Cela fait peur, non ? Qui a envie que Dieu fasse irruption dans ses plans ?
Personne, sans doute. Il est naturel, et donc bon, d’avoir des projets et de vouloir s’y tenir. Si Pierre n’avait pas cherché à être un bon pêcheur, régulier dans son travail, Jésus n’aurait pas su où le trouver. Mais dès lors que Pierre rencontre Jésus, il doit consentir à ce que sa vie s’en laisse bouleverser. Il doit apprendre, non seulement à naviguer correctement, mais à marcher sur l’eau. Cela n’est toutefois pas terrifiant ou terrorisant. Cela déclenche au contraire, chez Pierre, son grand désir de vivre. Voyez sa réaction : à la fois, dans ce contact soudain, inattendu, avec plus grand que soi, il est saisi de crainte ; à la fois, au lieu de fuir, comme n’importe quelle autre peur nous le commanderait, Pierre se jette aux genoux de Jésus. Il le prie de s’éloigner, sans vouloir soi-même s’éloigner. La crainte est l’écho en nous d’un immense désir d’amitié avec Dieu. D’un côté, elle mesure à quel point nous en sommes indignes ; de l’autre, elle nous murmure que si Dieu est là, parmi nous, c’est que notre indignité n’est pas, pour lui, un obstacle à sa venue vers nous. Dans le cœur du fidèle, la crainte ménage une place pour Dieu. En cela, elle n’est pas la peur de Dieu. Elle dit à Dieu : "Tu ne devrais pas venir à moi, qui suis pécheur et pourtant, s’il te plaît, et puisque tu es là, ne t’en va pas." Partout où la crainte advient dans la Bible, il y a ce double mouvement de répulsion et d’attraction, de conscience de notre petitesse et de la possibilité pour Dieu de s’y glisser. À quoi il est toujours répondu : "Ne crains pas."