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Quelle est la récompense promise par le maître dans la parabole ? Un denier. Que trouve-t-on sur un denier ? L’image du roi. Dès lors, que promet le maître en récompense du travail ? Rien d’autre que lui-même. Il en va bien ainsi de Dieu à notre égard. Que promet Dieu aux hommes ? Rien d’autre que lui-même. Rien d’autre qu’être transformés radicalement à son image et à sa ressemblance, et cela pour l’éternité. Que pourrait-il donner de meilleur ? Dieu en tant que Dieu donne Dieu lui-même. Dieu en tant qu’homme, en Jésus-Christ, donne sa propre vie par amour, pour réaliser ce don aux hommes qu’est la vie éternelle auprès de Dieu, dans l’image et la ressemblance de Dieu. Que ce soit la Trinité éternelle depuis toujours, ou que ce soit le Christ en son Incarnation, Dieu ne veut jamais donner moins que lui-même.
Sa propre vie
Le pilote de guerre et héros de la Première Guerre mondiale Georges Guynemer aurait affirmé : « Qui n’a pas tout donné n’a rien donné. » Et il ne se payait pas de mots, puisqu’il mourut au combat le 11 septembre 1917, dans le ciel de Flandres. Dieu pourrait-il se montrer inférieur à Guynemer dans le don en ne donnant pas tout, en donnant moins que lui-même ? À cet égard, Thomas d’Aquin, lorsqu’il s’intéresse à la religion musulmane, observe que plus encore que la personnalité douteuse du « beau modèle » qu’est supposé être le prophète Mahomet, ou d’un certain nombre de doctrines coraniques, c’est surtout le matérialisme vulgaire de la récompense promise après la mort qui suffit à décrédibiliser l’ensemble du message : un Dieu qui donnerait comme récompense ultime moins que lui-même, et même infiniment moins, ne serait guère généreux.
La Révélation chrétienne nous enseigne au contraire que Dieu est généreux au point de vouloir nous communiquer sa propre vie. Ce qu’il promet à l’homme juste, à celui qui accepte d’être appelé et pardonné, à celui qui conforme sa vie à l’Évangile par le soutien de la grâce, ce n’est pas quelque bien inférieur, fût-ce en proportions infinies. Non, Dieu ne nous promet rien d’autre que le souverain bien, infini et éternel : Dieu lui-même. La grâce en ce monde, puis la gloire au Ciel, c’est de participer de la vie divine au point de ressembler au Christ en toutes choses.
Une seule et unique récompense
Et c’est bien pour cela que la récompense ne saurait être différente selon le moment auquel nous avons répondu à notre vocation. Peu importe en effet combien de deniers l’ouvrier reçoit pour salaire de son travail dans la vigne, si dès le premier denier il obtient tout. La grâce et la gloire, la ressemblance à Dieu, la récompense initiale et unique se suffit à elle-même. Multiplier les deniers ne changerait rien à l’affaire. Diviser les deniers serait impossible, en l’espèce. On n’est pas plus ou moins dans la béatitude du Ciel, on y est ou on n’y est pas.
Dieu promet une seule et unique récompense.
Dès lors, qu’on interprète les différentes heures auxquelles les ouvriers sont appelés selon une acception collective, en référence alors aux différents âges du monde, aux différentes alliances de Dieu avec les hommes, ou bien selon une acception personnelle, donc en référence aux différents moments d’une vie humaine, on comprend pourquoi la récompense ne saurait être fondamentalement différente quelle que soit l’heure du jour. Dieu aurait-il dû promettre quelque chose de différent à Adam, à Abraham, à Moïse, à Isaïe, aux juifs du temps de Jésus et aux païens ? Sans parler d’Adam qui avait péché, Dieu aurait-il dû récompenser davantage les juifs pieux demeurés fidèles à l’Alliance pendant des siècles, par préférence aux païens convertis depuis le Christ ? Mais qu’aurait-il pu donner de plus que lui-même ? Aux juifs comme aux païens, comme à tous ceux qui veulent suivre le Christ depuis deux mille ans, Dieu promet une seule et unique récompense, la même pour tous, quels que soient les titres d’ancienneté, de noblesse ou de mérite dont chacun puisse se prévaloir. Car de la part de Dieu, le don ne saurait être inférieur au donateur, quels que soient l’ancienneté, la noblesse ou les mérites du destinataire.
Pendant l’unique jour de sa vie terrestre
La question du temps de la réponse est-elle indifférente ? La parabole semble l’indiquer, puisque la récompense est identique quel que soit l’horaire auquel l’ouvrier a commencé à travailler. Il ne faut toutefois pas s’y tromper. Il y a bien un impératif de temps. La parabole se déroule sur une journée unique, du matin au soir. C’est dire que s’il est indifférent — quant à la récompense — d’avoir commencé à la première ou à la dernière heure, il est en revanche capital d’avoir saisi l’occasion pendant l’unique jour qui nous est offert, c’est-à-dire pendant le temps de la vie terrestre. Aucun ouvrier ne sera embauché ni ne recevra de salaire le lendemain, c’est-à-dire après le temps de sa vie terrestre. C’est ce qu’enseigne explicitement le Catéchisme de l’Église catholique contre la théologie frelatée et pourtant répandue de l’option après la mort : « « La mort met fin à la vie de l’homme comme temps ouvert à l’accueil ou au rejet de la grâce divine manifestée dans le Christ » (n. 1021).
Il n’est donc pas tout à fait indifférent de savoir à quel moment je réponds à l’appel de Dieu. Si je remets toujours au lendemain le temps de ma conversion, le temps de l’accueil de la miséricorde divine, le temps où je coopère à la grâce et porte du fruit, alors je cours le risque d’entendre Jésus me dire, comme dans une autre parabole : « Tu es fou : cette nuit-même, on va te redemander ta vie » (Lc 12, 20).
Dès ici-bas
En dehors de la perspective d’une mort soudaine qu’on ne saurait prévoir, il y a une dernière raison pour ne pas repousser le temps de la conversion. La parabole des ouvriers de la vigne ne fait apparaître cette raison que de manière cachée. L’enjeu d’être embauché au plus tôt n’est pas seulement celui d’obtenir la récompense, d’ailleurs identique quel que soit le moment. L’enjeu, c’est d’être le plus possible, et dès avant la récompense, dans la compagnie du maître — Dieu le Père — et de son intendant — le Christ et l’Esprit-Saint. Autrement dit, l’enjeu n’est pas seulement de jouir de la béatitude au Ciel, mais de vivre de la grâce, au cœur de l’Église dès ici-bas, car c’est dès ici-bas que cela vaut la peine de vivre dans l’intimité de Dieu et des saints.