Alors que les arrestations de religieux se poursuivent et ébranlent l'Église catholique au Nicaragua, le régime de Daniel Ortega a une fois de plus exhibé Mgr Rolando Alvarez, incarcéré depuis le 10 février 2023 à la prison de la Modelo (nord de Managua, capitale du Nicaragua). Le gouvernement a diffusé un communiqué dans lequel il détaille les résultats des analyses médicales du prélat, assurant que ce dernier est en bonne santé.
Des photographies accompagnent ces dires, sur lesquelles il est possible de voir Mgr Alvarez amaigri, souriant parfois aux médecins en charge de sa visite. Ces derniers sont accompagnés de deux hauts commissaires de la police sandiniste. Des images que les nombreux détracteurs du régime sandiniste n'ont pas manqué de qualifier de propagande, fustigeant une mise en scène grotesque. "Pendant les soins médicaux, Rolando Álvarez Lagos a exprimé qu'il se sentait bien et qu'il continuait à faire de l'exercice", indique ainsi le gouvernement.
Le jour même de la publication de ces photographies, les États-Unis exigeaient du gouvernement nicaraguayen que l'évêque soit libéré. Cette demande faisait écho à la préoccupation du pape François exprimée lors de l'angélus du 1er janvier, suite aux arrestations d'au moins 14 prêtres et d'un évêque, Mgr Isidoro Mora.
Figure de la résistance à l'oppression
Ce n'est pas la première fois que les autorités nicaraguayennes communiquent selon ce protocole sur le sort de l'évêque de Matagalpa. En mars 2023, Mgr Alvarez était montré prenant un repas avec son frère et sa sœur par le média pro-gouvernemental El 19 Digital, puis au mois de juillet. Il s'était lui-même exprimé à cette occasion, et avait déclaré être "en bonne santé". Début décembre, alors que l'évêque venait de fêter son 57eme anniversaire en prison, le ministère de l'Intérieur a à nouveau publié des photos et vidéos d'une visite médicale, assurant que Mgr Alvarez bénéficie d'un "traitement préférentiel".
Mgr Alvarez, à la tête du diocèse de Matagalpa depuis 2011, avait été arrêté et placé en détention provisoire en août 2022, accusé par le gouvernement de chercher à "déstabiliser le pays". Après avoir refusé de monter dans l’avion expulsant plus de 200 prisonniers politiques vers les États-Unis, l’évêque avait été transféré à la prison de Modelo, réputée pour ses très difficiles conditions de détention.
L'Église catholique, ennemie du gouvernement
Depuis plusieurs années, le gouvernement de Daniel Ortega accroit sa répression à l'encontre de l'Église catholique, considérée comme le principal soutien des opposants au régime. Si ce sont principalement les évêques, prêtres et communautés religieuses du pays qui sont visés par des arrestations et des procédures d'expulsions, de nombreuses décisions restreignant la pratique de la foi catholique ont été relevées depuis 2018. Les crèches vivantes ou encore les processions en honneur à l’Immaculée Conception ont ainsi été récemment annulées dans les rues du Nicaragua, alors qu’elles s’y tenaient chaque année traditionnellement. Ces multiples actes de persécution ont contribué à détériorer les relations diplomatiques entre le Saint-Siège et le Nicaragua, et ont conduit le dernier représentant du Vatican à quitter le pays en mars 2023.