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Antonin des Conseils, le saint protecteur de Fra Angelico

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Saint dominicain, détail de peinture, Musée de San Marco, à Florence, Italie.

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Anne Bernet - publié le 01/05/24
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Antonin des Conseils, humble dominicain aux vertus éclatantes, devint contre son gré archevêque de Florence. Il était réputé pour sa sagesse et ses "conseils", d’où le nom qu’on lui donna pour la postérité. Avec son ami Fra Angelico dont il sera le protecteur fidèle, il sera l’artisan du célèbre couvent San Marco. Il est fêté le 2 mai.

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En ce début du XVe siècle un prédicateur dominicain parcourt Florence, dénonçant les scandales du temps, l’insolente richesse des uns, clergé compris, l’injuste misère des autres, annonçant la colère de Dieu, l’urgente nécessité de faire pénitence. Giovanni Dominici appartient à la branche des prêcheurs restée intégralement fidèle à l’idéal de Dominique ; c’est pourquoi il a quitté le couvent de Santa Maria Novella dont le faste et le confort le gênent pour en fonder un autre à Fiesole où la vie dominicaine retrouvera son éclat. Et, comme chaque fois que l’on revient à l’exigence chrétienne, les vocations abondent, de sorte que l’on a surnommé Dominici "le voleur d’enfants".

Devant l’exploit

Antonio Pierozzi, dit Antonino en raison de sa petite taille et son air fragile, fils d’un riche notaire, né le 1er mars 1389, est de ces adolescents que cet exemple inspire mais, quand il sollicite son entrée, il se fait rembarrer : trop jeune, trop chétif, incapable de supporter les rudesses de cette vie. Ses supplications n’ont qu’un résultat : Dominici lui promet de l’admettre quand il saura pas cœur les Décrétales de Gratien, imposant ouvrage de droit canonique très difficile à assimiler à un âge si tendre. Antonin comprend-il qu’il s’agit d’une habile fin de non-recevoir ? Oui car il est d’une rare intelligence, mais il relève le défi et, en 1407, ayant absorbé le rébarbatif ouvrage, il en fait la démonstration à Dominici qui, près de crier au miracle devant l’exploit, l’autorise à entrer. L’année suivante, il est rejoint par un autre Florentin, Guido di Pietro, en religion Fra Giovanni, qui passera à la postérité sous le nom de Fra Angelico et dont Antonin, une fois appelé aux plus hautes fonctions dans l’Église, se fera le constant protecteur. 

Pour l’heure, il n’est qu’un très jeune religieux qui, surmontant sa santé fragile, s’impose, outre le scrupuleux respect de la Règle, jeûnes et pénitences incessants, se flagellant, couchant par terre, trouvant encore le temps chaque jour, en sus des offices, de dire tout le Psautier, le petit office de la Sainte Vierge, celui des morts. Il est bientôt si détaché des choses charnelles que ses frères, médusés, le voient souvent, pendant l’oraison, s’envoler au sens littéral du terme. Ces lévitations ne l’empêchent pas de se consacrer à l’étude et devenir l’un des meilleurs spécialistes de saint Thomas d’Aquin ; rien d’étonnant si le thomisme imprègne les créations de Fra Angelico auquel Antonin commande ses premières œuvres, disant : "On ne peut peindre ainsi le Christ sans vivre à l’imitation du Christ."

