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De "bœuf muet" à "docteur angélique". Une sacrée évolution ! Thomas d’Aquin est né à Aquino en 1225, dans la région de Naples, et est issu d’une grande famille italienne. Il fait ses études chez les Dominicains et, à 19 ans, entre au noviciat de l’Ordre des Prêcheurs contre l’avis de ses parents. Il poursuit sa formation à Paris puis à Cologne sous la direction d’Albert le Grand. À Cologne, il est affublé par ses pairs du sobriquet de "bœuf muet", en raison de sa stature imposante et de son caractère taciturne. Il consacre sa vie à l’enseignement universitaire en France et en Italie, et à la rédaction de sa grande œuvre La Somme théologique. Thomas d'Aquin est canonisé le 18 juillet 1323 par le pape Jean XXII, et proclamé docteur de l'Église en 1567 par le pape Pie V. C’est à cette époque qu’il reçoit le titre de "docteur angélique".
La Somme théologique
Œuvre majeure de saint Thomas d’Aquin, la Somme théologique ou Somme de théologie est un traité théologique et philosophique qui présente, de manière organique, l’ensemble de la doctrine chrétienne. Un ouvrage conséquent (trois fois la taille de la Bible !), destiné initialement à l’instruction des jeunes clercs, et à la formation continue de religieux, de prêtres et de laïcs. Il demeure néanmoins accessible aux moins "avancés", comme saint Thomas le souligne dans le Prologue : "Le docteur de la vérité catholique doit non seulement enseigner les plus avancés, mais aussi instruire les commençants, selon ces mots de l’Apôtre (1 Co 3, 1-2) : "Comme à de petits enfants dans le Christ, c’est du lait que je vous ai donné à boire, non de la nourriture solide." Notre intention est donc, dans cet ouvrage, d’exposer ce qui concerne la religion chrétienne de la façon la plus convenable à la formation des débutants."
En répondant à 512 questions, saint Thomas essaie d’opérer une synthèse entre la foi et l’ensemble de la sagesse chrétienne. La Somme se compose de trois parties : la première est consacrée à la connaissance de Dieu, à la fois Un et Trinité de personnes, la deuxième, plus longue, à l’agir de l’homme en tant que créature à l’image de Dieu, et la troisième au Christ et à sa vie sur terre, et aux sacrements. Rédigée durant les dernières années de sa vie, en pleine maturité intellectuelle, elle représente sept ans de travail. Elle est inachevée car après avoir vécu une extase pendant la messe le 6 décembre 1273, saint Thomas cesse d’écrire. Tout ce qu'il a écrit lui paraît "comme de la paille", comparé à ce qu'il a "vu".
Même inachevée, la Somme théologique rayonne dans toute l’Europe et bien au-delà du Moyen Âge. Six siècles plus tard, en 1879, le pape Léon XIII déclare que les écrits de saint Thomas d'Aquin expriment adéquatement la doctrine de l'Église. Il écrit dans son encyclique Æterni Patris : "Les Pères du concile de Trente voulurent que, au milieu de leur assemblée, avec le livre des divines Écritures et les décrets des pontifes suprêmes, sur l'autel même, la Somme de Thomas d'Aquin fut déposée ouverte, pour pouvoir y puiser des conseils, des raisons, des oracles." Le Concile Vatican II recommande explicitement l'étude de sa pensée dans deux documents, le décret Optatam totius sur la formation au sacerdoce, et la déclaration Gravissimum educationis qui traite de l'éducation chrétienne.
Le Docteur angélique
Au XVIe siècle, saint Thomas reçoit le titre de "docteur angélique". Réputé pour sa pureté, (Léon XIII souligne son "intégrité parfaite de mœurs"), doté d’une intelligence lumineuse, saint Thomas est comparé à un ange. Dans son motu proprio Doctoris Angelici, le pape Pie X évoque en ce sens "la qualité presque angélique de son intellect". Mais saint Thomas doit sans doute aussi ce qualificatif à sa profonde réflexion sur les anges. Il est le premier à avoir défini l’ange comme une créature purement immatérielle, purement spirituelle. Il a également développé une pensée sur les anges gardiens. Pour saint Thomas, les anges gardiens sont des amis fidèles, des tuteurs personnels. À la naissance, chaque être reçoit un tuteur. Tant qu’il pèlerine sur la terre, l’homme, menacé par de nombreux dangers qui viennent "de l’intérieur et de l’extérieur", se voit attribuer un gardien spécial : "son ange gardien" (Somme I, 113, 4).
