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Avec plus de deux cents religieux (frères et prêtres) et une présence active dans une demi-douzaine de diocèses, les Oblats de Marie Immaculée (Omi) est l’une des principales congrégations présentes en République démocratique du Congo (RDC). Responsable des vocations, le père Jean Pierre Fetshi est le supérieur du scolasticat, le centre de formation post-noviciat situé à Kinshasa, la capitale. Il revient pour Aleteia sur les nombreuses vocations, la formation des futurs prêtres, leurs origines sociales, le charisme de la communauté, les étapes de discernement et, surtout, les perspectives qu’ouvre la vie religieuse dans ce pays d’Afrique subsaharienne qui compte le plus grand nombre de catholiques. En juillet 2021, les oblats ont ordonné une dizaine de prêtres. Avec quatre futurs diacres, le scolasticat compte 43 candidats pour le sacerdoce venus majoritairement de RDC, du Cameroun, du Lesotho, de l’Angola ou encore du Tchad. Décryptage d’un incroyable foisonnement des vocations.
Aleteia : D’où viennent vos candidats au sacerdoce ?
Père Jean Pierre Fetshi : Ils viennent de partout dans le pays et appartiennent à toutes les catégories sociales. Les récollections que nous faisons chaque deuxième dimanche du mois, animés par notre congrégation, rassemblent de nombreux jeunes et potentiels aspirants. C’est forcément une pépinière de vocations. Le constat de diminution de vocations en Occident n’a rien à voir avec ce que nous voyons ici en Afrique ou ailleurs en Asie.
Notre charisme est "l’évangélisation des pauvres aux multiples visages".
Qu’est-ce qui explique l’attirance pour votre communauté spécialement et qui pousse des jeunes à devenir prêtre aujourd’hui, au XXIe siècle ? Et où sont-ils envoyés une fois ordonnés ?
Il y a sans doute notre charisme qui est d’actualité à travers les besoins de notre société. Il y aussi notre style de vie, simple, qui peut attirer, notre spiritualité mais surtout une présence remarquable dans six diocèses dans tout le pays. Notre présence active et pieuse intrigue de nombreux jeunes. Notre charisme est "l’évangélisation des pauvres aux multiples visages" avec la formation et l’accompagnement. Nos prêtres sont affectés à nos divers ministères. Nous assumons un ministère paroissial, mais intervenons aussi dans les domaines de la santé, de l’éducation à travers des collèges et universités ainsi que l’aumônerie de prisons comme celle de Kinshasa ou Kikwit (525 kilomètres de Kinshasa, ndlr) ainsi que dans les principaux médias. La province du Congo contribue aussi à créer de nouvelles communautés dans des pays voisins comme l’Angola.
Votre communauté est l’une des plus florissantes en RDC, vous avez plus de quarante séminaristes actuellement. Est-ce que le nombre sans cesse croissant de vocations n’altère pas la qualité de la formation et par ricochet, du discernement ?
La rigueur dans la formation est de bon niveau. Il n’y a aucun risque que cette rigueur baisse. Nous avons une équipe de formateurs aguerris mais la qualité de la formation et du discernement est un défi permanent avec l’exigence nécessaire. Les candidats au sacerdoce viennent ici après le Noviciat pour étudier la philosophie et la théologie. Leur aptitude intellectuelle est donc capitale et évaluée sur leur capacité de réception et d’apprentissage.
L’accompagnement des politiques relève de la mission prophétique de l’Église.
On a l’impression, en voyageant comme je l’ai fait dans le pays, que la pauvreté s'accroît, que le chômage devient endémique. Est-ce que cela ne justifie pas en partie le nombre sans cesse croissant de vocations ? La vie religieuse n’est-elle pas une sorte d’échappatoire ?
Je ne dirais pas cela. C’est vrai que la question de la pauvreté ou de la précarité peut amener à de pareils raisonnements. Sauf que même pendant les périodes de prospérité qu’a connu notre pays, il ne s’en est pas suivi une baisse des vocations. Ce qui sous-entend qu’il n’y a pas de liens évidents entre l’augmentation de la pauvreté et une floraison de vocations. Dans la mentalité au Congo, la vie religieuse n’est pas forcément une vie d’aisance. Certains y voient même la misère.
On constate depuis trois décennies une explosion de sectes et petites églises souvent dites "de réveil" à Kinshasa. Cela touche-t-il le nombre de fidèles catholiques et a fortiori les vocations ?
Oui, le développement des sectes a forcément un impact sur le catholicisme mais il ne s’agit pas d’un impact conséquent. Il y a sans doute des catholiques qui vont vers les églises de réveil prétextant y trouver une solution à des problèmes auxquels ils font face dans leur quotidien. Ils estiment parfois que l’Église catholique ne leur en apporte pas les solutions. Je crois qu’il s’agit plus d’illusion due à l’usage des médias et des réseaux sociaux par ces nouvelles églises. Mais une fois l’effet d’illusion passé, certains reviennent.
La visite du Pape est d’une importance particulière aussi bien pour la foi que pour les vocations.
L’Église catholique en RDC est très impliquée dans la politique. Pensez-vous comme certains que cette implication parfois trop active peut l’éloigner de sa vocation première qu’est l’évangélisation ?
L’accompagnement des politiques relève de la mission prophétique de l’Église. On l’a constaté, cet accompagnement a été très fructueux dans notre pays et démontre combien la médiation de l’Église a pu être importante et utile en son temps. Il est important qu’elle accompagne la marche du peuple vers la démocratie et cela vaut la peine. L’Église défend ainsi la voix des sans voix.
Le pape François vient en juillet prochain en RDC, 37 ans après la dernière visite d’un pape. Ce voyage pourrait-il donner un nouvel élan à la foi et à la prolifération de vocations déjà abondantes ?
Oui, la visite du Pape est d’une importance particulière aussi bien pour la foi que pour les vocations. C’est une façon pour le souverain pontife de saluer l’ancrage social du catholicisme en RDC. Cette présence sera un encouragement mais aussi un nouvel élan forcément et une consolation pour les crises successives et les épreuves que notre pays a connues. Cette visite est un appel à partir sur de nouvelles bases. Il est évident que cela pourrait avoir un impact sur les vocations. Tout est possible avec la grâce du Seigneur.