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Après le constat d’échec de l’athéisme d’État autrefois omniprésent en URSS, l’appareil dominateur du KGB — rebaptisé FSB pour Service fédéral de sécurité — a utilisé l’arme beaucoup plus redoutable d’une instrumentalisation dénaturante de la religion chrétienne : avec la collaboration de certains prélats orthodoxes russes, il a constitué une idéologie "national-orthodoxiste". Véhiculée par une hiérarchie ecclésiale prise en otage à Moscou depuis Staline et Brejnev, cette religiosité falsifiée est faite à la fois d’une contrefaçon de l’orthodoxie russe traditionnelle et d’une dérive militariste impériale.
Un cambriolage idéologique
Tout en faisant alliance avec la Chine communiste, la Corée du Nord et l’Iran islamiste des ayatollahs, le président Vladimir Poutine prétend défendre des "valeurs morales" chrétiennes. Selon les termes du théologien russe Vladimir Zelinsky [à ne pas confondre avec le président ukrainien Zelensky, Ndlr], il procède à un "cambriolage idéologique de l’Évangile". Le Kremlin bénéficie ainsi du soutien aveugle de certains Occidentaux, notamment des chrétiens abusés par sa propagande.
En dénonçant la décadence morale de l’Occident — hélas réelle — en proie à l’idéologie antifamiliale du "gender", à la GPA, à une pornographie omniprésente et à une toxicomanie croissante, Poutine séduit facilement des milieux "conservateurs" occidentaux révoltés par ce laxisme. Ce discours du Kremlin oublie seulement le rôle moteur de l’intelligentsia procommuniste, notamment dans le "féminisme" du gender : Simone de Beauvoir en France et plusieurs pasionarias marxistes des États-Unis, en lien dès l’après 1945 avec l’Internationale du Kremlin…, avec une aile radicale de lesbiennes. La propagande "morale" actuelle de Moscou ignore aussi le rôle de ses alliés la Chine et la Corée du Nord, dont les trafics de stupéfiants alimentent actuellement une toxicomanie de plus en plus pathogène en Occident.
S’emparer de la religion
Interrogé sur ce qui peut constituer un danger pour la foi dans la Russie postsoviétique d’après 1991, l’intellectuel moscovite Serge Averintsev a désigné "l’intention de la vieille nomenklatura, qui, malgré tous les changements, a conservé le pouvoir, de s’emparer de la religion, principalement de la religion orthodoxe, pour construire un nouvel isolationnisme". Il observait que "ceux qui, hier encore, nous surveillaient en gardiens des principes de l’athéisme d’Etat, nous demandent si nous sommes suffisamment orthodoxes"… Ainsi, une authentique chrétienne de Saint-Pétersbourg, qui travaillait à un rapprochement avec les catholiques de l’Ouest, s’est vu reprocher de ne pas être "suffisamment orthodoxe" par un ancien dirigeant communiste russe. Interrogé sur ce point, il avait répliqué : "Que je sois baptisé ou pas, n’a aucune importance !"
Comme tout système totalitaire, après avoir été persécuteur, le système du KGB-FSB a usé de la séduction et souvent aussi d’une corruption financière assortie de chantage. Loup déguisé en berger, il est devenu séducteur, voulant faire triompher les "valeurs chrétiennes" dans un contexte de violence politique. Corrupteur, il offre un enrichissement illicite à des affidés stipendiés jusqu’en Occident. De même, Vladimir Poutine est guidé par une volonté impériale prédatrice, manifestée dans les guerres déclenchées en Géorgie en 2008 puis en Ukraine en 2014 et en 2022. Cette "opération militaire spéciale" a été encensée par le patriarche Kirill, un prélat formé à l’époque de la Pax sovietica.
Le Décalogue contre les faux-frères
À propos de cette utilisation des références chrétiennes par le Kremlin, le philosophe chrétien Constantin Sigov, de l’Université Moghila de Kiev, a répondu ce mois-ci dans La Croix "qu’il s’agit d’une apostasie, d’une profanation radicale, d’une instrumentalisation absolument cynique du christianisme par deux anciens du KGB, Vladimir Poutine et Kirill". Constantin Sigov appelle à "s’élever contre cette manipulation du spirituel et cette perversion du discours évangélique" et à "rappeler le Décalogue — l’interdiction de tuer, de voler — l’appel des prophètes et des Psaumes, en faveur de la justice".
Voyant là "deux manières de détruire le christianisme", il a observé qu’alors que "Staline était ouvertement athée, et dynamitait les églises", Vladimir Poutine adopte une tactique "plus néfaste encore", consistant à "dynamiter le sens, les paroles, les expressions, les métaphores et les symboles chrétiens". Ce qui nous engage à "ne pas nous laisser ensorceler par les mots", sachant que "ce qui est propagé par le poutinisme, c’est la religion de la guerre, la religion du plus fort", dans une Russie aujourd’hui dominée par "une secte militariste". La propagande du président russe est caractéristique de ces faux-frères contre lesquels Jésus-Christ nous mettait déjà en garde il y a 2000 ans. Il est vital de rester vigilant.