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5 juillet 1439, le jour où les Églises d’Orient et d’Occident se sont réconciliées

PAPE EUGÈNE IV

Enée Sylvius Piccolomini fait acte de soumission au pontife Eugène IV.

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Thérèse Puppinck - publié le 04/07/21 - mis à jour le 04/07/22
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Le 5 juillet 1439, les prélats grecs et latins, en présence du pape et de l’empereur byzantin, signent à Florence un décret d’union qui marque la réconciliation des Églises d’Orient et d’Occident. Si ce décret est rapidement tombé en désuétude, il reste d’une importance capitale dans l’histoire de l’Église. Retour sur un événement trop méconnu.

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Cette union entre les deux Églises a été promulguée au cours du concile de Bâle-Ferrare-Florence-Rome, concile dont la complexité, les péripéties et les tentatives de schisme menées par quelques prélats latins, nuisent à la connaissance de ce rapprochement historique. Pendant la tenue de ce concile qui s’était d’abord réuni à Bâle, une conjoncture favorable s’opéra pour une tentative de dialogue avec l’Église orientale (orthodoxe). En effet, l’empereur byzantin Jean VIII Paléologue et le patriarche Joseph II de Constantinople souhaitaient un rapprochement avec Rome. Le pape Eugène IV se saisit de cette opportunité et envoya une ambassade à Constantinople pour discuter des modalités d’un concile, véritablement œcuménique.

Les lettres de ces ambassadeurs soulignent l’enthousiasme des Grecs pour ce projet et décrivent les prières et les processions qui se multipliaient dans la ville en faveur de cette union. Les Grecs acceptèrent de se déplacer en Italie. Ils arrivèrent au mois de mars 1438 à Ferrare et la séance inaugurale du concile eut lieu le 9 avril. Étaient présents le pape Eugène IV, plus de 70 prélats occidentaux, l’empereur byzantin, le patriarche de Constantinople, les archevêques d’Éphèse, de Nicée et de Kiev, des représentants des patriarches d’Alexandrie, d’Antioche et de Jérusalem, ainsi qu’un nombre important de Pères abbés et de théologiens. Comme on le voit, les Grecs s’étaient déplacés en grand nombre, prouvant ainsi l’importance que revêtait pour eux cet évènement.

D’emblée le sujet fut clair : le concile qui s’ouvrait à Ferrare avait pour objet la question de l’union des Grecs et des Latins. En janvier 1439, le concile fut transféré à Florence pour des questions pécuniaires, la ville de Florence ayant proposé de supporter une partie des coûts financiers de la tenue du concile. Pendant les premières semaines, le Pape fit de nombreuses concessions sur des points annexes de protocole, car il désirait ardemment cette réconciliation et ne souhaitait pas la faire capoter pour des questions assez mesquines de simple préséance.

La question de l'Esprit saint

Le principal point d’achoppement entre les deux parties concernait la question dogmatique de la Procession de Saint-Esprit. Les Latins affirment que l’Esprit saint procède du Père et du Fils, ce qui est représenté par la formule filioque dans le Credo, et ce que justement les Grecs rejettent, considérant qu’il est suffisant de dire que l’Esprit saint procède du Père. Les discussions théologiques et patristiques sur ce sujet furent particulièrement épineuses. Les mois se passèrent sans qu’un accord ne semble possible. Plusieurs fois le concile fut au bord de la rupture, mais la ténacité du Pape et de l’empereur permit de toujours maintenir un lien diplomatique entre les Pères.

De guerre lasse, le pape prononça devant l’assemblée conciliaire un discours d’une grande sincérité, soulignant l’importance, pour des hommes de Dieu tous inspirés par l’Esprit saint, de réaliser cette union de foi. Pour la première fois, l’élan du cœur et de la prière prit le pas sur des discussions parfois bien stériles et arides ; les Grecs furent touchés par cet argument, d’autant plus que le patriarche Joseph, mourant, affirma sa volonté de rejoindre l’Église de Rome. Les Grecs acceptèrent alors le dogme défini par l’utilisation de l’expression filioque. À partir de là, les discussions sur les autres différends furent nettement plus rapides et détendues. Entamés le 11 juin 1439, ces débats concernaient principalement la primauté du pape comme chef de l’Église.

Finalement, le Décret d’Union des Églises fut signé le 5 juillet 1439 par le pape, l’empereur, et presque tous les Pères présents au concile (seuls deux prélats grecs le refusèrent). Ce décret se présente comme une déclaration de foi rédigée en latin et en grec. Comme l’indique Yves Chiron, il proclame que "le mur qui séparait Église occidentale et Église orientale est tombé, la paix et la concorde sont de retour." La bulle papale Laetentur coeli ("Que les cieux se réjouissent") présente le résultat des discussions et l’accord historique entre Grecs et Latins. Le Père Joseph Gill expose dans son livre consacré au concile les éléments saillants de ce texte. Il y est défini que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils comme d’une seule cause et que le mot filioque est légitime. D’autre part, le Pontife romain est désigné comme le successeur de Pierre et chef de l’Église, "possédant le pouvoir plénier attaché à cette fonction". C’est d’ailleurs depuis ce décret d’union que la formule "vicaire du Christ" s’impose de manière durable.

Un décret tombé en déshérence

On a souvent accusé les Grecs d’avoir davantage recherché une aide politique qu’un accord doctrinal, en raison des menaces que les Ottomans faisaient peser sur l’empire byzantin. Certes, l’insécurité grandissante dans laquelle se trouvait l’empire leur faisait aussi espérer un soutien matériel de la part de l’Occident. Cependant, une très grande partie du haut clergé grec désirait ardemment le dialogue, et il serait réducteur, injuste et même erroné de dénier aux protagonistes de ce concile un sincère désir de réconciliation. On constate d’ailleurs que, malgré les incompréhensions et les tensions, les Grecs ne peuvent se résoudre à quitter la terre italienne et restent jusqu’à ce que l’accord soit trouvé. Un vrai travail de l’Esprit saint, selon toute apparence.

Pourquoi ce décret d’union tomba-t-il si rapidement en déshérence ? Plusieurs éléments viennent expliquer cet état de fait. De retour dans l’empire en février 1440, les Pères grecs n’ont pas tous eu la force de faire accepter cette union à un clergé local qui avait développé, selon Hubert Jedin, "une forte répulsion à l’égard des Latins". D’autre part, l’invasion de l’empire byzantin en 1453 par les Ottomans détourna les priorités de l’Église grecque vers un sujet plus immédiat et plus urgent : la sauvegarde de la foi chrétienne dans un monde devenu hostile. Enfin, l’absence de réaction de l’Occident face à cette invasion alimenta une durable rancoeur. Cependant, le chemin était tracé pour d’autres bulles d’union et, durant les années 1440, des accords furent signés avec les Arméniens, les Coptes, les Chaldéens, les Syriens et les Maronites.

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