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Un article de journal sur la tradition toujours actuelle des devoirs de vacances m’a inspiré cette dernière tribune de la saison. Selon son auteur, cette pratique n’avantagerait que les bons élèves. Le nul en maths que j’étais confirme qu’elle ne concourra pas, en effet, à améliorer mes performances arithmétiques. En revanche je me souviens, non sans nostalgie, des dictées lues par mon grand-père, de la table de jardin où je remplissais mon cahier, du parfum des fleurs venant distraire mes narines et de ma vue plongeante sur la balançoire qui se balançait sous le grand marronnier… Promesse d’envol, de rire et de légèreté après le labeur accompli !
La légèreté qui fait du bien
La notion de cahier de vacances peut avoir quelque chose de rébarbatif à notre époque où le divertissement, l’oisiveté sont quasiment sacralisés. Moi aussi, j’aime ne rien faire en me prélassant sous le noisetier de mon jardin ; j’aime suivre des yeux les longues traînes blanches tracées par les avions dans le bleu du ciel ; ne rien faire, ne rien penser, qui peut prétendre ne pas aimer ça ? Qui n’a jamais joui secrètement de cet instant précis et si délicieux où on sent ses yeux se refermer sur les pages d’un roman pourtant captivant ? Oui, cet abandon à la douce torpeur de l’été semble irrésistible.
Évangéliser la légèreté c’est pour nous, maintenant au cœur de l’été de profiter des largesses estivales pour prendre le large et laisser se reposer sa vie si facilement agitée à l’intérieur comme à l’extérieur.
Un de mes amis moines cisterciens, un puits de science et de sagesse spirituelle, m’a assuré que la légèreté n’était pas ennemie du bien. Nous autres chrétiens, pense-t-il, la comparons souvent à tort à de la vacuité stérile, à de l’oisiveté inutile ou à de la distraction stupide. La légèreté serait comme une sorte de péché par omission. Car, dans cette optique, elle empêcherait de vivre en présence de Dieu. Mon ami moine est convaincu du contraire. Son expérience personnelle de la vie monastique et de l’ascèse contemplative lui a appris que nos sens restent toujours éveillés. Même quand nous ne travaillons pas, ils travaillent à notre insu. Aussi mon ami plaide-t-il pour une salutaire évangélisation de la légèreté. Non pas l’insouciance irresponsable et désinvolte. Mais la légèreté qui fait du bien à nos corps et à nos esprits. La légèreté aussi à apporter aux personnes, proches ou lointaines, qui en manquent le plus, car elles vivent brisées, écrasées sous le poids de lourds fardeaux.
Le poids de la consolation
« Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi, je vous procurerai le repos (Mt 11, 26). Cette citation évangélique souligne la douceur et la paix sans égales qu’apporte aux éprouvés la consolation de Jésus. « Mon joug est facile à porter, et mon fardeau, léger », précise-t-il (Mt 11, 30). Évangéliser la légèreté, c’est peut-être commencer par se remémorer que la légèreté c’est tout le bien que le Christ veut être dans chacune de nos vies. Il n’est pas une charge, une contrainte, une souffrance de plus. Il est le poids léger de la consolation. « Doux et humble de cœur », Jésus apporte son amitié, celle qui l’a mené à donner sa vie sur la croix. Comme il le faisait souvent à Béthanie, chez Marthe, Marie et Lazare, il vient détendre l’atmosphère de notre maison, il vient nous alléger des poids, qu'il connaît bien, du stress, du remords, de la colère, de la souffrance…
Évangéliser la légèreté c’est peut-être donc cela, pour nous, maintenant au cœur de l’été : profiter des largesses estivales pour prendre le large et laisser se reposer sa vie si facilement agitée à l’intérieur comme à l’extérieur ; renouer avec le temps un peu plus long et immobile que de coutume. Et, dans cette certaine légèreté retrouvée, retrouver le sens de la brise légère de Celui qui caresse, soigne et adoucit sans fin nos vies souvent chahutées et blessées… Voilà un cahier de vacances bien peu rébarbatif, il me semble !