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Face au dérèglement climatique, osons sortir du cynisme comptable

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Benoist de Sinety - publié le 22/08/21
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Face aux dérèglements climatiques, le cynisme comptable qui semble gérer nos sociétés occidentales n’en finit plus de répandre de la poudre sur nos yeux endormis. Sommes-nous réellement prêts à agir au bénéfice des autres ?

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« C’est comme si des montagnes avaient poussé pendant la nuit » se souvient ce Charentais interrogé il y a quelques jours. Il avait, avec beaucoup d’autres, été saisi et effrayé par l’horizon qui s’était proposé à son regard. Aux douceurs habituelles du paysage s’était substitué quelque chose qui ressemblait à une chaîne de montagnes aux couleurs menaçantes. Le phénomène météorologique est bien connu. Il porte un nom : arcus, c’est à dire « arc » en français. Ainsi donc il y a deux arcs qui peuvent surgir des cieux : l’un coloré et joyeux qui annonce la fin des pluies et porte la promesse d’un lendemain aux déluges les plus violents. L’autre noir et lourd, porté par la rafale et porteurs de grains… Ces jours-ci — est-ce par hasard ? — beaucoup de ces arcus ont été observés dans le ciel de France. Sans doute n’y a-t-il rien d’exceptionnel à cela. Mais pourquoi se priver d’y voir un signe, même discret, qui nous rappelle à l’ordre ?

Notre planète brûle : les températures invraisemblables observées en Afrique du Nord et en Europe du sud, les effroyables inondations de Belgique et d’Allemagne, les incendies d’Amérique et du pourtour méditerranéen… chacun prend conscience d’un dérèglement désormais réel. Ce serait une catastrophe si nous étions sans ressource pour chercher à sauver notre planète. Cela s’avère une tragédie car nous avons la connaissance, nous savons, en gros, ce qu’il faudrait faire. Mais nous ne bougeons pas. Comme des lapins effarés par ce qui s’approche, nous préférons le dire inéluctable pour nous dédouaner de notre égoïsme peureux.

Certes, beaucoup d’entre nous cherchent à modifier leurs gestes domestiques ou leurs habitudes personnelles. Mais collectivement c’est le grand silence. « Encore un instant M. le bourreau ! » : nous en sommes réduits à repousser les délais de mise en pratique de nos décisions pourtant prises avec gravité, pour « profiter » encore un peu de nos habitudes coupables. Le cynisme comptable qui semble gérer nos sociétés occidentales n’en finit plus de répandre de la poudre sur nos yeux endormis : batteries électriques, éoliennes… nos paysages n’en sortent pas grandis, mais pour quel bénéfice ?

Le rapport du GIEC du 9 août dernier ne met plus en garde contre les effets à venir d’un réchauffement climatique au sujet duquel ceux qui le nient auraient profit à s’en expliquer avec ceux qui en subissent les effets, notamment les très nombreuses personnes qui vont avoir à quitter leurs terres devenues infertiles et inhabitables. Le rapport du GIEC nous annonce que les effets sont désormais enclenchés : pour quelques dizaines d’années nous allons subir une hausse de température globale avec des effets induits qui ne peuvent plus être atténués. Nous avons altéré le climat.

Sommes-nous prêts à agir pour le bénéfice d’autres que nous-mêmes ?

Mais nous pouvons encore éviter l’emballement en agissant aujourd’hui pour que dans cinquante ans, les effets de nos décisions puissent éviter un emballement encore plus désastreux. La question qui nous est posée est celle-là : sommes-nous prêts à agir pour le bénéfice d’autres que nous-mêmes ? La réponse que nous apporterons — et que nous pouvons demander à nos responsables politiques, économiques et même religieux de saisir à bras le corps — dira si nous sommes déjà morts ou encore désireux de porter la vie. 

Réduire la production mondiale de pétrole de plus de 80% d’ici 2050, ne plus construire une seule centrale à charbon dès maintenant… ces préconisations seront jugées excessives par bien des États et bien des particuliers. Les mêmes discours fleuriront sur les réseaux sociaux pour discréditer ceux qui les tiennent, au nom d’un réalisme dont on ne sait sur quelle rationalité il repose. Comme à chaque fois… Et pourtant, qui mettrait en doute le diagnostic médical lui recommandant des séances de chimiothérapie, aussi épuisantes soient elles, pour lui donner une chance d’échapper aux tumeurs qui le dévorent ? 

Les sommets mondiaux se succèdent (le prochain aura lieu à Glasgow en novembre prochain) sans que force ne soit donnée à leurs préconisations. Les signatures des États semblent si peu les engager… Reste la place au rêve comme nous y invite le Pape. Rêver d’un monde où les hommes n’auraient pas peur de se concerter pour trouver ensemble les moyens d’agir, sans repli partisan et esprit de chapelle. Un monde où les baptisés pourraient donner l’exemple que le bien commun dépasse l’accumulation de nos biens particuliers. Pour que l’arcus gris et lourd cède la place à l’arc de la paix et du bonheur annoncé…

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