Ce pourrait être une copie du bac ou un jeu de l’été : imaginez le monde sans les Beatles ou sans le christianisme. La question posée par la philosophe Jeanne Larghero peut faire sourire, mais la réponse est-elle même imaginable ?
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Jésus et les Beatles : John Lenon a lui-même lançé le sujet en 1966 en s’autoproclamant plus populaire que Jésus… Mais que serait un monde sans le Christ ? Pire qu’un monde sans les Beatles ? Imaginer un monde sans les Beatles, c’est ce qu’a fait le film Yesterday (Danny Boyle, 2019) du nom de la fameuse chanson du groupe de Liverpool. Un guitariste anglais amateur, compositeur à ses heures, est victime d’un accident de la circulation, un soir où un étrange black-out a plongé la planète entière dans une minute d’obscurité. À son réveil, quelques jours plus tard, tout semble aller à merveille. À un détail près : alors que, étrennant la nouvelle guitare que ses amis viennent de lui offrir, il entonne un Yesterday mélancolique, quelle n’est pas sa stupéfaction : "C’est de toi ça ?" lui demande-t-on !
Un monde réinitialisé
Abasourdi, il découvre que pendant le black-out son monde a été réinitialisé… mais sans les Beatles. Quelle tristesse, quelle perte pour la musique, pour l’humanité ! Que va-t-il faire alors ? Reconstituer de mémoire tout leur répertoire : une vie sans la musique des Beatles est une vie vidée de ses couleurs, de sa chaleur, rendons les Beatles au monde ! Il se remémore les paroles, les mélodies, les accords, il les donne en concert. Il est immédiatement repéré, adulé, les foules accourent, acclament sa musique, le succès est planétaire : un monde sans les Beatles, c’est comme le jour sans le soleil, ça ne pouvait pas exister !
Renouvelons l’expérience avec quelqu’un d’au moins aussi populaire que les Beatles : Jésus. Un monde sans le Christ ? Sans Jésus et tous ces chrétiens qui depuis deux mille ans en sont les témoins ? Si vous voulez voir à quoi ressemble le monde sans les Beatles, regardez le film de Danny Boyle. Si vous voulez voir à quoi ressemble notre monde sans la présence de Jésus de Nazareth dans son histoire, allez faire un tour chez les Grecs.
Les Grecs sans Jésus
Remontez loin dans le temps, enjambez deux mille ans d’histoire et observez ce qu’une culture des plus abouties a produit en termes d’organisation politique et sociale, en matière de mœurs, en matière de sagesse humaine, observez ce que l’intelligence humaine appuyée sur ses forces naturelles a été capable d’engendrer : une profusion de découvertes en sciences, en mathématiques, en science du vivant, une immense créativité littéraire, artistique, philosophique. Regardez la culture grecque antique. Vous saurez à quoi ressemble une humanité de bonne volonté en attente du christianisme, regardez à quoi ressemble une culture païenne, aussi riche soit-elle.
Un monde sans Jésus de Nazareth est à peine imaginable. Un monde sans les Beatles, c’est triste mais concevable.
Vous y trouverez alors un monde où on n’imagine pas que les êtres humains puissent être égaux en droits, un monde où l’esclavage est une pratique qui n’émeut pas grand monde. Vous trouverez un monde où l’on vit la mort comme le couperet final : la résignation est la réponse ultime. Vous trouverez un monde que l’on pense peuplés de dieux capricieux faits à l’image de l’homme. Vous y trouverez un monde où l’on jette du haut des falaises de Sparte les enfants non conformes.
C’est un monde sans le christianisme, sans ce christianisme qui nous a donné Mozart, Bach, Fra Angelico ou la Chapelle Sixtine, Péguy, Claudel ou Bossuet, le sourire de l’ange de la cathédrale de Reims, les vitraux de Soulages à Conques, les paysages défrichés par les premiers moines, Descartes, Pascal ou Malebranche et tout l’édifice intellectuel qui les précéda et qui les suivit, le Mont-Saint-Michel, les droits de l’homme, les hospices de Beaune, les écoles pour les plus pauvres, la fin de l’esclavage : l’inventaire est inépuisable, on ne sait où commencer. Un monde sans Jésus de Nazareth est à peine imaginable. Un monde sans les Beatles, c’est triste mais concevable. Un monde sans Jésus, c’est une terre que plus personne ne voudrait désormais habiter. Avec ou sans les Beatles.