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Pourquoi l’Église s’oppose-t-elle à l’euthanasie ?

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Jean-Michel Castaing - publié le 01/10/22
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Une délégation de la conférence des évêques de France a rencontré ce 26 septembre le gouvernement pour donner son avis sur la fin de vie. L’opposition de l’Église à l'euthanasie n’est pas d’abord "confessionnelle", et ses arguments se fondent sur des considérations anthropologiques dans lesquelles un État laïc responsable peut se reconnaître. Cependant, ses raisons trouvent également un fondement dans la foi.

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Sur les questions de société, l'Église s'adresse à tous les hommes, indépendamment de leurs convictions religieuses. Son combat en faveur de l'homme est universel. À propos de l'euthanasie, c'est toujours de l'homme qu'il s'agit, non d'une vision particulière de notre destinée qui serait celle de la foi catholique. C'est ainsi que l’Église partage et défend la conviction universelle de l’interdit de tuer : cautionner le fait qu'un homme puisse donner la mort à un autre homme constituerait une dérive gravissime pour l’humanité.

Quand les évêques rencontrent un ministre du gouvernement pour parler de la fin de vie, en aucun cas l’Église ne "confessionnalise" le débat. L'Église est "experte en humanité" et sa sollicitude s'étend à tous les hommes, sans considération d'opinions ou de convictions religieuses. Point n'est besoin d'être croyant pour être contre l'euthanasie. Dans ce débat, l'Église s'adresse en priorité à la raison humaine, et l'homme dont elle parle, c'est l'homme de l'humanité commune.  

La bonté de Dieu ne connaît pas de limites

Cependant, à toutes ses considérations anthropologiques, l'Église ajoute sa conception propre de l'homme pour s'opposer à l'euthanasie. Cette conception est fondée théologiquement en Dieu. C'est-à-dire que l'Église s'appuie également sur sa foi en la bonté de Dieu pour dire "non" à la tentation d'abréger les jours d'un être humain. Situer l'interdit au niveau théologique, ce n'est pas seulement affirmer que toute vie appartient à Dieu en tant que Créateur. Il faut aller plus loin. Si la vie humaine est sacrée (conviction qui est partagée par des hommes aussi bien religieux qu'agnostiques ou athées), cela tient également, selon la foi catholique, à ce qu'elle a été créée par un Dieu bon et de surcroît qu'elle a été assumée par son Fils dans l'Incarnation.

Cependant quand on raisonne sur l'euthanasie, on ne discourt pas seulement sur la vie en général. La tentation de l’euthanasie se présente toujours dans les cas de grande souffrance. C'est ici qu'il faut faire entrer la bonté de Dieu en ligne de compte pour prohiber le geste irréparable. En effet, quand on parle de "bon Dieu", on ne désigne pas de la sorte un être débonnaire, animé de bons sentiments. Si Dieu est bon, Il l'est de toujours à toujours. Surtout, sa bonté coïncide avec son Être. Autrement dit, il n'existe pas un seul "instant" dans le temps dont Dieu ne soit le créateur et où Il n'agisse pas avec bonté. Dieu est la bonté en personne : de Lui ne peut sortir aucun mal.

L'homme ignore ce dont Dieu est capable pour son prochain

Ces précisions étant posées, les chrétiens croient que Dieu agit avec toute la bonté dont Il est capable pour la personne que ses proches sont tentés d'euthanasier. C'est sur la "foi" de ce postulat qu'un chrétien ne peut pas s’autoriser à aider activement son prochain à mourir. Bien sûr, cela ne signifie pas qu'il faille recourir à l'acharnement thérapeutique, que l’Église condamne, et encore moins renoncer à alléger au maximum sa douleur et sa souffrance. 

Dieu est Dieu : Il est capable de créer pour la personne en fin de vie ce que l'homme ne peut pas imaginer. Et Dieu est bon : jusqu'au bout, Il veut le bien pour toutes ses créatures, a fortiori pour les hommes et les femmes, créés à son image et à sa ressemblance, qui sont en fin de vie. Aussi, nous n’avons pas le droit de nous interposer entre Lui et notre prochain en souffrance, sinon pour le consoler et diminuer ses douleurs physiques et ses souffrances morales. L’amour de Dieu se donne précisément aussi aux mourants à travers la bonté des hommes (amis, parents, enfants, soignants…) qui doit pouvoir se manifester sans contrainte et jusqu’au bout : priver un homme de sa mort naturelle, c’est le priver de la possibilité d’être aimé, d’être touché par l’amour de Dieu à travers ceux qu’Il envoie… Le dernier mot de l’histoire appartient à la sagesse de Dieu. Nul n’a le droit de se substituer à Lui pour l’écrire et plaquer le point final. 

De surcroît, la relation entre lui et Son Créateur relève du mystère. Créé à l’image et ressemblance de Dieu, chaque homme est potentiellement infini : nous ne sommes pas autorisés à mettre la main sur lui.

De surcroît, la relation entre lui et Son Créateur relève du mystère. Créé à l’image et ressemblance de Dieu, chaque homme est potentiellement infini : nous ne sommes pas autorisés à mettre la main sur lui. De même que nul ne devait toucher l’Arche d’alliance au-dessus de laquelle était le trône du Dieu invisible, entre deux chérubins (1S 4, 4), de même personne ne peut toucher à la vie d’un être humain dont le Verbe divin a assumé la condition et la nature. Selon la foi catholique, la vie humaine est sacrée. Et les chrétiens sont les premiers à se réjouir que cette conception soit partagée par beaucoup de personnes qui ne partagent pas leur foi. 

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