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Congo : le combat quotidien du père Bashimbé à Bukavu

Congo, RDC, Afrique, religieuse, colombe, paix
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Thomas Oswald - publié le 22/05/23
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À l’extrême Est de la République démocratique du Congo (RDC), le père Floribert Bashimbé tente de venir en aide à ses concitoyens malgré une société menacée par l’effondrement total. Reportage.

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Il n’y a plus de place pour s'asseoir dans le bureau du père Floribert Bashimbé, vicaire général de Bukavu. Une épaisse couche de dossiers couvre le canapé et la table basse. Quant à son bureau, il ressemble à une chaîne montagneuse imaginée par Franquin. Au sommet d’une pile plus importante que les autres, le drapeau du Vatican se dresse fièrement, comme planté par un alpiniste victorieux. Chacun de ces dossiers représente l’une des tâches que doit accomplir "Monseigneur" Floribert, qui gère le diocèse de Bukavu, une région du Congo frappée par la guerre civile et la pauvreté. Il sourit : "Ne vous en faites pas, je m’y retrouve, c’est juste une période un peu compliquée".

RDC, Congo
Le père Floribert

À vrai dire, depuis 1995, toute l’histoire de cette région du Congo est compliquée. À cette époque, une guerre civile éclate et elle ne s’est jamais tout à fait éteinte depuis. Des groupes armés venus du Rwanda voisin se sont mis à accaparer des pans entiers de territoire. Ils ont terrorisé les populations, massacrant, pillant, jetant sur les routes des millions de malheureux. 

Bukavu porte les stigmates de cette crise. Ses rues, saturées, rarement goudronnées, sont encombrées de vendeurs à la sauvette qui tâchent de gagner quelques piécettes. Anciens paysans, ils ont fui leur terre la kalachnikov entre les reins et survivent avec presque rien. La population de la ville a quadruplé en un quart de siècle. Les habitats informels s’accumulent le long des pentes des collines. Certaines constructions de bric et de broc, bâties sur d’autres, paraissent suspendues dans le vide, justes soutenues par des câbles rouillés ou des troncs de bois tordus. 

RDC, Congo

Au bord de l’anarchie

Le vicaire pilote l’un des 4x4 du diocèse au milieu de ce Capharnaüm. Les taxis, motos et triporteurs bouchent des carrefours "C’est un fléau. Ils se garent n’importe où… On ne sait jamais à l’avance combien de temps va prendre un trajet", s’agace Mgr Floribert derrière le volant. Beaucoup d’entre eux sont des soldats démobilisés, qui montrent peu de civisme… Il retrouve le sourire quand deux grands gaillards efflanqués viennent frapper à sa vitre. "Salut Monseigneur ! Bienvenue !" Ils ont de larges sourires au milieu de leurs mines patibulaires. Enfants des rues, ils avaient été recueillis par le prêtre qui les a confiés à l’un des orphelinats que gère l’Église. 

Ici, l’Église gère tout, empêchant la société congolaise de s’effondrer tout à fait. C’est elle qui possède la moitié des écoles, la plupart des hôpitaux. Devant le problème de l’accès aux soins des Congolais, elle est en train de mettre en place une mutuelle de santé. Pour cinq dollars par an, elle permettra aux cotisants de bénéficier de soins de base. Elle s’occupe aussi d’organiser les mineurs qui ramassent le coltan en syndicat pour qu’ils défendent leurs droits. 

Ce fameux coltan, indispensable aux engins de haute technologie se ramasse ici avec des moyens de fortune, par des mineurs qui n’ont pas un sou devant eux. Ils creusent à la pelle et à la pioche, au jugé, à la recherche des "pépites" qui les sauveront provisoirement de la faim. Sans conscience de la valeur du minerai qu’ils extraient, incapables de négocier leur richesse, ils sont à la merci des intermédiaires peu scrupuleux qui rachètent le fruit de leur travail à vil prix. 

RDC, Congo

Aucune crise des vocations à l’horizon

"Par bonheur, nous avons une Église dynamique et vivante", jamais abattu, le visage du prêtre s’illumine. Ici, les églises sont pleines, les dimanches comme la semaine et les fidèles laissent éclater leur joie, chantant et dansant devant les autels. Les séminaires fournissent chaque année de grandes promotions et il n’y a aucune crise des vocations à l’horizon !  

Le vicaire est reçu en grande pompe pour la cérémonie de prise d’habit de deux sœurs auprès des Filles de la Résurrection. L’une d’entre elle, venant du Rwanda, est joyeusement accueillie avec toutes l’effusion dont savent faire preuve les religieuses congolaises ; chez elle la joie de l’Évangile ne se met certainement pas sous le boisseau ! Cet accueil ne va pourtant pas de soi dans cette région du Congo où la population est martyrisée par des groupes armés d’origines rwandaises. Parmi toutes les missions impossibles confiées à l’Église du Congo, celle de prêcher la fraternité n’est certainement pas la dernière. 

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