Au 2e Régiment étranger d’infanterie (REI), il est des choses avec lesquelles on ne plaisante pas. Implanté à Nîmes, dans le Gard, il s’agit du plus ancien régiment d’infanterie de la Légion étrangère. Ses traditions et sa devise, "être prêt", ont nourri et inspiré nombre de légionnaires qui ont eu l’honneur d’y servir. "Être prêt", c’est ce à quoi s’efforce aussi le père Pierre-Nicolas Chapeau, aumônier du 2e REI, qui chapeaute depuis 2021 le projet d’aménagement de la nouvelle chapelle du régiment. Alors qu’un projet de réorganisation des bureaux se profile, l’idée germe d’aménager une nouvelle chapelle. "La chapelle actuelle fait 25m2", détaille auprès d’Aleteia le père Pierre-Nicolas. "On a vu dans cette contrainte de déménagement une opportunité d’aménager une chapelle plus grande dans un endroit plus central du régiment."
Battant le fer tant qu’il est chaud, un ancien hangar est dans la foulée identifiée pour accueillir la nouvelle chapelle. Mais sa réhabilitation nécessitant d’important travaux, une première campagne de souscription publique est lancée en décembre 2021. "La première phase a emporté un certain succès qui a permis de commencer les travaux dans le hangar pour abriter la future chapelle", reprend-t-il. "Il a d’abord fallu nettoyer les murs intérieurs recouverts d’enduit, procéder à l’isolation du toit…". Alors que le coût total prévisionnel des travaux est estimé à 400.000 euros, reste encore de nombreuses étapes à franchir. Revêtement du sol, création de la dalle et des marches en pierre de taille pour l’autel, sacristie, mobilier liturgique, mise en place des ouvrants… "Pour poursuivre nos travaux, nous avons lancé une nouvelle campagne, cette fois-ci sur Credofunding", reprend le padré.
Confiant, le père l’est aussi car il sait que saint Charles de Foucauld veille sur eux. "C’est assez naturellement que nous avons décidé de lui dédier la nouvelle chapelle", sourit-il volontiers. "Le sort du régiment est lié à lui." Charles de Foucauld a ainsi été son aumônier lors du combat d’El Moungar, fait d’armes dont la commémoration est devenue la fête régimentaire. Le 2 septembre 1903 à El Moungar, au Maroc, un peloton de la compagnie du 2e Etranger est attaqué et résiste dans des conditions telles que cette bataille est appelée "le Camerone des sables". Averti de la situation, au mépris des recommandations de ne pas s’y rendre seul, Charles de Foucauld se hâte de parcourir à cheval les 120 kilomètres qui séparent Béni-Abbès de Taghit où le reste du détachement dont 49 légionnaires blessés ont trouvé refuge. Après avoir dit la messe dès son arrivée, il est conduit au chevet des blessés et reste 25 jours auprès d’eux.
Sans distinction de religion ou d’origine, il accompagna chacun des légionnaires blessés dont la piété n’était pas forcément le trait dominant de leur caractère. Ainsi, d’un certain légionnaire allemand peu recommandable, dont la poitrine avait été traversée par une balle : "Le Père de Foucauld s’occupa de lui comme du plus gravement blessé et du moins sympathique, c’est-à-dire particulièrement. Reçu d’abord plus que fraîchement, il finit, par sa patience et sa douceur, par se concilier ce pauvre homme, au point que celui-ci le réclamait à chaque instant, et lui racontait l’histoire intime, - pas toujours belle, - d’un vieux soldat d’Afrique", écrit ainsi René Bazin dans son ouvrage Charles de Foucauld, explorateur du Maroc, ermite au Sahara.
C’est un lieu calme, qui porte à la prière. Chaque légionnaire peut s’y retrouver, sans distinction.
Si le régiment est le lieu de vie du légionnaire, la chapelle en est un peu le poumon spirituel. Là s’y tiennent des messes, des mariages et aussi des baptêmes. La chapelle, c’est aussi le lieu où sont veillés les corps des camarades morts au combat. "Nous devons avoir un lieu digne pour les événements heureux mais aussi douloureux", souligne encore le padre. "Même les légionnaires qui ne partagent pas la foi chrétienne sont touchés par cette attention d’avoir un lieu de recueillement." Et le prêtre de reprendre : "C’est un lieu calme, qui porte à la prière. Chaque légionnaire peut s’y retrouver, sans distinction". Et quand on lui demande quand la chapelle sera enfin "opérationnelle", le père Pierre-Nicolas n’hésite pas : "Dès que possible."