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La mission souffre d’idées préconçues. Durée trop longue, mauvais timing, trou dans le CV… Les raisons ne manquent pas pour éviter de se poser trop sérieusement la question d’un départ en mission. Pourtant, il serait dommage de sentir un appel à partir et d’être bloqué par des freins qui n’en sont finalement pas. Cela suppose un vrai discernement, qui permet de faire la part des choses entre des freins réels, objectifs, et des peurs aisément aplanies. L’homme ne se trouve-t-il pas dans la mesure où il se donne? (Concile Vatican II). Témoignages de nombreux volontaires Fidesco qui ont surmonté leurs appréhensions pour vivre pleinement la mission à laquelle ils étaient appelés.
Excuse n°1"Un ou deux ans, c’est trop long !"
Fidesco envoie des volontaires en mission pour une durée d’un à deux ans. Une expérience du service qui peut paraître longue aux yeux de certains. Mais pour Fidesco, la mission s’inscrit dans le temps. Il faut du temps pour s’ouvrir et s’adapter à une autre culture, en saisir la richesse et la beauté, du temps pour s’immerger dans la vie d’un quartier et tisser des liens de confiance, du temps pour mener à bien des projets de développement sur le long terme. Le temps est aussi le secret pour que la mission porte du fruit, humainement et spirituellement.
Une partie du discernement d’Étienne et Solenn, jeunes fiancés, a porté sur cette question du temps alloué à la mission. Si tous deux nourrissaient le projet de partir en couple, Solenn souhaitait se tourner vers un organisme qui proposait des projets humanitaires inscrits dans le long terme tandis qu’Étienne envisageait plutôt des projets à court terme, quelques semaines, dans différents endroits de la planète. Finalement, Étienne et Solenn sont partis à Madagascar avec Fidesco de 2017 à 2019. Le déclic ? La volonté de "construire quelque chose en couple" dès le début de leur mariage. Une construction qui a besoin de temps pour être solide et pour que le couple puisse s’enraciner en elle.
Excuse n°2"Ce n’est pas le bon moment !"
"J’aimerais beaucoup partir en mission mais ce n’est vraiment pas le bon moment !" Le choix du "bon moment" fait partie intégrante du processus de discernement : pourquoi n’est-ce pas le bon moment ? Pour des raisons objectives ou bien à cause de peurs que je n’arrive pas à dépasser ?
La question du timing s’est posée à Jérôme et Albane. Dès le début de leurs fiançailles, Jérôme percevait clairement un appel à partir en mission humanitaire en couple. "Mais moi, à ce moment-là, je commençais tout juste un nouveau travail et je n’avais pas du tout envie de partir tout de suite. J’avais déjà fait beaucoup de stages et avais hâte d’entrer dans la vie active. Nous n’étions plus du tout sur le même timing", se rappelle Albane. Le couple s’est marié, puis a discerné que le moment était venu. "On a pris notre temps et au bout d’un mois de mariage, on s’est dit que c’était le bon moment, nous étions alignés à la fois sur le sens que nous voulions donner à notre vie et sur le timing". Ils ont été envoyés par Fidesco à Madagascar de 2015 à 2017.
Excuse n°3"Je ne veux pas freiner mon évolution professionnelle"
Le retour sur le marché du travail après deux ans de mission humanitaire est un frein régulièrement cité par les volontaires en discernement. Comment expliquer ce « trou » dans son CV ? Pourtant, nombreux sont les volontaires qui témoignent combien la mission est valorisée dans la sphère professionnelle. Si on ne part pas en mission pour ajouter une ligne à son CV, il n’en demeure pas moins que la mission est valorisée et valorisable dans le monde du travail : sens des responsabilités, de l’organisation, capacité à aller vers l’autre, capacité d’adaptation…
Ophélie, envoyée en Afrique du Sud auprès d’une association qui s’occupe de personnes handicapées, témoigne de qualités humaines, acquises durant sa mission : "La mission m’a permis de développer une plus grande confiance en moi, je me sens désormais capable de faire de nouvelles choses, de prendre des initiatives." Pour Cyrille, c’est son expérience en Zambie qui a séduit son employeur. Consultant ingénieur informatique, il a été envoyé dans un petit village de brousse. Sa mission était de soutenir les frères Comboniens dans leurs nombreux projets : suivi de chantiers, gestion de stocks de matériaux de construction, planification et suivi de travaux. A son retour en France, il retrouve son entreprise, y travaille un an puis se reconvertit dans la gestion de projet dans une nouvelle structure : "C’est mon expérience en mission qui a motivé mon nouvel employeur", confie-t-il.
