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Jamais je n’aurais imaginé vivre ce premier rendez-vous avec vous depuis le Camino ! Pas le Chemin de Santiago bien connu et très fréquenté, non le Chemin ignacien (Camino ignaciano), balisé physiquement et spirituellement par les jésuites il y a une dizaine d'années mais encore très peu fréquenté. Un seul co-pèlerin rencontré en quinze jours ! En cette année où la famille ignatienne fête les 500 ans de la blessure d’Ignace au siège de Pampelune et le début de sa conversion, l’aventure était tentante. Nous voilà donc en chemin avec mon époux, depuis deux semaines, partis pour 650 kilomètres, de Loyola à Manresa et Monserrat.
Mais pourquoi cette folie ? Quelle motivation ? Par goût des longues marches et des beaux paysages ? Pour se laisser émerveiller par la Création ? Oui, bien sûr, et la première semaine à travers montagnes et forêts du Pays basque fût un enchantement. Par amour pour saint Ignace et pour approfondir sa spiritualité ? Certainement. Pour vivre à deux une expérience forte et préparer une nouvelle tranche de vie qui s’offre à nous après des responsabilités importantes ? En effet, ce désir de rupture a été une des motivations. Pour éprouver dans son corps la fatigue, la faim et la soif, et désirer l’eau vive comme le cerf altéré du Psaume 41 ? Oui il est bon en effet dans notre monde « gavé » et repu de vivre la frugalité, de ressentir ces besoins vitaux et les limites de notre corps et de nos forces…
La vraie quête d’un pèlerinage chrétien est ailleurs. Il s’agit de découvrir le chemin !
On pourrait donner bien d’autres bonnes raisons... mais la vraie quête d’un pèlerinage chrétien est ailleurs. Il s’agit de découvrir LE CHEMIN ! Et là commence le mystère et l’inattendu. Cet itinéraire-là n’est pas balisé et Jésus qui est le chemin, la vérité et la vie se révèle pas à pas, par petites touches, dans le silence d’une église ou la monotonie de la marche, dans la splendeur de la nature ou l’aridité d’un sentier caillouteux. Cette grâce de la rencontre avec Jésus est à accueillir quand elle vient… si elle vient. Être patient, endurant, ouvert à l’inattendu, c’est l’apprentissage du Camino !
Marcher c’est aussi porter dans son sac les joies et les peines des hommes et femmes de notre temps. Bien sûr nous avons suivi le voyage du pape et sa « Visitation » bouleversante dans le quartier rom de Slovaquie. Quelle audace ! Manifester ainsi sa tendresse et son amour à ceux qui partout en Europe sont les parias, ceux qui dérangent et qu’on montre du doigt ! Seul le pape pouvait oser ce geste à la fois fraternel et révolutionnaire. Il nous ouvre un chemin bien plus difficile à suivre que le Camino : le chemin de la lutte contre les préjugés, celui du changement de regard, celui de la rencontre et de l’amitié sociale avec les pauvres qui se tiennent aux périphéries de l’Église. Un chemin plus dépaysant et plus exigeant que tous les autres ! Et si proche de nous...