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À chaque rentrée scolaire sa nouvelle réforme. En à peine cinq mois passés au ministère de l’Éducation nationale, le ministre Gabriel Attal n’aura pas failli à la tradition. Plus d’un millier d’écoles se voient proposer de mettre en place au mois de janvier les fameux cours d’empathie dont il est question depuis quelques mois. Un kit expérimental d’une trentaine de séances permet d’assurer au moins une séance par semaine dans les classes de maternelle jusqu’au CM2.
Il est évident que tous les moyens utiles permettant de lutter contre le harcèlement à l’école méritent d’être déployés, on sait que ces méthodes cultivant l’empathie existent depuis des années en Europe du Nord et semblent avoir fait leurs preuves. Mais on ne peut s’empêcher de se demander si notre Éducation nationale n’est pas encore en train d’ajouter un énième étage à une fusée obèse qui n’arrive plus depuis longtemps à décoller, faute de carburant. Énième étage : après la lutte contre les stéréotypes de genre, le développement durable, la cause climatique, voici les kits d’empathie, et demain l’ABCD de la cause animale ? Pénurie de carburant : les professeurs des écoles, sommés de s’éparpiller au gré de programmes de plus en plus foisonnants et multidirectionnels sont tout simplement fatigués d’être l’objet d’autant d’attentes de la société, alors que leur mission première et très prenante est de faire en sorte qu’un enfant sorte du CM2 en sachant lire, écrire et compter, en sachant ce qu’on fête le 11 novembre et le 14 juillet, et où placer Rome sur une carte du monde. Par exemple.
Rendre possible le travail des familles
Aux professeurs de remédier aux lacunes héritées de tous les pédagogismes qui ont fait florès depuis cinquante ans. Aux professeurs de remédier aux déficiences des familles souvent désemparées, et plus généralement aux carences éducatives qui n’épargnent aucun milieu… Ceux qui ont cru que le rôle de l’école était d’inculquer une "morale laïque" afin d’arracher l’élève à tous les déterminismes familial, ethnique, social, intellectuel, pour après "faire un choix", affirmation donquichottesque d’un ancien ministre de l’Éducation nationale, feraient bien de se mettre à la place de nos professeurs des écoles : ils aimeraient au contraire trouver des enfants un peu moins "arrachés", un peu moins déboussolés, et un peu plus éduqués… C’est tout le génie des initiatives lancés par de nombreuses écoles.
Déjà au XIXe siècle, une certaine Madeleine-Sophie Barat, fondatrice des écoles du Sacré-Cœur, avait créé un parcours de formation pour les jeunes mères, une école pour les parents, afin de les renforcer dans leur rôle de premier éducateur de l’enfant. Actuellement, des écoles accueillent dans leurs murs des patronages et leurs animateurs : ce sont des lieux où les enfants apprennent par le jeu, par le sport, par l’entraide, à construire des relations humaines saines et apaisées. Ces écoles ne font pas le travail des familles, elles le rendent possible, et ainsi le nourrissent et le soutiennent. Mais quand l’école se prend pour la famille, elle finit par user ses professeurs, envers qui un peu d’empathie ne serait pas de refus…