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La vie à plein cœur de Claire-Émérentienne, porteuse de trisomie 21

Claire-Emérentienne Fichefeux

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Marie Lucas - publié le 12/04/25
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Rien ne prédestinait ce minuscule petit bébé à devenir une jeune femme solaire porteuse de trisomie. Nourrie de l'amour des siens et de l'Amour de Dieu, Claire-Émérentienne Fichefeux, surnommée "Claire-Aime", aimait travailler, danser et prier pour les prêtres. A 27 ans, elle est partie vers d'autres cieux...

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Ce bébé – une fille - qui naît le 9 octobre 1986 ne connaît pas la chaleur des bras accueillants d'un papa et d'une maman : elle est porteuse de trisomie 21. Dans les années 80, avoir un enfant trisomique est vécu comme un échec. Aussi ses parents biologiques, après de nombreuses hésitations, finissent par la confier à l'adoption. Elle a 8 mois. Ils ne savent pas, à ce moment précis, qu'ils vont faire la joie d'une famille ! Car dans le même temps, Marie-Hélène et Jacques Fichefeux, déjà parents de 7 enfants, souhaitent accueillir un enfant porteur de trisomie et ont pris contact avec une association qui accueille des enfants porteurs de handicap pour les confier à l'adoption. Au téléphone, la responsable leur annonce : "Une toute petite fille vient d'arriver !" "C'est le Seigneur qui a choisi de nous la confier", pensent aussitôt, émus, ses futurs parents. Nous sommes en juillet 1987, à Toulon et cette toute petite fille vient de trouver sa famille adoptive. 

Renaissance

"Quand elle est arrivée, elle était toute ridée comme une vieille pomme, et toute repliée sur elle-même", explique Florence, une amie de la famille qui deviendra sa marraine. Aussi, même si sa famille l'aime déjà tendrement, ses débuts de vie sont compliqués. Souvent, elle refuse de se nourrir, se laissant visiblement mourir. Baptisée le 20 septembre, elle reçoit la vie en abondance et le prénom d'Émérentienne, une sainte liée au sanctuaire de Notre-Dame de Vie (Vénasque). "J'ai été témoin de sa "résurrection"", témoigne encore Florence. Le lendemain de son baptême, son papa Jacques lui donnait son biberon du matin quand Émérentienne s'est arrêtée net. Elle était butée, avec une détresse incroyable dans les yeux. Son père la regardait avec tendresse, et avec douceur et patience, il lui a dit : "Mange Claire, Papa veut que tu manges". Elle a alors desserré les lèvres et a fini le biberon ! Elle venait de dire Oui à la Vie et à l'Amour !"

Claire-Emérentienne au travail au restaurant Misessy, Arsenal, 2012.

Chouchoutée par ses sept frères et sœurs – qui décident d'ajouter Claire à son prénom, plus facile à dire - elle trouve tout doucement sa place dans sa famille. Elle accueille toute cette tendresse que lui manifestent sa famille et la communauté de l'Emmanuel dont ses parents sont membres. "Malgré une angoisse permanente d'abandon et des problèmes liés à une maladie cœliaque détecté plus tard, notre petite fille, hyper entourée et stimulée, a accepté de se laisser aimer", explique son père. Petit à petit, Claire-Émérentienne devient Claire-Em, Claire-Aime ! D'un point de vue scolaire, les enseignants la laissent déployer sa personnalité de petite fille joyeuse avant ses apprentissages scolaires. Puis elle apprend à lire et écrire ce qui lui permettra d'exprimer sa vie intérieure dans des petits carnets. Devenue adolescente, tout n'est pas si facile. "Elle se posait des vraies questions, avec des prises de conscience parfois douloureuses. Qu'est-ce que je vais devenir ?", témoigne son médecin. Enfin, grâce à de nombreux stages, elle trouve sa place dans la restauration comme "fonctionnaire civil de la Défense", à l'Arsenal de Toulon. Et le jour où Hervé Morin vient lancer son plan Handicap pour l'Armée, Claire-Émérentienne, très à l'aise prend la parole devant tout l'état-major, invitant même l'assistance à poser des questions !

