Pour qu'Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l'avenir d'Aleteia deviendra aussi la vôtre.
*don déductible de l'impôt sur le revenu
La proposition de loi d’Albane Gaillot « visant à renforcer le droit à l’avortement » revient en deuxième lecture le 29 novembre à l’Assemblée nationale le 29 novembre. Ce texte se fonde sur un constat lié aux difficultés rencontrées par les femmes désirant avorter et au chiffre avancé de trois à cinq mille Françaises contraintes de se rendre chaque année à l’étranger, car elles auraient dépassé le délai légal. La proposition de loi envisage donc d’allonger le délai pour passer de 12 à 14 semaines de grossesse.
L’opposition des professionnels de santé
En fouillant dans les différents rapports, on se rend compte que ce chiffre n’est pas fondé. Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) les évalue à moins de 2.000 par an, après enquête. Par ailleurs, le nombre d’IVG reste très élevé — 220.000 chaque année, c’est une grossesse sur quatre — avec même un pic en 2019, ce qui démontre que son accès n’est pas entravé. Quant aux délais, les chiffres officiels montrent que la moitié des IVG ont lieu avant la sixième semaine, et seulement 5,3% dans les deux dernières semaines du délai légal.
L’objection de conscience est un droit fondamental, une liberté constitutionnelle, que tout le monde, peu importe son avis sur l’IVG, devrait défendre corps et âme.
La nécessité alléguée de devoir allonger le délai de deux semaines ne tient donc pas la route. Par surcroît, les professionnels de santé s’y opposent. Notamment parce que « le geste d’IVG chirurgicale entre 12 et 14 SG [semaines de grossesse] change de nature », met en garde le Collège national des gynécologues et obstétriciens français. Il précise que « la pénibilité du geste pourrait entraîner une désaffection des professionnels qui les réalisent aujourd’hui ». Il a d’ailleurs questionné 542 médecins qui pratiquent l’IVG et rapporte que 72% d’entre eux sont défavorables à cet allongement. Pourquoi ? À ce stade, le fœtus est plus gros, « il est nécessaire de dilater davantage le col utérin au risque de créer des lésions définitives ». Un geste plus dangereux pour les femmes et plus difficile pour le praticien. Sans oublier que « le poids psychologique de la technique chirurgicale porté par le médecin n’est pas négligeable », rappelle le CCNE.
Suppression de la clause de conscience
Alors même que le geste sera plus lourd à porter, cette loi envisage la suppression de la clause de conscience spécifique des soignants. Une atteinte grave à la liberté de penser, fondement des droits de l’homme. Pour cela, les promoteurs de cette loi n’hésitent pas à marteler que cette clause serait superflue. C’est faux. Si une clause spécifique a été créée dès la loi Veil, c’est bien en raison du caractère particulier de cet acte, dont la portée ne change pas avec les années. En vérité, la clause de conscience générale est insuffisante, moins protectrice et ne concerne pas tous les soignants. En tout état de cause, on ne peut sacrifier une liberté (celle du soignant) contre une autre (celle de la femme). L’objection de conscience est un droit fondamental, une liberté constitutionnelle, que tout le monde, peu importe son avis sur l’IVG, devrait défendre corps et âme.
Un détournement de la réalité
Ce texte, loin d’améliorer les droits des femmes, contribuera à les détériorer. Et malheureusement, ces lois qui dérégulent l’avortement en faisant beaucoup de bruit détournent la société des détresses réelles que peuvent vivre les femmes enceintes confrontées à une grossesse inattendue. Pourtant, celles-ci vivent parfois des situations très difficiles qui méritent de ne plus être tues. Beaucoup subissent des pressions, parfois violentes, pour avorter. Par l’entourage et le partenaire, en particulier. Allonger le délai ferait perdurer ces situations difficiles. Les difficultés économiques non plus ne sont pas assez évoquées, c’est pourtant un douloureux marqueur d’une injustice sociale. Le constat est sans appel : les femmes les plus pauvres y ont plus souvent recours. On ne peut non plus passer sous silence le douloureux constat d’un sondage récent : 92 % des Français pensent que l’avortement laisse des traces psychologiques difficiles à vivre pour les femmes (sondage IFOP, 2020). Enfin, le véritable défi est l’accès à une information et des soutiens fiables pour celles qui désirent éviter l’avortement. Ce même sondage montre que 73% des Français estiment que la société devrait davantage aider les femmes à éviter le recours à l’IVG. Pendant l’examen en première lecture, de courageux députés ont tenté, en vain, d’amender le texte pour que soit enfin prodigué aux femmes une information complète, sur leurs droits et les aides. Rejet systématique par le rapporteur et la majorité. Comment prétendre encore respecter les femmes et défendre leur liberté ?
Le véritable défi serait d’engager une véritable politique de prévention de l’avortement. Il est plus que temps !