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Une belle histoire qui s'adresse à tous les hommes, pèlerins ici-bas, et qui invite à renaître, à l'approche de Noël. Un conte touchant, écrit par Paule Amblard et publié dans Le Compagnon de l’Avent 2022 (Magnificat).
Le pèlerin
"Te voilà prêt. Où comptes-tu pérégriner?
‒ J’irai jusqu’à Jérusalem, si Dieu me prête vie.
‒ Le voyage d’outre-mer est le plus périlleux. Ceux qui ont la chance de conserver la vie en traversant les mers ne sont pas sains et saufs en arrivant au port. À Jaffa, les frères mineurs sont tolérés par les mamelouks qui règnent sur le pays et ils ont bien du mal à entretenir la venue des pèlerins. Mais si ta décision est prise, je te bénirai, toi et les insignes de ton pèlerinage.
‒ Bénissez-moi!"
C’est ainsi que je pris la route à l’aube du lendemain. Ce que le prêtre Aubert ignorait, c’est la raison qui me poussait à partir. Avec la peste et la guerre, ma vision de l’existence avait changé. L’habitude et la régularité des jours avaient laissé leur place à un questionnement. Pourquoi étais-je en vie ? Si Aubert avait su qu’en l’écoutant parler d’Abraham l’évidence avait grandi en moi! « Va ! » dit Dieu au patriarche. L’homme n’était sur cette terre qu’un étranger, un nomade errant sur les chemins à la recherche de sa véritable demeure et espérant son retour chez lui. Le Christ était venu pour guider nos pas. Je devais aller là où il avait marché. J’ai rejoint Chalon par les routes et pris une barque jusqu’à Lyon. J’ai gagné la route des montagnes et franchi les Alpes, par le mont Cenis, pour rallier l’Italie. Je suis arrivé dans la grande cité de Venise où les églises sont nombreuses et après quelques jours d’attente, j’ai embarqué sur une galée avec d’autres pèlerins. Notre voyage en mer fut houleux et plus d’une fois, nous avons cru nous échouer sur des écueils aux abords des terres. À l’arrivée dans le port de Jaffa, le navire ne put aborder à cause du mauvais temps. Je me souviens de nos visages défaits et de nos regrets communs. Nous étions le jour de Noël. Sans nous concerter, nous nous sommes mis à chanter pour l’Enfant en train de naître à quelques lieues de là. J’ai alors compris le but de mon voyage : naître à ses côtés. Lorsque j’ai enfin posé le pied en Terre sainte, j’étais devenu un autre.