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La splendide parade nautique, les explosions de joies populaires à Marseille, à l’occasion de l’arrivée de la flamme olympique sur le sol français manifestent quelque chose du désir qui habite le cœur de l’homme lorsqu’une lumière se présente à sa portée. C’est peut-être ce qui est le plus fort dans l’événement des Jeux qui s’annonce : le parcours de la flamme. Elle passe de main en main, des plus célèbres aux plus anonymes, des plus glorieux aux plus humbles. Et tous, du chanteur de rap à la mode au vieillard inconnu, en éprouvent une égale fierté. Le symbole ne devrait pas nous laisser indifférent, nous qui croyons à cette phrase de Jésus : "Je suis la lumière du monde" (Jn 8,12).
Ce feu qui ne s’éteint jamais
On ne peut s’empêcher de rêver en regardant ces mains qui brandissent fièrement ce feu venu de loin : et si les bras des baptisés, eux aussi, osaient se lever pour manifester la lumière de l’Amour de Dieu ? Sans en confier le soin à quelques-uns, spécialisés dans cette annonce, car tous y sont appelés. Il s’agit d’une autre course : celle que Paul évoque lorsqu’il écrit à Timothée (2 Tm 4, 7). La course de la foi. Non pas en brandissant simplement un flambeau mais en laissant la lumière du Christ, reçue par le baptême, illuminer de sa clarté ceux que nous rencontrons. Dans chaque village et chaque métropole, à chaque carrefour, sur chaque sentier, il y a des hommes et des femmes, de toutes sortes, qui ont reçu ce feu sacré. Non pour le garder jalousement comme on protège un foyer par peur qu’il s’éteigne. Car ce feu-là ne s’éteint jamais. Il est comme le buisson de Moïse, ardent à se propager sans jamais se consumer.
Et si les J.O. étaient, pour les baptisés, l’appel à retrouver le feu de leur baptême ?
L’accueil des Jeux olympiques n’est pas d’abord l’occasion de « faire des coups » pastoraux, histoire de manifester que notre existence sociale est toujours actuelle. Bien sûr qu’il nous faut accueillir ceux qui viennent et leur donner l’occasion en visitant nos villes et nos églises, d’y goûter quelque chose de notre foi et de notre espérance. Mais il nous faut aussi accepter d’apprendre de ceux qui se rendent dans les stades, de nous laisser interpeller par ce qui les fait "vibrer". Et de ce que cela manifeste comme attente plus profonde. Attente devant une Église qui n’est pas d’abord une institution mais bien avant tout un peuple. Attente de voir ce que l’Esprit Saint — même si son nom est inconnu — peut susciter de beau et de vrai dans le cœur et les mains de ceux qui s’en réclament. Car c’est ainsi que la lumière du Christ est révélée et qu’elle ouvre un horizon de joie : lorsque les disciples osent se tenir sous sa clarté et vivre ce qu’elle leur ouvre comme compréhension du monde et de leurs responsabilités.
Cette course d’amour
Le bienheureux Pierre Claverie, béatifié avec les martyrs d’Algérie, écrivait : "N’est-il pas essentiel pour le chrétien d’être présent dans les lieux de souffrance, dans les lieux de déréliction, d’abandon ? Où serait l’Église de Jésus-Christ, elle-même Corps du Christ, si elle n’était pas là d’abord ? Je crois qu’elle meurt de n’être pas assez proche de la croix de son Seigneur." C’est de là comme Paul le proclame, de cette proximité avec la mort de Jésus, que viennent la force, la vitalité et la fécondité de l’Église. Et de nulle autre part. Il poursuit :
"Tout pour le reste n’est que poudre aux yeux, illusion mondaine. Elle se trompe, l’Église, et elle trompe le monde lorsqu’elle se situe comme une puissance parmi d’autres, comme une autre organisation même humanitaire ou comme un mouvement évangélique à grand spectacle. Elle peut briller, elle ne brûle pas du feu de l’amour de Dieu, “fort comme la mort” dit le Cantique des cantiques (8,6). Car il s’agit bien d’amour ici, d’amour d’abord et d’amour seul. Une passion dont Jésus nous a donné le goût et tracé le chemin : “Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime” (Jn 15, 13)."
Et si les J.O. étaient, pour les baptisés, l’appel à retrouver le feu de leur baptême et pour l’Église entière de reprendre un souffle nouveau en aspirant non à l’exploit ou au record, mais bien plutôt à participer, chacun selon l’appel, à cette course d’amour où le Christ nous invite à le rejoindre sans crainte. Car l’Esprit nous assure que nous n’y manquerons jamais de souffle puisqu’il est notre force. Non pour briller sur les podiums mais pour aller dans les lieux les plus obscurs et les plus ténébreux de notre monde, là où la mort semble l’emporter, faire jaillir l’éclat de la charité du Christ !