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Ce qui était il y a encore dix ans une possibilité mâtinée de science-fiction est désormais un élément incontournable des guerres modernes : les drones sont abondamment employés, pour des tâches diverses, allant de l’attaque à la surveillance. Les armées disposent de drones terrestres et aussi de drones sous-marins. De quoi suppléer les militaires, pallier le manque de soldats, économiser des vies humaines, mais aussi accroître la puissance du feu et décorréler l’action humaine de ses conséquences.
Le drone a véritablement fait son entrée sur le champ de bataille avec la guerre au Karabagh (2020). L’Azerbaïdjan fut l’un des premiers pays à s’en servir de façon offensive et coordonnée, en les intégrant à sa stratégie militaire et à ses forces terrestres. Le drone a l’avantage d’être peu onéreux, relativement simple à manipuler et de pouvoir accéder à des zones de forte conflictualité, tout en préservant la vie des soldats. Allié de la Turquie, Bakou s’est essentiellement fournie en drones Bayraktar, vedettes de l’industrie de l’armement turque. Si de tels drones avaient été utilisés en Irak et en Libye, leur usage au Karabagh procédait d’un changement majeur de stratégie et de dimension. L’Azerbaïdjan lui doit une partie de son succès, d’où la présence de quelques spécimens à Bakou lors du défilé de la victoire.
Un incontournable des champs de bataille
En Ukraine, l’armée de Kiev a posé de gros soucis à l’armée russe par l’emploi de divers drones, dont des maritimes. Là aussi achetés à la Turquie, pourtant proche de la Russie, ces drones ont permis à Kiev d’infliger des dégâts importants aux Russes, avant que Moscou ne se fournisse en matériel performant et n’intègrent les drones dans sa réflexion tactique. Comme pour toutes les armes, il ne suffit pas d’en posséder pour en faire bon usage, il faut encore les intégrer dans un déploiement global des forces et les faire inter-opérer avec les autres éléments du champ de bataille.
Les Jeux olympiques de Paris vont voir un important déploiement de drones aériens affectés à la surveillance des zones, avec caméra de surveillance et reconnaissance faciale. Le risque est d’accorder une toute-puissance à la technologie en pensant qu’elle va régler tous les problèmes humains. Il est aussi de subordonner les libertés et les prérogatives humaines à la technologie, magnifiée et absolutisée. Un risque sur lequel le Saint-Siège ne cesse d’alerter.
Le risque est en effet de disposer d’armes sans conscience et sans morale, réduite à de simples fonctions létales.
Drone est le terme générique, désignant aussi bien les appareils à fonction létale que ceux de surveillance. L’acronyme SALA désigne les "Systèmes d’armes létales autonomes", c'est-à-dire les drones réservés aux attaques. Une première session d’un groupe d’experts travaillant sur les SALA s’est ouverte début mars, session où était présent l’observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’ONU, Mgr Ettore Balestrero. Le risque est en effet de disposer d’armes sans conscience et sans morale, réduite à de simples fonctions létales. "Les systèmes d'armes autonomes n'ont pas la capacité de comprendre les conséquences de causer des “souffrances excessives ou inutiles”, de tuer sans discrimination ou de respecter les principes d'humanité", a ainsi rappelé Mgr Balestrero. Sans capacité de jugement, elles ne peuvent pas opérer l’essentielle distinction entre le bien et le mal. Si ces armes peuvent suppléer les humains, elles ne peuvent nullement agir à leur place : "Elles ne peuvent avoir le dernier mot sur les humains" a-t-il réaffirmé.
Former les consciences
Le Saint-Siège a demandé deux choses pour l’usage de ces armes : une réglementation internationale et un moratoire quant à leur usage. Deux propositions qui ont peu de probabilités d’aboutir. D’une part parce que la Chine et la Russie s’opposent à une réglementation internationale, d’autre part parce que ces armes ont pris une telle place sur le champ de bataille que personne ne souhaite défendre un moratoire.
Si le Saint-Siège s’engage contre l’usage des drones, c’est l’ensemble des armes et donc de la guerre qu’il souhaite voir bannir, comme l’a rappelé son représentant à l’ONU : "[Le Saint-Siège a la] forte conviction quant à la nature fondamentalement inhumaine des armes. […] Le développement d'un armement de plus en plus sophistiqué, même dans le but de réduire les dommages collatéraux, n'est pas une solution à long terme. "La solution passe par l’établissement d’une paix durable, donc juste. Reste que de tels propos sont peu écoutés et encore moins suivis d’effets. Face à l’usage dramatique des armes, ce sont bien les consciences qu’il faut former et éclairer et c’est ce à quoi s’emploie le Saint-Siège avec ses différents leviers diplomatiques.