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Personne ne s'y attendait. Datée du 25 décembre 2005 mais rendue publique le 25 janvier 2006, alors neuf mois après son élection au trône de saint Pierre, la première encyclique de Benoît XVI s'ouvre sur les paroles de saint Jean : "Dieu est amour ; celui qui demeure dans l'amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui".
Fidèle à l'esprit du concile Vatican II, ce document, dense et bref (une quarantaine de pages), traite du sens fondamental de l'amour dans la vie humaine, en le montrant sous toutes ses nuances. "Dans ma première encyclique, je veux parler de l'amour dont Dieu nous remplit et que nous devons communiquer aux autres", souligne le pape allemand.
L’amour, la source même de la foi
Entièrement consacré donc à l’amour, le thème prend de court ceux qui s’attendaient de la part de l’ancien préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, à un discours programme sur l'un des aspects de celle-ci. Pourtant, avec Deus caritas est, le "panzer kardinal" montre un autre visage en révélant celui d'un "l’humble travailleur dans la vigne du Seigneur". Sa bonté et sa sensibilité semblent alors remplacer la rigueur autoritaire que l'on prêtait à l'ancien préfet.
En théologien de haute volée, Benoît XVI prend de la hauteur pour inspirer une réflexion d’une portée universelle, tout en confiant aux personnes qui s’aiment de quoi alimenter leurs propres réflexions sur l’art d’aimer. Ni recettes, ni condamnations donc, mais un appel à vivifier le vécu de l’amour. Au centre de sa pensée se trouve la dimension fondamentale du christianisme : l’amour de Dieu et l’amour pour le prochain constituent les deux faces inséparables d’une seule et même médaille.
L'amour, le vrai sens de la vie
"Dès que fut connu le titre de la première encyclique de Benoît XVI Dieu est Amour, avant même d’en connaître intégralement le contenu, une certaine surprise vint du fait que ces mots, directement empruntés à l’une des affirmations les plus fortes du Nouveau Testament (1 Jn 4,16), traduisaient non pas – ce qui était souvent le cas jusqu’ici – tel ou tel aspect essentiel de la foi chrétienne, mais sa source même", analyse Mgr André Dupleix, secrétaire général de la conférence épiscopale à l'époque.
L’homme est sur la terre pour apprendre à aimer, pour apprendre à servir.
Habitué aux débats religieux et éthiques les plus serrés, le pape allemand aborde en pasteur la dimension essentielle, celle qui est sûrement la plus urgente, du témoignage et de la tâche des chrétiens dans nos sociétés : le service de la charité. Elle n’est pas une matière à option de la vie chrétienne. Elle est son cœur, comme son âme. Ainsi l'encyclique précise les contours et les significations profondes de cette révolution de l’amour dont il parlait lors des Journées mondiales de la jeunesse à Cologne, et dont notre monde a cruellement besoin", explique Mgr Dominique Rey dans la préface d'une des éditions françaises de l’encyclique.
Quelques années plutôt, en 1996, à la question du journaliste allemand Peter Seewald sur le vrai sens de la vie, le cardinal Ratzinger donnait cette réponse lumineuse : "L’homme est sur la terre pour apprendre à aimer, apprendre à servir", dit-il. Ce qui définit l’homme en tant que tel, c’est sa capacité d’aimer et de servir. L’idée qu'il développera de manière saisissante de simplicité, de vérité et de profondeur, dans sa première encyclique rendue publique le jour de fête de la conversion de saint Paul. Elle se termine d’ailleurs par une prière à la Vierge, "miroir de toute sainteté", à qui Benoît XVI demande que, connaissant le Christ, "nous puissions, nous aussi, devenir capables d’un amour vrai et être sources d’eau vive au milieu d’un monde assoiffé."