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La séquence que va vivre le pape François ce vendredi 29 octobre promet d’être scruté avec intérêt par de nombreux observateurs et spécialistes de la diplomatie. Première à être annoncée, la réception par le pape François du second président catholique de l’histoire des États-Unis, Joe Biden, devrait rouvrir le grand débat de la "cohérence eucharistique" qui fait rage au sein de l’Église catholique aux États-Unis. Celui-ci oppose ceux qui refusent la communion au démocrate parce qu’il est en faveur de l’avortement à ceux qui dénoncent une politisation de l’eucharistie.
Les deux leaders ont semblé vouloir s’extraire de cette polarisation ces dernières semaines. D’un côté, Joe Biden, tout en maintenant ses positions, a récemment affirmé "respecter" la position dogmatique catholique sur le sujet et fait un geste vis-à-vis en nommant un ambassadeur près le Saint-Siège "pro-vie". Interrogé sur la question en septembre dernier, le pape François n’a pas semblé vouloir s’impliquer mais a néanmoins critiqué les "dénonciations et condamnations non pastorales" employées pour résoudre le problème de l’avortement.
L’agenda de la rencontre vaticano-américaine, annoncé par la Maison Blanche, promet d’être plus diplomatique que sociétal. Washington a annoncé compter profiter de cette visite pour évoquer les "efforts communs" en faveur du respect de la dignité humaine. Seront abordées des questions sur lesquelles Joe Biden et François semblent pouvoir converger, telle que la pandémie, la crise climatique ou la lutte contre la pauvreté.
Seul bémol possible : la question chinoise, l’administration Biden semble s’être alignée sur celle de Donald Trump qui avait entamé un bras de fer avec la Chine et voyait d’un mauvais œil l’accord sur la nomination des évêques signé par le Vatican et la Chine en 2019. Une question qui a d’ailleurs été évoquée lors de la visite du Secrétaire d’État Anthony Blinken en juin dernier. L’approche de ce dernier s’était avérée beaucoup moins frontale que celle de son prédécesseur Mike Pompeo.
La question nord-coréenne
Le même jour, la rencontre du président coréen Moon Jae-in et du pape François devrait permettre d’aborder, là encore, les thématiques préférentielles de la diplomatie vaticane. La “Maison Bleue” – la résidence présidentielle à Séoul – a dévoilé les grandes questions prévues pour cette audience privée : la pandémie, la lutte contre la pauvreté et le changement climatique.
Cependant, c’est un autre dossier sur lesquels travaillent les deux pays qui devrait occuper l’attention médiatique, celui des relations avec la Corée du Nord. Lors de son précédent déplacement au Vatican, en 2018, le président Moon Jae-in – qui est très engagé en faveur de la réunification de la péninsule coréenne – avait ouvert une brèche inédite en transmettant au pape François une invitation orale de Kim Jung-un, le chef suprême de la République populaire de Corée, à venir dans son pays.
Le Saint-Siège avait salué l’annonce mais demandé une invitation officielle qui n’est, depuis, jamais arrivée. La faute, entre autres, à une hausse des tensions résultant de la reprise des tests balistiques nord-coréens en mer du Japon en 2019.
Mais depuis lors, la possibilité d’un déplacement historique du Pape au-dessus du 38e parallèle nord a été à de nombreuses reprises évoquée par l’Église catholique en Corée de Sud comme par le gouvernement de Moon Jae-in, en particulier à la faveur du réchauffement inattendu du dialogue entre Donald Trump et Kim Jong-un. Le 25 octobre 2021, la porte-parole du ministère sud-coréen de l’Unification a ainsi déclaré qu’une visite du pape François en Corée du Nord, si elle avait lieu, “contribuerait grandement” à l’établissement de la paix dans la péninsule coréenne.
La “Nord-politik” que semblent poursuivre le Saint-Siège et Séoul apparaît néanmoins encore loin d’aboutir, la faute à de nombreux obstacles qui se dressent sur leur chemin. En premier lieu figure la nature imprévisible et opaque des intentions de la Corée du Nord et de son leader. Ensuite, parce que ce projet doit tenir compte des intérêts de trois acteurs déterminants de la question nord-coréenne : les États-Unis, la Chine et la Russie.
À noter que Moon Jae-in va rencontrer son homologue américain quelques heures après leur visite respective au Vatican. Le Saint-Siège pourrait avoir l’opportunité de jouer son rôle traditionnel de médiateur dans ce dossier où la position de l’administration Biden reste encore peu claire.
La visite historique de Narendra Modi
Originellement annoncée au 29 octobre par l’Hindustan Times, un grand quotidien indien, la rencontre a finalement été confirmée par le Vatican, mais déplacée au 30 octobre. Cette première visite du Premier ministre indien dans le Palais apostolique sera particulièrement importante pour le Saint-Siège en raison de la complexité des rapports entre le gouvernement indien et les communautés chrétiennes du pays.
Le rapport sur la liberté religieuse de l’année 2020 de l’Aide à l’Église en détresse (AED) estime que les chrétiens y sont persécutés. Selon leur étude, le principal moteur de la persécution dans la péninsule est la montée du "nationalisme ethnoreligieux". Prônant la défense de "l’hindouité" – l’Hindutva –, le parti du Premier ministre, le Bharatiya Janata Party, a multiplié les gestes d’hostilités envers certains membres de la population chrétienne indienne ces dernières années.
Le cas du prêtre jésuite Stan Swamy, engagé dans la défense des droits de l’homme en Inde et accusé de terrorisme par le pouvoir, a cristallisé les tensions. La mort en détention du prêtre indien en juillet dernier n’a cependant pas été évoquée par le Saint-Siège, qui, un peu comme en Chine – même si la marge de discussion est beaucoup plus grande – semble ne pas vouloir donner l’impression de s’immiscer dans les affaires nationales.
Le Saint-Siège pourrait profiter de la visite de Modi pour capitaliser sur une des rares ouvertures faites par ce dernier : la perspective d’un voyage en Inde. En janvier 2021, le Premier ministre avait confié à des cardinaux indiens qu’il comptait envoyer une invitation officielle au pontife, ce qu’il avait longtemps refusé, notamment lorsque le pape aurait pu venir en Inde en 2017 lors d’un déplacement dans la région. Mais tout reste à faire et pour l’heure, l’Inde n’a pas été citée par le pape François parmi ses possibles destinations en 2022.
En amont du G20, le président argentin Alberto Fernández aurait aussi souhaité profiter de son déplacement à Rome pour rencontrer son compatriote au Vatican. Cependant, le Saint-Siège aurait refusé afin de ne pas peser sur une échéance électorale proche. Les élections législatives argentines doivent en effet se tenir à partir du 14 novembre 2021.