Excuse n°4"On vient de se marier, on veut en profiter !"
Et si le meilleur moyen de profiter de l’autre et de son jeune couple était de partir en mission ? L’occasion rêvée de fonder son couple sur le roc et de découvrir l’autre tel qu’il est vraiment et non tel qu’il est rêvé. "Pour nous, après le mariage, c’était le bon moment. On trouvait cela super de construire nos premières années de couple là-bas", confie Laetitia, envoyée à Manille avec son mari Gwenaël. En s’exilant de leur vie parisienne, ils comptaient se centrer sur leur couple, se focaliser sur l’essentiel et se découvrir dans le service de l’autre, à travers un mode de vie simple. La mission permet en effet de découvrir à deux la grâce du sacrement de mariage, loin de la famille et de ses amis, en mettant de côté la vie mondaine et culturelle.
Alors qu’ils étaient mariés depuis tout juste deux ans, Emmanuel et Emmanuelle sont partis en mission à Concepción (Chili) avec Fidesco, dans un foyer pour enfants. Cette expérience a marqué leur vie et les a fortifiés. "Cela a permis de souder complètement notre couple", explique Emmanuelle. "Nous n’avions pas de télévision. Nous avons discuté de plein de choses et nous avons aussi appris à ne pas forcément parler, à être en silence. Il y a eu parfois de grandes difficultés que nous avons traversées ensemble".
Excuse n°5"Fidesco, c’est pour les cathos"
Les volontaires Fidesco sont au service d’autres hommes sans distinctions ethniques, culturelles ou religieuses. Néanmoins, Fidesco est une ONG catholique au service de projets de développement portés par les Églises locales. Une certaine adhésion aux valeurs de l’Eglise est donc nécessaire mais personne n’est juge de la foi qui anime les volontaires. Une foi qui par ailleurs est bien souvent fortifiée par la mission. Davantage de temps et de disponibilité pour prier, soutien spirituel entre les volontaires, projets qui ont du sens… Autant d’éléments qui contribuent à grandir spirituellement et à vivre sous le regard de Dieu.
Au fur et à mesure de sa mission en Zambie, la foi de Jean-Baptiste, converti à l’âge de 23 ans, est devenue plus solide, plus ancrée dans son quotidien. C’est là-bas qu’il a perçu de quelle manière il était appelé à la vivre. Six mois avant son retour en France, il a ressenti le désir de faire connaître le Christ. "Ma vie, il faut qu’elle soit missionnaire", se dit-il. A son retour, il passe un an avec Cap Missio à Montpellier et se forme à l’évangélisation. De retour à Paris, il est embauché dans un cabinet de conseil et de coaching en tant que chef de projet. En parallèle, il multiplie les engagements pour témoigner et se mettre au service des autres : il entre dans la Communauté de l’Emmanuel et poursuit des missions d’évangélisation. En lien avec les paroisses, il organise des veillées de prière, il témoigne dans les aumôneries et les lycées, il participe au Festival d’Anuncio… "Partir en Zambie m’a donné cette fibre missionnaire, qui pour moi prend désormais la forme de l’évangélisation directe. Le Seigneur donne plein d’opportunités pour évangéliser au quotidien."
Excuse n°6"Et si je perdais des occasions de rencontrer l’âme sœur?"
Se lancer dans l’aventure missionnaire tout en étant célibataire : n’est-ce pas du temps perdu dans la quête de l’âme sœur ? Au contraire, les volontaires témoignent de la fécondité du célibat en mission, et de la croissance humaine qu’il engendre. Le célibat permet une grande disponibilité à la mission, aux autres et ouvre à des relations profondes. Bon nombre de volontaires s’accorde à dire que le temps de la mission passe très vite, et qu’elle est une occasion de grandir à de nombreux points de vue : ouverture sur les autres et sur le monde, sens des responsabilités et de l’organisation, croissance spirituelle parfois… Pour Camille*, cela est loin d’être du temps perdu. Volontaire en tant que sage-femme au Congo de 2011 à 2013, elle nourrissait quelques réticences avant de s’engager : "Avant le départ, quand on a 23 ans, deux ans semblent une éternité et j’avais peur pour mon célibat, peur de perdre du temps. Peur de rentrer et de retrouver tous mes amis mariés." Avec le recul, elle en sourit aujourd’hui : "Je crois qu’il ne faut vraiment pas hésiter à partir deux ans, ce n’est pas si long, et si ça peut nous façonner et nous rendre meilleurs, c’est évident que ce n’est pas du temps perdu, bien au contraire !".
