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Nous avons appris cette semaine la nomination de Mgr Laurent Ulrich comme archevêque de Paris. Cette nouvelle, attendue depuis décembre, est une joie pour notre diocèse qui l’accueillera comme pasteur le lundi 23 mai en l’église Saint-Sulpice. Que Mgr Georges Pontier soit remercié aussi d’avoir accepté d’être administrateur de notre diocèse au cours des derniers mois : la fidélité dans le service est le plus beau témoignage de foi que l’on puisse recevoir.
Trois années pénibles
Les commentaires ne manquent pas depuis la nomination de Mgr Ulrich. On cherche les lignes de fracture ou de continuité, les intentions cachées, les signaux envoyés à Paris et à la France à travers cette nomination. On peut bien sûr poser une lecture politique sur une nomination mais il faut toujours se méfier des lectures politiques. Saint Jean XXIII avait aussi été décrit comme un pape de transition en son temps. Il est certain que pour les fidèles et prêtres de notre pays, les trois dernières années furent plus que pénibles : les manifestations des Gilets jaunes de novembre 2018 à juillet 2019, l’incendie de Notre-Dame de Paris le 15 avril 2019, le mouvement social contre la réforme des retraites de décembre 2019 à février 2020 puis la crise de la Covid à partir du 15 mars 2020 avec trois confinements nationaux jusqu’en mai 2021. Le 5 octobre 2021 était rendu public le rapport de la Ciase et le 2 décembre 2021 le pape acceptait la démission de Mgr Aupetit. Nous connaissons tout cela : l’enchaînement fut lourd à porter et je pourrais remonter aux attentats de 2012, 2015, à l’assassinat du père Jacques Hamel et aux attentats de Nice.
Dans les temps de crise, on resserre les gouvernements, on se concentre sur l’essentiel et on se donne une ligne claire.
Comme chrétiens, nous sommes en face et faisons partie d’une société fracturée, marquée par la guerre en Ukraine, par les problèmes sociaux et économiques, par une crise des institutions démocratiques et par une absence totale de vision anthropologique cohérente sur des sujets fondamentaux. Pour l’Église, dans notre pays, nous sommes confrontés à une baisse de la pratique religieuse et du nombre de vocations sacerdotales et religieuses. Le rapport de la Ciase a été un choc pour tous et a abîmé le rapport à l’institution et la confiance dans les clercs. La gouvernance de l’Église a été remise en cause, à Paris et ailleurs, et la démarche synodale montre bien une soif de renouveau et une exigence de cohérence. Dans les temps de crise, on resserre les gouvernements, on se concentre sur l’essentiel et on se donne une ligne claire.
Un archevêque exposé
Sommes-nous traumatisés ? Peut-être pas, mais profondément blessés par la succession de ces événements violents vécus dans notre ville et dans notre pays. C’est un peuple de prêtres et de fidèles blessés que Mgr Ulrich va rencontrer, comme tant d’autres prêtres et fidèles français mais peut-être un peu plus chez nous à Paris. Le paradoxe voudrait qu’il faille aller doucement, avec prudence, patience et douceur, comme il convient avec des personnes blessées mais aussi qu’il faille donner une ligne d’espérance claire et vigoureuse, une direction et une dynamique car honnêtement, on ne sait plus très bien où l’on va. Si l’évêque est un pasteur, il conduit clairement quelque part ; si l’évêque est épiscope, il surveille et corrige ; si l’évêque est apôtre, il annonce, à temps et à contretemps.
L’archevêque de Paris a une dimension nationale du fait de son exposition médiatique à condition qu’il l’accepte et qu’il la vive. Il sera de toute façon exposé en raison de la fin du chantier de la cathédrale Notre-Dame d’ici deux à trois ans. Il sera de toute façon exposé car les Jeux Olympiques à Paris conduiront en juillet 2024 quelques 10 millions de spectateurs et 4 milliards de téléspectateurs, sans compter les 30 millions de touristes annuels. Quelle sera la place de l’Église et quel sera le message de l’Église au cours de ces événements ? Il y a ces dossiers à court terme, deux ou trois ans, qui vont nécessiter une réponse claire à ce que l’on veut ou doit faire. Mais l’Église a rarement une vision à court terme et heureusement : le terme pour nous est le retour du Christ que nous chantons chaque jour à la messe.
Une soif de verticalité
Pour les causes extérieures, comme la Covid, les attentats ou les crises sociales, prêtres et fidèles ont manifesté leur attachement à la foi et à la charité au cours de ces crises. Sans succomber à la violence, à la vengeance ou au désespoir, les chrétiens pratiquants se sont mis au service de leurs semblables par de nombreuses actions de charité et de solidarité. Ils ont opposé une réponse non violente et lucide aux attentats terroristes islamiques de ces dernières années et ont refusé de confondre islam et islamisme. C’est dans les vertus théologales que l’on puise la force de vivre et d’aimer quand les temps deviennent durs. Mais l’horizontalité, une sorte d’humanisme chrétien dont nos contemporains n’ont désormais plus les clés, ne suffit pas à garder le cap de l’Évangile ni à l’annoncer : il faut de la verticalité. J’ai été étonné de cette soif de verticalité des chrétiens et en particulier des jeunes chrétiens depuis ces périodes de crise. Le besoin de prière, de liturgie, d’adoration ainsi que la soif d’enseignement et de formation n'ont jamais été aussi importants.
Ces jeunes nous donnent peut-être la clé pour l’avenir à travers leur soif d’un Dieu célébré et annoncé et les anciens nous donnent la méthode par leur indéfectible fidélité malgré toutes les crises successives traversées.