Écrasé de tâches

Très vite, Fra Antonin attire l’attention des supérieurs. Devenu en 1417 prieur du couvent de Cortone où la communauté s’est installée pour échapper aux troubles liés aux derniers soubresauts du Grand Schisme d’Occident, son autorité s’étend ensuite à ceux de Fiesole, Florence, Gaète, Sienne, Pistoia, puis Rome et Naples avec les titres de vicaire général de la congrégation pour la Toscane et le royaume napolitain, provincial de Rome en 1430 quand ses compétences de canoniste lui valent de devenir auditeur au tribunal pontifical de la Rote. Écrasé de tâches, Antonin ne retranche rien de ses obligations, dit sa messe chaque jour, en sert une autre, prêche et confesse comme un simple frère. Au milieu des années 1430, il rentre à Florence y négocier avec les Médicis l’attribution aux dominicains du couvent San Marco dont il confie l’ornementation à Fra Angelico qui y déploie son génie ; celui-ci s’attire les bonnes grâces du pape Eugène IV qui l’appelle à Rome. Lorsqu’en 1445, meurt l’archevêque de Florence, le pontife prend conseil du peintre afin de choisir son successeur ; fra Giovanni, menacé d’avoir la place, attire alors son attention sur Antonin aux vertus et compétences éclatantes. 

Un archevêque sans faiblesse

L’annonce de son élévation le plonge dans un tel effroi qu’il s’enfuit, revient, la mort dans l’âme, car le pape l’a sommé d’accepter au nom de la sainte obéissance, sous peine d’excommunication. C’est à pied, déchaussé, en habit dominicain, pleurant à chaudes larmes que le nouvel archevêque fait son entrée dans sa cité épiscopale, redisant qu’on lui a forcé la main et qu’il a pris la charge contre sa volonté. 

Ses sentences ecclésiastiques ou civiles sont d’une telle intelligence, sa justice si parfaite, son sens du droit et de l’équité si remarquables que l’on y devine la marque de l’Esprit Saint, de sorte que l’archevêque est surnommé "Antonin des Conseils".

Qu’il n’ait pas voulu de la fonction ne l’empêche pas de l’exercer sans faiblesse. Pauvre, dépouillé, fidèle à ses vœux de religion, se privant de tout afin de tout donner, il entreprend une réforme des mœurs du clergé, et des fidèles, interdisant un nouveau jeu de hasard qui ruine des familles entières, condamnant les prêtres qui laissent les sanctuaires se transformer en tripots ou servir à des rendez-vous galants, secourant les pauvres, blâmant les riches pour leurs excès et leur dureté de cœur, dans une vision évangélique de la société. Il sait réparer les injustices criantes. Surprenant un matin en sortant de l’église trois faux aveugles qui se félicitent de la fortune accumulée grâce à leur escroquerie, il les oblige à restituer les sommes extorquées qui serviront à doter trois jeunes filles vertueuses et sans le sou.

La marque de l’Esprit Saint

Ses sentences ecclésiastiques ou civiles sont d’une telle intelligence, sa justice si parfaite, son sens du droit et de l’équité si remarquables que l’on y devine la marque de l’Esprit Saint, de sorte que l’archevêque est surnommé "Antonin des Conseils" ; le Pape interdit que l’on fasse appel de ses jugements devant lui, car il ne saurait aller contre la sagesse d’un tel serviteur de Dieu. La peste sévit-elle à Florence ? Tandis que le popolo grasso, les riches, fuit la ville, Antonin demeure imperturbable à son poste, soignant, confessant, extrémisant, enterrant. On lui attribue la guérison de nombreux pestiférés, la résurrection de quelques autres, la cessation de l’épidémie. Quand la famine succède à la maladie, l’archevêque distribue ses réserves de vivres miraculeusement inépuisables. Cela devrait désarmer ses ennemis, car il en a parmi ceux dont il a condamné la mauvaise conduite ; ce n’est pas le cas. En pleine rue, il est pris à partie par un notable qui s’emporte, crie qu’il le fera destituer, ou assassiner. Antonin riposte : "Mon seul désir est d’être libéré de l’épiscopat. Quant au martyre, je ne m’en juge pas digne" ce qui fait taire l’insolent. Il meurt de sa belle mort, en sa demeure, le 2 mai 1459. Son cadavre, incorruptible, répand plusieurs jours d’affilée un parfum si suave que les rues de Florence en sont embaumées. Il est enterré en son cher couvent de San Marco, sa plus belle œuvre peut-être, et la plus durable, grâce au génie de son ami Fra Angelico.

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