Le Nicaragua, nouvel enfer des catholiques ? C’est en tout ce à quoi semble s’échiner Daniel Ortega. Les relations entre l’Église catholique et le gouvernement sont certes tendues depuis 2018, lorsque des manifestants qui réclamaient la démission du président ont trouvé refuge dans des églises. Daniel Ortega a alors accusé l’Église catholique d'être complice d’une tentative de coup d’État. Mais ces derniers mois, c’est une véritable accélération des persécutions que l'on observe.
En mars dernier, le nonce apostolique au Nicaragua, Mgr Waldemar Stanislaw Sommertag, a été expulsé du pays, une décision alors jugée "grave" et "incompréhensible" par le Vatican. Mgr Sommertag avait appelé à plusieurs reprises à la libération des prisonniers politiques, comme le pape François l’avait fait en 2019.
Début juillet, ce sont les missionnaires de la Charité, ordre fondé par Mère Teresa en 1950, qui ont été expulsées du pays. Surveillées et harcelées les jours qui ont précédé la décision, approuvée en urgence par les députés sandinistes, les religieuses ont vécu un douloureux exode, les contraignant à laisser derrière elles celles et ceux qu’elles accompagnaient, les plus pauvres des plus pauvres, dans leur maison du Cœur Immaculé de Marie située à Granada, dans le sud-ouest du pays.
Un mois après, une nouvelle vague de répression visant des radios catholiques s’est abattue sur le pays : lundi 1er août, le régime de l’ancien guérillero sandiniste a ordonné la fermeture de huit stations de radio catholiques, dans le diocèse de Matagalpa (nord). En tête, celle gérée par le prêtre Uriel Vallejos.
Mgr Alvarez accusé de "déstabiliser l’État"
Toujours au mois d’août, après deux semaines d’assignation à résidence, Mgr Rolando Alvarez, évêque de Matagalpa, a été arrêté vers 3 heures du matin le 19 août par la police et emmené dans un convoi d’au moins huit voitures. Le gouvernement de Daniel Ortega accuse l’évêque d'"organiser des groupes violents, les incitant à commettre des actes de haine contre le peuple" dans l’intention de "déstabiliser l’État". Aux dernières nouvelles, le prélat se trouve désormais en résidence surveillée à Managua, la capitale du pays, tandis que les huit autres religieux et laïc sont retenus dans une caserne de police, en vue d'une enquête.
Les processions religieuses, une pratique particulièrement populaire au Nicaragua, ont elles aussi été visées par le gouvernement sandiniste. Mi-août, la police a encerclé la cathédrale de Managua afin d’interdire une procession dédiée à la Vierge de Fatima. Plus récemment, la police du Nicaragua a interdit pour des raisons de "sécurité publique" deux processions catholiques populaires qui devaient se tenir fin septembre à Masaya, à 30 kilomètres au sud-est de Managua, a indiqué samedi 17 septembre l’archidiocèse de la capitale. Il s’agit d’une procession pour la Saint-Michel archange, le 29 septembre et l’autre le lendemain, le 30 septembre, pour la Saint-Jérôme. Cette dernière est l’une des processions les plus importantes au Nicaragua.
Une deuxième congrégation expulsée
Dernière répression en date : l’expulsion mi-septembre d’une autre congrégation, les religieuses de la Croix du Sacré-Cœur de Jésus. "Aujourd’hui, victimes du harcèlement et des menaces de la dictature, les religieuses de la Croix, une congrégation mexicaine qui étaient à Matagalpa depuis des années pour apporter un soutien spirituel, ont quitté le pays", rapporte ainsi un média nicaraguayen dans son édition du 18 septembre.
En s’attaquant à l’Église catholique, après avoir fait taire tous ses opposants, Daniel Ortega, réélu en 2021 pour un quatrième mandat consécutif lors d’un scrutin d’où étaient absents tous ses adversaires potentiels de poids, arrêtés ou contraints à l’exil, poursuit sa quête du pouvoir absolu au Nicaragua. Une ambition dévorante condamnée par le Parlement européen dans une résolution adoptée jeudi 15 septembre. Mais qui reste, pour le moment, sans aucun effet.