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J’aime bien m’asseoir dans mon église. Vous me direz que c’est un peu normal qu’un prêtre prie et vous aurez raison, mais j’aime aussi m’asseoir pour regarder les personnes qui entrent et ce qu’elles font. En cette période de vacances et avec le retour des touristes français et étrangers, l’église Saint-Paul est visitée toute la journée. Se mélangent les fidèles qui viennent prier, les personnes qui viennent s’asseoir et les touristes qui viennent visiter. Je m’amuse à regarder ce qu’ils font quand ils entrent et les gestes qu’ils posent ou ne posent pas.
Il y a d’abord l’habitant du quartier qui sait qu’on peut couper à travers l’église en sortant du métro pour rejoindre la rue Saint-Paul ou inversement. Il trace sa route, droit devant, le nez baissé, tout absorbé dans ses pensées… un Parisien quoi ! Le Seigneur le voit passer matin et soir avec un sourire et attend qu’un jour il tourne la tête et Le regarde. Le badaud touristique non chrétien et non éduqué va entrer, le nez en l’air, les mains dans les poches et la casquette sur la tête comme s’il entrait à la Samaritaine ou au Louvre. S’il est en groupe ou en famille il va continuer à parler l’air de rien jusqu’à ce que, parfois, le silence du lieu lui indique que ce n’est pas un endroit comme un autre. Sinon on va gentiment le lui rappeler. Certains se découvrent en entrant, sachant qu’un homme se découvre dans une église comme un homme se couvre dans une synagogue ou se déchausse dans une mosquée. C’est une question d’éducation et certains ne l’ont pas reçue, on ne peut pas leur en vouloir.
Les gestes que nous posons quand nous visitons des églises pendant l’été sont une forme d’évangélisation
Certains sans domicile viennent aussi s’asseoir pour se reposer un peu, recharger leur téléphone portable sur les prises de l’église et parfois s’assoupir. "Dieu comble son bien-aimé quand il dort" (Ps 126,2). Ils sont chez eux plus que tous les autres. D’autres rentrent, s’assoient et restent le nez sur leur téléphone portable : l’église devient un bureau transitoire dans la journée ou bien ils scrollent Instagram ou Facebook entre deux rendez-vous. Le touriste avide de connaissance va entrer en cherchant les feuilles explicatives en douze langues afin de visiter l’église à fond, chapelle par chapelle. Ou alors il cherche le Delacroix ou la Vierge de Germain Pilon et se rue dessus sans voir le reste. À nous de faire en sorte que les cartels les orientent vers la cause première de ces œuvres : l’incarnation du fils de Dieu.
Certains de tradition chrétienne se rappellent quelques gestes : un signe de croix en entrant, après avoir regardé s’il y avait de l’eau dans les bénitiers. (Il nous a été demandé de ne plus mettre d’eau dans les bénitiers mais il serait bon aussi qu’on nous dise quand nous pourrons en remettre !) Parfois une amorce de génuflexion s’ajoute à ce signe de croix. Les gestes sont peu précis, machinaux, mais disent quelque chose. Quelques personnes manifestent aussi leur foi clairement : une vraie génuflexion, un beau signe de croix, une station debout, droit, en silence, pour saluer Celui qui les attend de toute éternité.
Il ne s’agit pas de juger les uns ou les autres : Dieu les aime tous et la grâce de nos églises est d’être ouvertes, gratuites, pour tout le monde sans distinction, sans qu’on ne vous demande rien si ce n’est le respect et le silence dus au lieu. Mais comme chrétiens je pense que les gestes que nous posons quand nous visitons des églises pendant l’été sont une forme d’évangélisation.
Que ce soit au Duomo de Milan ou dans la petite église paroissiale de la station balnéaire où nous passons des vacances, poser de beaux gestes de foi va indiquer aux autres touristes que nous sommes dans un lieu particulier, dans un lieu habité à la fois par Dieu et par une communauté chrétienne de prière et de foi. Je ne pense pas qu’il soit juste de visiter un lieu de prière sans y prier, ne serait-ce que quelques minutes. Y prier pour confier cette communauté et ses pasteurs au Seigneur, y prier pour confier tous ceux qui le visitent afin qu’ils soient touchés par la grâce, y prier pour confier les souffrances de notre monde.
Il me paraît aussi important d’apprendre à nos enfants les gestes de la foi : un beau signe de croix, une génuflexion devant le tabernacle, les signes de l’eau et de la lumière et leur dire pourquoi. C’est en raison du baptême qu’ils ont reçu et qui les a faits enfants de Dieu et citoyens de toutes les églises du monde. La prière, avant d’être un acte de l’intelligence ou de la mémoire, est d’abord un acte du corps, ce corps que Dieu nous a donné et qui est le premier outil de notre charité envers Dieu et notre prochain. Que les gestes de notre corps disent aussi la beauté de notre foi.