Pour Édith Stein, philosophe allemande d’origine juive, devenue religieuse carmélite et morte le 9 août 1942 au camp d’extermination nazi d’Auschwitz, il ne faut pas hésiter à s'abandonner à Marie dans la foi profonde. Étudiante en philosophie, elle est la première femme à présenter une thèse dans cette discipline en Allemagne. Ensuite, elle continue sa carrière en tant que collaboratrice du philosophe allemand Edmund Husserl, le fondateur de la phénoménologie. Une longue évolution intellectuelle et spirituelle la conduit au catholicisme auquel elle se convertit en 1921.
"Le Christ est le point central de ma vie", écrit-elle au philosophe polonais Roman Ingarden peu après sa conversion. Elle entame alors la tâche ardue d'apprendre à prier dans l'esprit de l'Évangile. Elle aime la prière en silence, l’adoration ou encore la contemplation. Petit à petit, la jeune convertie commence à méditer les œuvres de sainte Thérèse d’Avila et de saint Jean de la Croix.
La jeune philosophe est alors saisie par l’attitude de Marie décrite par les deux mystiques. À ses yeux, elle seconde le Seigneur en restant avec Lui dans une intimité unique au monde. C’est ainsi qu’elle l’explique dans une conférence intitulée La femme et sa destinée :
"Au centre de l’histoire de l’humanité, et tout particulièrement au centre de l’histoire de la femme, se trouve la femme en la personne de qui la maternité a trouvé sa transfiguration, et en même temps, en tant que maternité corporelle, son dépassement. Si nous rencontrons, dans la personne du Christ, sous une forme concrète, vivante, le but de toute formation d’homme, nous trouvons en Marie, le but de toute formation de femme. Pour s’incarner, Dieu a choisi de naître au sein d’une mère humaine, qu’il nous a présentée comme l’image accomplie de la mère, tout entière au service de sa mission ; dès le moment où elle sait qu’elle doit enfanter un fils, elle le reçoit de Dieu, et pour Dieu elle veillera sur lui. Sa vie n’est qu’une attente recueillie jusqu’à l’heure de la naissance, puis un service dévoué, une écoute attentive de toutes les paroles et une observation de tous les signes qui peuvent présager son chemin futur."
Plus tard, en entrant au carmel, Édith Stein, qui prendra le nom religieux de sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix, se laissera guider par la Vierge Marie. Elle se laissera entraîner par elle dans le mystère du Christ. Sa vocation de carmélite, elle y répondra avec le sentiment de la vivre au pied de la Croix avec Marie :
"Dans le secret de la silencieuse demeure de Nazareth, la puissance de l’Esprit saint, couvrit de son ombre la jeune Vierge qui priait dans la solitude et opéra l’Incarnation du Rédempteur. Rassemblée autour de la Vierge priant silencieusement, l’ Église naissante attendait ardemment la nouvelle effusion de l’Esprit qui lui avait été promise pour la vivifier, pour lui donner la clarté intérieure, et la féconder extérieurement. […] La Vierge qui gardait en son cœur toutes paroles que Dieu lui adressait, est le modèle de ces âmes qui écoutent attentives. En elles, la prière de Jésus Grand-Prêtre continue toujours de vivre. Et les femmes qui, à son image, se plongent, oublieuses d’elles-mêmes, dans la vie et les souffrances du Christ, sont choisies de préférence par le Seigneur, pour devenir ses instruments, et accomplir de grandes œuvres dans l’Église."
Une petite image de la Vierge Marie
Édith Stein aime les petites images de la Vierge. Même kitsch, elles ne l’irritent pas. Au contraire, elles sont pour elle des signes d’amour pour la mère du Christ. Peu de temps après son oblation, le 15 avril 1934, alors déjà carmélite, sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix, envoie des photos commémoratives à ses amis. Sur l’une figure le blason du Carmel. Sur une autre, l'image de la sainte Vierge Marie du Mont Carmel. Dans une lettre à son neveu Werner, fils de sa sœur aînée Elza, la religieuse lui écrit :
"Je vous envoie quelques petits souvenirs pour marquer ce jour, qui est si important pour moi. Une image de la Vierge..."
En décembre, alors qu'elle vit son premier Avent au sein du carmel, elle écrit une lettre à Jacques Maritain, philosophe français, avec ses vœux de Noël. Et de nouveau, elle joint une reproduction d’un tableau de l'Annonciation en expliquant :
"Peut-être qu'une photo avec la Madone vous donnera un peu de joie".
Le signe que cette grande figure de l’Église savait s’exprimer avec la simplicité et l’humilité des grands cœurs.