Excuse n°7"Les besoins sont déjà énormes en France"
Pourquoi servir au loin alors qu’il y a tant de besoins en France, au seuil de nos portes ? Sans compter que partir au bout du monde n’a vraiment rien d’écologique ? Et pourquoi partir dans un esprit missionnaire alors que l’Évangile a déjà atteint tous les continents et que la France est plus déchristianisée que certains pays d’Afrique ou d’Amérique du Sud ? Donner la primauté à un type d’engagement plutôt qu’un autre revient à mettre en concurrence des nécessités missionnaires. Comme s’il y avait des missions qui se justifiaient, et d’autres qui seraient moins légitimes. Des lieux prioritaires, et d’autres moins.
La mission au loin et la mission en France ne sont pas à opposer.
"Or il y a des besoins partout, en France comme à l’étranger. La mission au loin et la mission en France ne sont pas à opposer", souligne Angélica Raobelina, responsable adjointe du suivi des volontaires chez Fidesco. "Opposer deux types d’engagements missionnaires serait dommage. La question à se poser est plutôt : où vais-je porter du fruit ? Est-ce que je réponds à l’appel missionnaire en France ? Est-ce que j’ouvre mon cœur pour servir dans un pays qui a vraiment besoin de moi, de mon énergie, de mes compétences ?". Sans compter que restreindre l’engagement missionnaire à la France, ce serait nier les charismes propres à chacun et les aspirations profondes des volontaires.
Partir en mission, c’est aussi une manière de découvrir et de vivre l’universalité de l’Église. Pour Angélica Raobelina, partir loin, c’est "expérimenter l’Église universelle, comme l’a voulu le Christ lui-même". Une expérience à laquelle Bruno et Céline ont été particulièrement sensibles. "Partir en mission à Madagascar nous a permis de toucher du doigt la fraternité universelle. Malgré les différences culturelles, nous étions unis par la même foi. On passe alors d’une connaissance intellectuelle de la fraternité à une connaissance sensible, et cela change tout ! Cela a modifié nos relations sur place, à Madagascar, mais aussi au retour : nous nous sentons plus proches, plus empathiques à l’égard de notre prochain."
Excuse n°8"Je ne veux pas atterrir n’importe où"
Les volontaires Fidesco ne choisissent pas leur mission. Ils la reçoivent dans une attitude de disponibilité et de souplesse. Un élément qui peut légitimement rebuter certains candidats à la mission. Néanmoins, Fidesco n’envoie pas n’importe qui n’importe où. Avant d’affecter un volontaire à une mission, l’association prend le temps de l’écouter, de le connaître, de l’accompagner dans son discernement. Parallèlement, Fidesco connaît les besoins réels du terrain et s’emploie à faire concorder les compétences des volontaires à la mission, pour le bien commun de tous.
Il est certain qu’il s’agit là d’une première expérience d’abandon, antichambre des suivantes, qui s’avèrent être nombreuses en mission... Ainsi Jean-Baptiste décide de s’abandonner pleinement entre les mains du Seigneur : "Montre-moi le chemin pour être heureux", lui demande-t-il alors qu’il entame un chemin de discernement pour partir avec Fidesco. Une démarche qui le conduira en Zambie, de 2014 à 2016, en tant que directeur d’un centre de formation technique pour des jeunes. Fraîchement diplômé d’un Master 2 en gestion de projet, il se retrouve à la tête d’un établissement de 100 élèves de 18 à 30 ans et dix salariés. Une expérience radicale d’abandon : "Je me suis trouvé complètement démuni ! Je n’avais pas d’autre choix que de m’abandonner complètement à la Providence. Et j’ai pu voir que le Seigneur agissait vraiment dans le quotidien", témoigne-t-il.
Durée, distance, mauvais timing… Autant de fausses idées que l’on peut se faire sur la mission et qui peuvent étouffer un désir profond. Des opinions bien souvent forgées à la va-vite, qui ne demandent qu’à être creusées, approfondies, afin de distinguer un frein réel d’un obstacle imaginaire. Une bonne piste pour débuter ce discernement est de confier son désir, même embryonnaire, dans la prière: le Christ nous guide vers le lieu où il nous attend.
*Le prénom a été changé.
Pratique
En partenariat avec Fidesco