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Comment faire lorsque ses beaux-parents ont tendance à être un peu… envahissants ? Gageons que cette question, tous les couples se la sont posée un jour. Bénédicte Lucereau, auteur conférencière et thérapeute de couple au cabinet Mots Croisés de Normandie apporte son éclairage pour Aleteia. "La question des limites et des frontières est différente pour chacun, c'est d'ailleurs ce qui pose problème dans les couples. Quand on n'a pas la même définition de ce que doivent être les limites de notre sphère familiale, l'idée de l'envahissement est différente pour chacun".
Ce sont ces différences qui créent un terrain propice au conflit dans le couple. "Prenez l'exemple d'une belle-mère qui s'invite à déjeuner chaque dimanche chez son fils et sa belle-fille. Cette dernière l'a peut-être volontiers accueillie durant les premiers mois, voire les premières années de son mariage, que ce soit par charité ou bienveillance. Mais cet accueil qui se faisait légèrement est devenu de plus en plus pesant au fur et à mesure du temps qui a passé. Or, si l'époux lui-même voyait sa grand-mère venir déjeuner tous les dimanches à la maison quand il était petit, il ne voit probablement pas le problème et ne supporte pas les réticences de son épouse qu'il considère comme une agression contre sa mère".
"L'amour mal ajusté tue l'amour"
Il existe cependant, selon Bénédicte Lucereau, certains critères objectifs à prendre en compte pour adopter une saine distance vis-à-vis de sa belle-famille, comme le manque flagrant de respect pour l'intimité des deux membres du couple. "Je me souviens d'une mère qui avait les clefs de l'appartement de son fils et qui y passait souvent pour faire le ménage ou vider une machine, jusqu'au jour où elle a pris la liberté de changer les rideaux. Quand sa femme s'en est indignée, le mari a défendu sa mère car il estimait qu'elle avait voulu leur faire plaisir, mais l'argument a été reçu comme une violence pour son épouse, qui ne s'est pas sentie soutenue". En prenant de l'âge, certains parents ne se rendent ainsi pas compte que la vie avance et que leurs propres enfants devenus adultes, quittent le giron familial pour créer leur propre sphère familiale. "La tentation des parents est alors de vouloir retenir leurs enfants, considère la thérapeute. Pour ça, ils y mettent de l'affectif et sortent de grandes phrases comme : 'Ah ! si vous nous aimiez...'". Ce n'est pourtant ni une question de respect, ni une question d'amour et les parents doivent accepter de voir que leurs enfants vont faire des choix différents des leurs. "Aujourd'hui on voyage, on ne dépense pas son argent de la même façon, on bouge plus facilement : tout cela crée des conflits de générations, simplement parce que les enfants ne vivent pas à la même époque que leurs parents"
Face à sa mère, "le mari doit toujours choisir sa femme et la faire passer avant".
L'idéal reste encore de faire passer le message avec la communication non violente, en partant de soi : "Je me sens envahi quand je vois que...". Pour Bénédicte Lucereau, "il faut bien soigner ses mots pour que les parents puissent comprendre sans se sentir attaqués ou mis de côté. Certains ont peur de la solitude ou de ne pas voir leurs petits-enfants, c'est une peur d'ailleurs maladive chez certains. Il faut dire les choses de façon claire à ses parents ou beaux-parents et, surtout, se mettre au clair entre époux puisque l'autre conjoint peut être pris en otage dans un conflit de loyauté entre ses parents et son mari ou sa femme".
Face à sa mère, "le mari doit toujours choisir sa femme et la faire passer avant. Le cas contraire, le couple va droit vers de graves crises qui peuvent mettre à mal sa durabilité". Pour réajuster, le couple peut prendre de la distance, venir moins souvent et passer des vacances ailleurs que chez ses parents. "Il faut protéger sa propre cellule familiale. L'envahissement peut se cacher sous des airs bienveillants, jusqu'à une forme de harcèlement du type : 'Ah, vous ne venez pas ce weekend ? Bon tant pis, mais je vous compte pour le week-end prochain alors !', qui empiète sur la liberté. C'est ce qu'on appelle de la manipulation affective : l'amour mal ajusté tue l'amour".
Une distance à réajuster régulièrement
L'autre écueil qui fragilise la relation entre époux et avec ses beaux-parents est ce sentiment de culpabilité qui pousse parfois certains parents à faire penser à leur enfant que leur moral décline du fait de la solitude qui leur est imposée. "Ce n'est pas juste, souligne la thérapeute. Un amour ajusté est un amour qui laisse l'autre libre de venir à soi. C'est aussi l'occasion pour les beaux-parents, ou parents qui ont la chance d'être encore à deux de prendre soin de leur propre couple pour faire face à sa solitude quand leurs enfants ont quitté le nid". Comment, dès lors, en parler en couple sans brusquer l'autre ? "On a souvent le mauvais rôle parce qu'on est le tiers extérieur qui vient ouvrir les yeux de son conjoint sur la façon dont fonctionne son système familial. Il faut toujours parler en son nom propre et ne pas accuser son mari, ou sa femme, des disfonctionnements de sa famille. Il ne faut pas le rendre responsable de l'envahissement de la belle-mère mais plutôt dire : 'Moi, je ne le supporte pas' ou 'je pense que ce n'est pas bon pour notre famille', en prenant toujours la responsabilité de ce qu'on ressent.
Solliciter l'autre est aussi un moyen de le responsabiliser dans la recherche de l'équilibre familial : "que peux-tu faire pour notre famille ?", "que peux-tu faire pour me protéger moi de cette situation ou de cette emprise qui me met mal à l'aise ?", "est-ce que tu peux faire quelque chose pour que je me sente mieux, que je n'aie pas l'impression d'être la mauvaise belle-fille, que je ne me sente pas coupable...". "Que penses-tu de la fréquence à laquelle on voit tes parents ? Et les miens ?" sont des questions "à remettre sur le tapis en permanence en couple, comme quelque chose qui peut être discuté pour évoluer dans le temps. Quand les enfants sont tout petits, on aime beaucoup voir ses parents, mais quand ils grandissent, les grands-parents peuvent vouloir prendre la place des parents en faisant des remarques sur l'éducation des enfants. C'est le bon moment pour réajuster la distance". "Il faut sortir de cette logique de bon ou de mauvais, il ne faut pas tout moraliser, alerte Bénédicte Lucereau. On peut se sentir mal sans que ce soit ni bon, ni mauvais. Ce que l'on ressent est une réalité qu'on ne peut pas juger. Dire à l'autre : 'Tu es injuste de me dire ça' ou l'accuser ne mènent nulle part". La bonne fréquence pour voir sa belle-famille est ainsi celle qui convient aux époux et aux parents, et elle doit être réajustée constamment.
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