Vous voulez annoncer le Christ autour de vous ? Pourquoi ne pas penser à le faire sur les réseaux sociaux ? Ces lieux d’échanges virtuels sont désormais incontournables pour évangéliser le plus grand nombre, notamment les plus jeunes. Mais voilà, une question se pose : comment s’y prendre ? Car si évangéliser sur Internet est désormais aussi fondamental que de le faire dans la rue, cela nécessite de maîtriser certains codes. TikTok, Instagram, YouTube… Quelle plateforme choisir ? Que dire et comment le faire ? Aleteia a demandé à quelques missionnaires numériques de livrer leurs astuces pour se lancer dans l’évangélisation 2.0.
1Discerner et se lancer
Vous voulez évangéliser sur Internet ? Le plus dur est peut-être d’abord de savoir comment vous lancer. "Il y a ceux qui attendent d’être prêts, ceux qui vont y aller et ceux qui sont prêts mais qui n’osent pas se lancer. Finalement, ce n’est pas si compliqué. Il n’y a pas forcément besoin de formation, il suffit d’y aller, c’est tout", explique le frère Paul-Adrien d’Hardemare, prêtre dominicain et Youtuber. Bien sûr, lorsque l’on veut porter le message de l’Église à son prochain, il est normal et même essentiel, de vouloir bien faire. Mais cela ne doit pas pour autant vous empêcher de vous lancer sous prétexte que vous n’êtes pas assez qualifié.
"Je crois qu'il n'y a pas de "bon départ" ou de "bonne façon”, le tout c'est d'être heureux de parler de Dieu sur les réseaux !", estime quant à elle Diane. Connue sous le nom de Diane_cbt sur Instagram, elle témoigne de sa foi et de son quotidien, avec humour et bonne humeur. "Pas besoin d'être un prêcheur aguerri, je crois que le plus fort témoignage c'est justement de montrer qu'on est dans le monde, mais pas du monde !"
En revanche, il est nécessaire de savoir discerner ses intentions profondes avant de se lancer sur les réseaux. "Il faut se demander pourquoi je le fais, si c’est pour Jésus ou pour moi, assure le père Mustapha Amari, influenceur et prêtre de la communauté du Chemin Neuf. C’est une question déterminante, car il faut bien se demander si on fait les choses gratuitement."
2Bien choisir son support
Instagram, Facebook, TikTok, YouTube, etc. Sur Internet, ce ne sont pas les terrains d’évangélisation qui manquent. Oui mais lequel choisir ? "Il faut connaître les codes des réseaux sociaux et l’âge de ceux qui les utilisent", explique Diane. Facebook est fréquenté par les plus de 30 ans, Instagram par les 18-35 ans, et TikTok est plus utilisé par les adolescents. "La cible est différente, les contenus y sont donc différents, l'un nourrissant l'autre. Sur Facebook les gens aiment partager, papoter sous les posts ; sur Instagram ces échanges se passent plus en story, et puis sur Snapchat et TikTok on est dans des contenus de l'utra-rapide, de consommation", remarque-t-elle encore.
"Le format donne la façon de parler, complète le père Mustapha. Instagram est plus doux, le contenu est soigné. Sur TikTok, on y va plus franchement." A chaque réseau social ses codes: à vous de voir ceux que vous êtes le mieux susceptibles de maîtriser en fonction de vos compétences et de vos talents. "Chacun a ses avantages et ses défauts. Il n’y a pas le même public: TikTok, c’est pour le semeur, car on touche un public plus large, Instagram fonctionne davantage sur le mode de la communauté."
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Il ne faut pas non plus oublier YouTube, outil très apprécié par un un public large et intéressé, mais qui nécessite plus de compétences techniques. "C’est un très bon investissement quand on veut se spécialiser", remarque le père Mustapha. "Mais de fait, le contenu vidéo et audio est nécessairement plus travaillé, et cela prend beaucoup de temps." Car contrairement à ce qu’on le peut penser, l’usage des réseaux sociaux est chronophage et énergivore. Le père Mustapha et le frère Paul-Adrien notent tous les deux l'importance de la régularité, pour ne pas être invisibilisé par les algorithmes des applications. "Sur TikTok, c'est à peu près deux posts par jour", prévient le père Mustapha.
Et que penser de multiplier les formats ? "On ne peut pas être bon partout", remarque quant à lui le frère Paul-Adrien. "Il y aura toujours une plateforme sur laquelle vous serez meilleur que sur l’autre, et il faut donc se concerter sur celle qui marche. Pour moi, par exemple, YouTube fonctionne bien, mais pas TikTok".
3Spontanéité, humilité et sagesse sont vos alliées
"Le plus efficace est le témoignage personnel", assure le père Mustapha Amari. "Ce qui marche surtout, c’est l’authenticité, il faut être naturel, donc il faut commencer avec sa vie et le faire avec spontanéité." Pour Diane, c’est l’humilité du témoignage qui garantit son efficacité, et la confiance en Dieu qui agit à travers nous. "La clé, c'est d'être convaincu que l'on va rejoindre [les gens] malgré nos petitesses humaines, nos manques de précisions et nos faiblesses. L'Esprit saint fait des merveilles de nos mini capacités, croyez simplement que la grâce va abonder vos capacités et vos dons !"
"Surtout, il faut lire la Bible."