Saint patron des écoles catholiques
Le 4 août 1880, Léon XIII déclare saint Thomas patron des écoles catholiques. "Le patronage de cet homme très grand et très saint sera très puissant pour la restauration des études philosophiques et théologiques, au grand avantage de la société. Car, dès que les écoles catholiques se seront mises sous la direction et la tutelle du Docteur Angélique, on verra fleurir aisément la vraie science", écrit-il dans Cum hoc sit. Voilà pourquoi tant d’établissements de l’enseignement catholique sont placés sous la protection de saint Thomas d’Aquin.
Le pape Pie X va plus loin en demandant avec forte insistance aux professeurs italiens de philosophie d’enseigner les principes du thomisme. Dans son motu proprio Doctoris Angelici pour encourager l'étude de la philosophie de saint Thomas d'Aquin dans les écoles catholiques du 29 juin 1914, il exhorte : "Les principes de philosophie posés par saint Thomas d'Aquin doivent être observés religieusement et inviolablement, car ils sont le moyen d'acquérir une connaissance de la création la plus conforme à la foi". Et d’affirmer fermement : "Nous souhaitions donc que tous les professeurs de philosophie et de théologie sacrée soient avertis que s'ils s'écartaient ne serait-ce qu'un pas, en métaphysique notamment, de Thomas d'Aquin, ils s'exposaient à de graves risques."
Le thomisme
Comme l'indique son nom, le thomisme est une école de pensée qui s'inspire directement des écrits de saint Thomas d'Aquin. Il consiste en un réalisme philosophique. L'originalité de sa pensée réside dans la conciliation entre les acquis de la pensée d’Aristote et les exigences de la foi chrétienne. Elle met en pleine lumière la cohérence entre foi et raison. "À une époque où les penseurs chrétiens redécouvraient les trésors de la philosophie antique, et plus directement aristotélicienne, il eut le grand mérite de mettre au premier plan l'harmonie qui existe entre la raison et la foi", souligne Jean Paul II dans Fides et ratio. "La lumière de la raison et celle de la foi viennent toutes deux de Dieu, expliquait-il; c'est pourquoi elles ne peuvent se contredire."
Au fil des siècles, le thomisme a revêtu plusieurs formes, s'éloignant plus ou moins des réflexions initiales développées dans la Somme théologique. À la fin du XIXe, à l'initiative du pape Léon XIII, le thomisme se renouvelle en un mouvement appelé le néothomisme, dont les représentants les plus importants sont Jacques Maritain et Étienne Gilson.
Ses reliques
Le corps de saint Thomas d’Aquin est conservé sous le maître-autel de l'église de l'ancien couvent des Dominicains de Toulouse. L’une de ses reliques, son crâne, conservé depuis 1369 dans le couvent des Jacobins à Toulouse, a été confié en 2023 pour trois ans aux Dominicains de la Ville Rose, en l’honneur des trois années jubilaires qui célèbrent les 700 ans de sa canonisation (1323), les 750 ans de sa mort (1274) et les 800 ans de sa naissance (1225).
Le chef de saint Thomas a donc déjà entamé des visites dans toute la France, organisées par l’Association pour le Centenaire Saint Thomas d’Aquin (ACTA). Il est actuellement à Paris (du samedi 2 au 9 mars 2024), exposé à l’église saint Étienne du Mont puis à Stanislas, avant de rejoindre la Lorraine du 13 au 19 mars, à Nancy puis Metz. "Les paroisses, les communautés, les diocèses qui veulent actualiser quelque chose de la grâce reçue par saint Thomas peuvent recevoir ces reliques et organiser des veillées de prière, mais aussi vivifier leur recherche de Dieu à travers la figure de saint Thomas", expliquait le père Olivier de Saint-Martin, supérieur du couvent des dominicains de Toulouse. Par décret du pape François, une indulgence plénière est accordée aux fidèles qui vénèrent ces reliques.