Skopje, 1920. Le soleil est déjà bien discret lorsque Drana Bojaxhiu ferme son atelier de couture. Elle presse le pas pour rentrer chez elle. Même si le travail est rude, elle ne veut pas manquer le dîner. Lorsqu'elle arrive, ses enfants l'accueillent chaleureusement et l’invitent à table. Tandis que ses deux aînés, Age et Lazare, apportent le repas, la cadette finit de mettre le couvert.
Mais alors que la petite famille s’installe, Drana réalise qu’il y a un couvert en plus. C’est toujours le cas lorsque Anjezë met la table. La famille a depuis toujours l’habitude d’inviter les pauvres à leur table.
Émue par cette réponse, Drana sourit. Depuis la mort de son mari il y a bientôt deux ans et la faillite des entreprises familiales, à grandement affecté le style de vie de la petite famille. Mais il semble que les leçons de Nikollë portent toujours leurs fruits. La foi catholique est le pilier de la famille Bojaxhiu. Depuis leur plus jeune âge, les enfants apprennent à prier, certes, mais surtout à pratiquer les valeurs chrétiennes dans le quotidien. Charité, humilité, bienveillance, bonne humeur… Anjezë n’à que dix ans mais les incarne sans faille. Drana ne se doute pas encore jusqu’où ces valeurs mèneront sa cadette. La famille remplit la cinquième assiette puis joint les mains pour le bénédicité.
La charité, raison d'être
Comme promis la veille, Anjezë donne la part du pauvre à un mendiant sur le chemin de l’école. Elle attend la fin des cours avec impatience pour pouvoir accompagner sa mère à l’église et rendre visite aux démunis. Pauvres, malades, alcooliques ou orphelins, tous ont besoin de quelque chose. Les enfants de son âge lui demandent souvent si elle n’a pas peur de s’approcher de ces gens estropiés qui ne sentent pas bon.
Mais Anjezë n’a pas peur. La charité, c’est d’abord de voir le pauvre et lui faire savoir qu’on l’a vu. Puis c’est de les nourrir, les vêtir et les consoler. Toute la famille est un véritable pilier pour leur paroisse. On participe aux offices, on organise des chaînes de prière. Anjezë met même ses talents musicaux au service de la chorale du village.
La prière et la messe sont importantes. Mais la foi d’Anjezë se révèle dans les services qu’elle rend aux démunis. Et chez les Bojaxhiu, on n’attend pas que Dieu les mette sur nos chemins. Elle s’imagine une fois adulte faire et donner encore plus, comme les missionnaires !
Puis un jour, alors qu’elle à douze ans, elle s’arrête sur cette douce pensée. Et si elle donnait au Seigneur toute sa vie ?
La meilleure réponse à la vocation
Plusieurs années se sont écoulées. Anjezë est une jeune fille toujours aussi emplie de charité et dévouée aux démunis. Pourtant, c’est un gouffre de doute qui persiste à chaque fois que la question de sa vocation lui vient. Est-ce vraiment un appel ou un désir passager ? Et si c’était simplement le rêve d’une enfant plus satisfaite par l’orgueil que par la seule satisfaction de savoir qu’elle fait la volonté de Dieu ? Avec sa santé fragile, pourrait-elle réellement supporter la vie religieuse ? Et si elle n’en avait pas la force ?
Les questions tournent et tournent dans sa tête sans réponse. Arrive alors le jour où un nouveau prêtre vient rejoindre la paroisse, le père jésuite Franjo Jambrekovic. Celui-ci présente à la paroisse l'intérêt des missions et organise de nombreuses conférences avec des missionnaires.
Anjezë, maintenant âgée de dix-sept ans, décide d’aller le questionner au sujet de sa vocation.
En 1928, Anjezë se rend en Irlande pour rejoindre l’ordre missionnaire des sœurs de Notre-Dame de Lorette. Elle prend d’abord le nom de sœur Mary-Teresa avant de devenir Mère Teresa dont les actes de charité marqueront le monde à jamais. Nous fêtons ce 5 septembre 2022 les 25 ans de sa naissance au ciel.