Une enfant porteuse de compassion

Dotée d'une sensibilité extraordinaire, Claire-Aime n'aime pas les tensions, notamment à la maison. "Quand ses frères et sœurs se disputaient, elle allait voir l'un ou l'autre qu'elle enrobait dans ses filets de tendresse", témoigne encore son père. "Elle les installait sur le canapé, les faisait s'embrasser, et puis, elle éclatait de rire et s'en allait !" Une fois sur la plage – Claire a 5 ans et demi - elle s'approche d'un monsieur dont le dos n'est plus qu'un large coup de soleil. Elle le prend par le cou avec un "oumffff..." qui voulait dire : "ouh la, ça doit faire très mal !" "J'admirais sa grande compassion, et son attention à l'autre. D'ailleurs, je me souviens très bien de notre dernière journée passée ensemble. C'était un samedi, il était tard, les vendeuses étaient fatiguées et à son tour de payer, Claire a eu un mot très gentil à leur attention, elle avait perçu leur tension", raconte sa marraine. Et lorsque son père s'absente de la maison, elle en souffre particulièrement : "tu me manques infiniment !"

Sa vie de foi

Claire-Aime grandit dans la foi. Elle parle souvent à son ami invisible, Jésus : "Merci pour ton cœur brillant, montre-moi encore une fois ton cœur brillant !" Avec son intelligence intuitive tournée vers le surnaturel, elle est souvent prophète pour son entourage. "Un jour, lors d'une session à Paray-le-Monial, Claire court vers l'estrade où la messe est célébrée. Elle s'installe sur les genoux d'un participant, un ami de nos enfants, et au moment de la consécration, lui met ses deux doigts devant les yeux en lui disant : 'Agarde (Regarde), Jésus' !", se souvient sa maman. Pour ce jeune, il y aura un Avant – des doutes envers la présence réelle - et un Après – une foi profonde dans ce mystère. Claire recopie aussi des versets de la Bible dans ses carnets, elle y note les intentions de prière et les numérote, s'adressant au Christ avec autorité : "Exauce cette prière !" Elle prend au sérieux sa vie de chrétienne, tant et si bien qu'après un discernement de 7 ans, elle s'engage dans la communauté de l'Emmanuel qui lui confie une mission : prier pour les prêtres. "Non pas pour les prêtres en général, mais pour chaque prêtre en particulier"... alors Claire laisse éclater sa joie, elle a trouvé sa mission ! 

Claire-Emérentienne, avril 2014.

Le 14 mai 2014, la jeune fille va à Paris pour des examens médicaux. Tout se passe bien, les bilans sont très bons. Elle passe ensuite l'après-midi avec sa marraine. "Elle m'a émerveillée. Je lui ai offert un coca, et puis nous avons fait du shopping. Elle avait envie d'une robe, alors nous avons été dans les grands magasins." Les essayages sont bien sûr un peu longs... quand soudain Claire-Aime sort de la cabine d'essayage, éblouissante dans une jolie robe tournesol aux couleurs printanières. Elle se met à tourner sur elle-même pour s'assurer que "la robe tourne bien", puis, ravie, fait son achat. Et le week-end suivant lors d'un rassemblement avec la communauté, la jeune femme porte sa nouvelle robe. Elle rayonne ! Libre dans son corps, sans complexe, elle lève les bras vers le ciel, danse, déclenche une farandole... Claire-Aime goûte la vie à plein cœur ! "Je la regardais, elle était devenue une jeune femme solaire, qui captait la lumière et la renvoyait autour d'elle !", lance, émue, sa marraine. 

Naissance au ciel 

Une semaine passe. Le 23 mai, son père se souvient très bien du mail qu'il reçoit de sa fille : "Si vous avez des choses lourdes dans la communauté à porter, donnez-les moi, je les donnerai à Jésus." Le lendemain, Claire-Aime a son spectacle de danse. Comme elle tarde à se lever, sa maman vient pour la réveiller, croyant qu'elle fait semblant de dormir. En réalité, la jeune femme de 27 ans a fait un arrêt cardiaque dans la nuit. Le choc est rude, mais l'espérance de la vie éternelle est la plus forte. Le jour de ses funérailles, l'église Saint-Joseph du Pont du Las de Toulon est pleine, la foule déborde sur le parvis. Ces personnes venues en masse, souvent inconnues de ses parents, ont en commun d’avoir été marquées par leur rencontre avec la jeune femme. Les badauds se demandent ce qui se passe : "Un mariage ?" Non, ni même un enterrement, mais bien plutôt un "enciellement", celui de Claire-Émérentienne... Claire-Émérenciel !

Pour mieux connaître Claire-Émérentienne :

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