étrangère, l’hébreu, pour venir réjouir le latin, plus formel et juridique. "Hosanna !", ce qui peut se traduire littéralement par "Sauve maintenant, nous t’en prions !" : tel est le cri auquel sont invitées à se joindre partout dans le monde les voix des croyants qui, rameaux en main, s’avanceront vers l’autel du Seigneur en ce dimanche d’entrée dans la Semaine sainte.
D’abord une prière
Du psaume 117 chanté notamment au moment de la fête des Tentes (souccot) qui fait mémoire des quarante années passées dans le désert et de la manière dont Dieu conduit et sauve son peuple jusqu’à la Terre promise, les versets résonnent jusqu’à nous : "Béni soit au nom du Seigneur celui qui vient ! De la maison du Seigneur nous vous bénissons ! Dieu le Seigneur nous illumine. Rameaux en main, formez vos cortèges jusqu’au pied de l’autel" (v. 26-27).
Pourquoi se réjouir de celui qui vient ainsi, sinon parce qu’il est porteur de l’exaucement de nos prières, de l’accomplissement de nos espoirs ? La joie ne se limite pas ici à une gratitude comme celle que nous portons à tel héros qui trouve une solution pour nous épargner les problèmes. "Hosanna" est d’abord une prière pour que dans l’aujourd’hui de nos vies, la lumière du salut ne cesse jamais de nous réveiller et conduise notre marche. Cette lumière qui nous mène sur la route apparemment la plus inconfortable et la moins carrossable : celle de suivre celui qui nous appelle à servir, à offrir nos volontés et nos êtres afin qu’ils soient habités de la présence de l’Amour qui transfigure.
La reconnaissance
Le cri hébreu est aussi une reconnaissance : pour appeler ce salut, c’est qu’il faut en avoir bénéficié. Avoir constaté combien dans sa propre personne, le Messie rend possible des transformations inimaginables, combien l’Amour crée du neuf et ouvre l’horizon.
Le rameau béni, quelle que soit son essence, se veut le signe de tout cela : du désir de ne jamais nous installer mais de choisir de faire dépendre notre vie des appels de Dieu, de la foi en sa capacité à accomplir ce qui est impossible à l’homme seul, de la mission confiée d’annoncer cela par nos bouches et notre agir.
Une foule aux mille visages
Flandrin, dans ses peintures ornant le chœur de l’église Saint-Germain-des-Prés à Paris ne s’y est pas trompé qui représente la foule aux mille visages, rassemblée pour voir Jésus entrer, juché sur un âne. Il y a des grimaces et des masques de terreur même. Certains regardent fixement, untel élève dans ses bras frêles son petit comme pour un sacrifice, d’autres se ferment dans le gris de la mort : ils fixent, stupéfaits, l’accomplissement d’une Parole en laquelle ils redoutent de croire. Saisis par la peur et la colère, ils voient l’impossible revêtir le réel, entendant dans le chant du psaume la confirmation que la prière est exaucée. Rien de plus redoutable pour le cœur de l’homme que la manifestation paisible et douce d’un Dieu qu’on aimerait redouter pour son pouvoir, et qui se présente livré. Rien de plus redoutable, et pourtant, quoi de plus désirable ?