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Qui de nous concevrait-il d’avoir à attendre la 84e année de son âge pour vivre la rencontre la plus décisive de sa vie ? Voilà la rencontre que nous révèle l’Évangile aujourd’hui (Lc 2, 22-40). Juifs religieux et observant de la Loi, Marie et Joseph se rendent à Jérusalem pour y consacrer au Seigneur, Jésus, leur fils premier né. Dans leur désir de suivre la volonté de Dieu, tous trois y feront une double rencontre, une entrevue surprenante.
Dans l’attente de la consolation et de la délivrance
D’abord, Syméon, un homme juste et religieux, habité par l’Esprit Saint, qui attendait la Consolation de son peuple. L’Évangile ne dit pas que Syméon était âgé ; il indique seulement que celui-ci pourrait bien s’en aller une fois qu’il aura rencontré Jésus, vu le Christ, le Messie du Seigneur. Ainsi Syméon accourut-il au Temple aussitôt qu’il sut que Jésus y était. Anne ensuite, femme prophète, jeûnant et priant, qui s’adressait à ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem parce qu’elle l’attendait, elle aussi. Il est dit qu’elle était âgée de 84 ans et qu’elle s’était trouvée veuve après seulement sept années de mariage. Anne n’était pas, elle non plus, éloignée du Temple, précise l’Évangile, et elle y survint dès que Jésus y apparut.
Voici deux serviteurs du Seigneur, un homme et une femme, tous deux âgés, justes et religieux, le premier car il est habité par l’Esprit Saint ; la seconde parce qu’elle est prophétesse, qu’elle prie et qu’elle jeûne. Tous deux assez âgés pour se savoir proches de la mort. Tous deux restant cependant assez attachés à la vie pour attendre, d’un ardent désir, la consolation et la délivrance de Jérusalem et d’Israël, l’attente du Messie, comme l’avait dit l’Esprit Saint au cœur de Syméon.
L’expression d’un grand désir
L’attente de Syméon et d’Anne traduit l’expression d’un grand désir. Elle exprime toute leur vie et toute leur foi. Attente assez forte pour toujours entretenir la vie en eux, même dans le grand âge, comme pour empêcher la mort de venir les surprendre. Attente si ardente qu’elle permet à Anne de surpasser de nombreuses décennies de veuvage, comme si les sept courtes années qu’avait duré son mariage avaient été de nouvelles fiançailles préparant à cette longue espérance que deviendrait sa vie, l’espérance d’un consolateur, d’un libérateur : la venue du Messie, du Seigneur.
L'attente de Syméon et d’Anne assez forte pour toujours entretenir la vie en eux, même dans le grand âge, comme pour empêcher la mort de venir les surprendre.
Aujourd’hui encore, nombreux sont ceux qui, au cours de leur vie, ont connu un grand bonheur, bonheur si intense que parfois ils ne pouvaient pas penser qu’il finirait. Un jour cependant, ce bonheur terrestre qui semblait indestructible, a pris fin à cause d’une séparation, d’une maladie, d’un enfermement, d’un emprisonnement, d’un deuil. Cela arrive un jour à quiconque. En ces moments-là, contemplons Syméon et Anne. Par leur intime proximité avec le Seigneur, ils semblent venir nous dire, à nous aussi et à tous ceux qui ont un jour traversé l’adversité, que le jour de la promesse, jour de la rencontre, et ce sera bientôt peut-être, nous verrons de nos yeux, la délivrance et la consolation. Un Messie, le Seigneur lui-même, viendra nous l’apporter si, à notre tour, nous demeurons forts et patients dans l’attente pleine de foi en ce Christ, le Messie du Seigneur. Une attente qui se change en espérance et comble l’existence quand nous l’accueillons.
Nous verrons la lumière
Poussés par l’Esprit Saint, dans l’heureuse attente du salut, nos yeux verront alors la lumière qui se révèle à quiconque, grâce offerte à tout homme qui la désire et l’espère. Gloire des disciples et des amis du Seigneur, comme de son peuple Israël. Jésus présenté au Temple est déjà lumière pour les nations, hommes et femmes qui le désirent, l’attendent et l’espèrent. Syméon est heureux de voir, et aussi de toucher, ce salut en recevant dans ses bras le Seigneur enfant. Dieu le sauve, comme il sauve tout homme qui reçoit la grâce de l’attendre et de l’espérer, salut libérateur, cette attente durerait-elle, comme pour Anne, jusqu’à nos quatre-vingt-quatre ans.
Oui, le Messie provoquera la chute de ceux qui n’attendent plus rien. Il relèvera tous ceux qui l’espèrent de tout leur cœur. Signe de contradiction, sa parole tranche et transperce l’âme comme un glaive. Elle relève, aujourd’hui encore, le cœur capable de désirer, un cœur qui l’attend. Soyons ce cœur-là.