S’il n’y a pas besoin de faire 10 ans de théologie pour évangéliser, cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas se former. Il y a plein d’outils pour cela, notamment sur Internet mais il faut d’abord commencer par l’essentiel. "Surtout, il faut lire la Bible", conseille le père Mustapha. "Il faut vraiment être enraciné dans la Parole." Il faut également penser à être entouré de personnes formées et prêtes à offrir leurs conseils et leur avis. "Je m'aide énormément de lectures, d'homélies et d'échanges avec des prêtres pour garder en tête tous les enseignements de l'Église", explique Diane. "Le tout ensuite est de bien temporiser et reconnaître que l'on peut aussi se tromper."
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Pour éviter de marcher trop sûrement sur une planche savonneuse, quelques précautions peuvent servir. "Il faut faire attention à bien différencier ses opinions personnelles de celles de l’Église", note le frère Paul-Adrien. "Les gens qui vont vous voir sur les réseaux sociaux ont besoin de savoir quand vous parler en nom propre et quand vous le faites au nom de l’Église."
Si vous n’êtes absolument pas à l’aise avec certains sujets, il n’est pas non plus nécessaire de se torturer. "On n’est pas obligé de parler de ce que l’on ne maîtrise pas", considère le père Mustapha. "Il faut éviter les discours dialectiques qui invitent à la confrontation, notamment les questions d’ordre moral, sauf si c’est pour montrer une dimension d’accueil. Ce sont des questions qui demandent un sens pastoral que tout le monde n’a pas."
4Savoir poser des limites
Internet est une chance et une formidable opportunité pour le missionnaire du XXIe siècle. Mais il peut aussi déséquilibrer sa propre vie personnelle et spirituelle, si certaines précautions ne sont pas prises. "Il faut se poser des règles avant de commencer : se fixer des horaires, tenir une certaine discipline personnelle", préconise le père Mustapha. Diane confirme. "Le risque des réseaux, c'est de se laisser entraîner par le "plus je montre, plus j'ai envie d'en montrer". De mon côté j'ai la chance d'avoir un mari très critique sur les réseaux et sur ce que je partage. Cela me permet d’avoir cet ancrage quotidien dans le réel et ne pas me laisser emporter par ce genre de tourbillon."
Pour la jeune femme, le secret pour garder les pieds sur terre se trouve dans la beauté et la simplicité de la vie de tous les jours. "D’un autre côté, je trouve cela si bon de montrer la réalité d'une foi ordinaire, avec des sujets que l'on partage et un peu de quotidien !"
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5Se protéger
L’ère des réseaux sociaux, c’est aussi celle des polémiques et des fake news, et cela peut en rebuter plus d’un parmi ceux qui voudraient se lancer dans l'évangélisation numérique. "Il faut savoir que témoigner, c’est aussi s’exposer", note Diane. Pour cette raison, il est essentiel de savoir se protéger. Cela peut être de ne pas répondre aux attaques directes. "Honnêtement, je ne saisis pas bien le sens de venir en message privé pour descendre le témoignage ou le travail de quelqu'un, donc je préfère ne pas entrer dans le débat", assure-t-elle. "On a déjà bien assez de combats personnels pour s'en éviter de nouveaux !"
Quand on a des commentaires négatifs, la règle est de ne pas jamais répondre tout de suite.
"L’hostilité est normale, ça fait partie de l’évangélisation", note le père Mustapha. "Mais quand on a des commentaires négatifs, la règle est de ne pas jamais répondre tout de suite. Le problème des réseaux sociaux, c’est qu’on est dans la réactivité et avec des formats courts. Il faut se demander ce qui est blessé en moi, si c’est profond, je peux préparer une réponse."
Mais si l’on est trop ébranlé, le bon réflexe est aussi de prendre le plus de distance possible. "Avec l’expérience, on se rend vite compte que répondre aux attaques est en fait contre-productif", remarque le frère Paul-Adrien. "Il vaut donc mieux supprimer les commentaires auxquels on ne sait pas réagir." Contre les commentaires, parfois haineux, le dominicain conseille un remède infaillible : la charité et la patience.
6Garder Dieu toujours au centre
On termine avec l’essentiel : il faut garder à l'esprit que le but de votre présence sur les réseaux sociaux, c’est Dieu. Internet est l’outil que vous avez choisi pour le servir. "Il ne faut pas oublier que le but n’est pas de se prêcher soit même mais Dieu, le Seigneur qui agit par la grâce", appuie le frère Paul-Adrien. "C'est le plus gros du boulot !", s’exclame Diane. "Le démon est fort pour nous faire croire que ce genre de partage en story ou en photo est une évangélisation alors que la réalité c'est qu'on a envie de montrer notre christianisme. C'est super dur ! Mais quand le feu est moins là, c'est super tentant d'être un chrétien de façade. Dans ce genre de moments, j'éloigne mon téléphone. Je préfère prendre quelques jours à ne pas en parler, parce que je ne me sens pas honnête, pour revenir plus tard !"
Garder ce cap nécessite une grande honnêteté vis-à vis de soi-même, de l’humilité, mais aussi du courage lorsqu’une décision s’impose. "Il faut pouvoir se demander si la prière est toujours la première dans ma vie. Si on sent que ça nous dépasse, il faut arrêter et couper tout de suite", complète le père Mustapha. "On peut aussi penser à faire une détox des réseaux."
Évangéliser n'est pas une mince affaire, mais il y a toujours plus de joie à donner qu'à recevoir, et cela porte aussi du fruit pour soi. "Je crois profondément que le fait de témoigner enrichit notre propre foi", assure Diane. "Le fait de vouloir encourager les autres peut nous encourager nous même".