Pour qu'Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l'avenir d'Aleteia deviendra aussi la vôtre.
*don déductible de l'impôt sur le revenu
Le pape François a approuvé lundi 18 décembre un document du dicastère pour la Doctrine de la foi indiquant qu'il "est possible de bénir les couples en situation irrégulière et les couples de même sexe" sous certaines conditions. Une bénédiction qui n'a rien à voir avec le sacrement du mariage, le Saint-Père demeurant "ferme sur la doctrine traditionnelle de l'Église concernant le mariage, n'autorisant aucun type de rite liturgique ou de bénédiction similaire à un rite liturgique qui pourrait prêter à confusion". En ouvrant la voie à une bénédiction des "couples en situation irrégulière et les couples de même sexe", le Vatican soulève ici une question cruciale : que signifie bénédiction ? "Bénir c’est dire du bien", souligne auprès d'Aleteia le dominicain Thomas Michelet, professeur à la factulté de théologie de l’Angelicum. La question, ici, est de savoir de qui, ou de quoi, on dit du bien". Si on ne peut pas dire du bien à propos d'une situation irrégulière, on peut néanmoins la bénir pour le bien qu’elle peut contenir.
Lever l’ambiguïté sur la bénédiction du couple
Dans le texte, l’ambiguïté demeure autour du terme de "couple", puisque la déclaration Fiducia supplicans sur la signification pastorale des bénédictions mentionne le couple en tant qu’entité, et non les personnes qui le constituent. "C’est une première difficulté", soulève le dominicain. "Sous aucun prétexte, il ne faut penser que l’Église consacre ainsi une forme de petit mariage, ce qui causerait une confusion extrême. On rentre ici dans une sorte d’approfondissement des situations concrètes qui restent, et demeurent, irrégulières. Le risque est de finir par penser que tant que les gens s’aiment, tout est permis : on retrouve parfois cette manière de voir les choses dans le discours de prêtres un peu complaisants ou qui n’ont pas été formés de manière sérieuse et qui se retrouvent à simplement bénir l’amour". Pourtant, le texte invite à maintenir ferme la distinction entre le mariage et les autres formes d’union. En revanche, quand quelqu’un se tourne vers l’Église pour supplier le secours de Dieu, et c’est le sens même du titre Fiducia supplicans, ceux qui implorent la confiance, l’Église ne peut pas fermer ses portes.
L'hôpital de Dieu qu’est l’Église est là pour réconforter les pécheurs, pas pour les conforter dans leur péché.
La question, dès lors, est de savoir ce que l’Église bénit dans le cadre de cette déclaration. "Le texte, malheureusement, n’est pas très clair là-dessus", poursuit le frère Thomas Michelet. "Il apporte des précisions justes sur ce qu’est une bénédiction : on ne bénit pas seulement les bien-portants, mais aussi ceux qui sont loin de Dieu, sans pour autant bénir le mal qui les en éloigne. On les bénit pour qu’ils s’en sortent. On ne bénit pas que les justes, on bénit aussi les pécheurs. Mais on ne peut pas bénir une situation mauvaise, dans la mesure où l’on ne peut pas bénir le mal". On ne peut alors que regretter l’ambiguïté résiduelle d’une déclaration qui risque d’engendrer beaucoup de désarroi parmi les fidèles.
Pour le dominicain, "le texte manque de précision : tout ce qu’il dit est juste, le problème vient de ce qu’il ne dit pas. Il marque bien quelque chose de vrai : c’est vrai, on peut bénir des pécheurs, mais le mot “conversion” n'est jamais mentionné, et c’est regrettable. Certes, l'Église n’est pas faite pour les justes, mais pour les pécheurs, mais pour que les pécheurs deviennent justes, sinon c’est juste un groupe de pécheurs, point barre. Il ne s’agit pas juste de dire que l’Église est faite pour les malades : un hôpital dans lequel on ne soigne pas les malades n’est pas un hôpital, c’est un mouroir".
D’après le frère Thomas Michelet, il faut alors considérer cette bénédiction comme une attitude pastorale d’ouverture de l’Église, dans une dimension d’accompagnement des personnes qui s’en sont éloignées. "Lorsque le Christ bénit la brebis perdue, il ne la bénit pas parce qu’elle est perdue, mais parce qu’elle est une brebis, afin qu’elle rejoigne les autres. Dieu ne nous dit pas "je t’aime comme tu es, surtout ne change pas", il nous invite sans cesse à revenir vers Lui". Le texte, pris ainsi, demeure incomplet : il ne faut pas que les gens qui se trouvent dans ces situations irrégulières puissent penser que par cette bénédiction, l’Église régularise leur situation. Ce n’est pas un pacs chrétien, même si certains risquent de le prendre pour cela.