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Une citation de saint Jérôme peut nous faire entrer dans le thème de notre méditation de l’évangile de ce dimanche : « Quand nous nous référons au Mystère eucharistique et qu’une miette de pain tombe, nous nous sentons perdus. Et quand nous écoutons la Parole de Dieu, c’est la Parole de Dieu et le Corps et le Sang du Christ qui tombe dans nos oreilles et nous, nous pensons à autre chose. Pouvons-nous imaginer le grand danger que nous courons ? » Nous connaissons bien en effet la parabole de la semence que nous venons d’entendre au point peut-être de ne plus prêter attention à ce qu’elle nous dit. Comment l’entendre de manière neuve, comment la recevoir pour qu’en tombant dans notre oreille, elle devienne nourriture pour nous et nous transforme ? Nous lisons dans le prologue de saint Jean que le Verbe, c'est-à-dire la Parole, s’est faite chair et a habité parmi nous. Nous comprenons alors que la véritable semence, c’est le Christ. Le Christ est le Verbe de Dieu. Dans l’exhortation apostolique Verbum domini, le pape Benoît XVI écrit encore que la Parole ne s’exprime plus d’abord à travers un discours, fait de concepts et de règles. Nous sommes mis dorénavant face à la personne même de Jésus. Son histoire unique et singulière est la Parole définitive que Dieu dit à l’humanité. La Parole a donc non seulement une voix mais elle a aussi en Jésus Christ un visage.
Le grand danger que nous courons
Ainsi, la question véritable qui se pose à nous aujourd’hui dans l’évangile est bien celle-ci : quelle place accordons-nous au Christ dans notre vie ? Comment choisissons-nous de nous laisser transformer par lui ? Quel est le type de relation que nous entretenons avec Lui ? La dernière partie de l’évangile nous éclaire ainsi sur cette question. Il y a l’homme qui au fond aime bien entendre parler du Christ mais qui se détourne de lui dès que les premières difficultés de la vie ou des épreuves se présentent. Il y a aussi l’homme trop occupé par les soucis de ce monde, par le rythme de la vie trop intense au point que cette relation avec le Christ reste finalement épisodique, superficielle, sans lendemain. Pour reprendre la parole de saint Jérôme, pouvons-nous imaginer, en nous détournant du Christ, le grand danger que nous courons ?
Le véritable appel qui retentit aujourd’hui est un appel à choisir le Christ et à l’accueillir au cœur de notre vie. C’est une invitation à nous laisser rejoindre par le Christ et nous laisser transformer par lui, par sa vie, par son enseignement, en accordant notre volonté à la sienne. Par cette humanité assumée dans sa chair, le Christ nous éclaire sur le chemin que nous avons à vivre, un chemin enraciné dans l’amour, l’amour exigeant et profond, le chemin du don de soi par amour. Et nous entendons alors dans cette page d’évangile que celui qui se laisse ainsi ensemencer par le Christ, celui qui choisit de laisser le Christ vivre en lui, celui qui comprend « qu’en dehors de lui, il ne peut rien faire », celui-là porte du fruit. Celui qui choisit de vivre du Christ, celui-là ne perd rien de lui-même mais au contraire gagne tout. Il grandit en vie éternelle.
Celui qui a le Christ ne manque de rien
C’est ainsi que nous pouvons comprendre cette phrase énigmatique de l’évangile : « Celui qui a recevra encore et il sera dans l’abondance. Celui qui n’a rien se fera enlever même ce qu’il a » (Mt 13, 12). Celui qui a le Christ ne manque de rien. Celui qui s’attache au Christ trouve ainsi les réponses aux questions qui accompagnent son chemin. Celui qui a le Christ ne craint pas d’affronter les situations difficiles, les moments de crise, les épreuves de la vie car il sait que le Seigneur l’accompagne, qu’il est là présent et qu’il ne le lâchera pas. Celui qui a le Christ ne peut pas désespérer de lui-même ou des autres car il sait, qu’à travers les aléas de la vie, celle-ci a pourtant un sens, une destinée. Notre assurance, c’est en Christ qu’elle se trouve ! Mais celui qui pense y arriver par lui-même, qui se suffit à lui-même, qui met son assurance en ses propres capacités, le jour où les difficultés se présenteront qu’il ne pourra gérer, se fera enlever même cette assurance et ses capacités qu’il croyait avoir.
Rappelons-nous les paroles de saint Paul : « Si donc quelqu’un est dans le Christ, il est une créature nouvelle » (2 Co 5, 17). Invoquons l’Esprit Saint pour qu’il ouvre nos cœurs à la présence du Seigneur. Que cette semence qu’est le Christ puisse agir nous et produire un fruit qui demeure.