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Ils vivent l’esprit “Fratelli Tutti” dans une cité à Marseille

Geoffroy et Camille vivent depuis deux ans et demi dans le quartier de Campagne Lévêque, au nord de Marseille.

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Domitille Farret d'Astiès - publié le 30/03/21
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Geoffroy et Camille Moreau vivent depuis deux ans et demi dans le quartier de Campagne Lévêque, au nord de Marseille. Là-bas, au contact des autres habitants, ils découvrent de façon très concrète ce que signifie le mot “fraternité”.

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"L'amour brise les chaînes et ces cœur à cœur permettent de lever des freins", lance Geoffroy Moreau, père de famille de 31 ans. Avec sa femme Camille, 29 ans, et leurs trois enfants de 2 à 5 ans, il habite depuis deux ans et demi à Campagne-Lévêque, au nord de Marseille, un quartier prioritaire de 4.000 âmes réparties en 37 blocs. La famille est en mission avec l’association Le Rocher Oasis des Cités, présente dans neuf quartiers urbains en difficulté en France. 

Depuis le bloc 29 où ils résident, Geoffroy et Camille ont vue sur la barre d'en face. Ici, leur vie n’a rien à voir avec celle qu’ils menaient avant à Paris. Au milieu des blocs de béton, loin des terrasses et des plaisirs parisiens, ils vivent à 100% la fraternité promue par le pape François dans son encyclique Fratelli Tutti au côté des nombreux Algériens, Comoriens, gitans qui peuplent les immeubles voisins. Ils rencontrent de nombreux primo-arrivants qui débarquent dans la cité phocéenne à leur arrivée en France. “Nous ouvrons les yeux sur les procédures et les galères traversées par les gens qui n’ont pas de papiers”, note Camille. “Quand on est sans papier, on est déconsidéré”. Le quotidien de Geoffroy et Camille n’est pas de leur fournir un logement ou des papiers d’identité mais de construire un lien de confiance, de restaurer la dignité abîmée, de se connaître et de faire des petits pas ensemble. Tout cela de façon gratuite. “Nous sommes avec des personnes à qui, osons le dire, nous n’apportons rien en apparence”, lance Camille du tac au tac, montrant ainsi que l’essentiel de leur mission est la rencontre, qui se vit au milieu des activités proposées – sorties, repas festifs, visites à domicile – mais ne se mesure pas. “Au contraire il se passe beaucoup !”, intervient Geoffroy qui renchérit en expliquant que la relation est au cœur de ce “rien” et qu’ils ne raisonnent pas en termes de résultat et d’attente en retour. “Nous sommes venus les aimer... et nous n’avons que cela à faire”, renchérit Camille. “Et puisque nous n’avons à penser qu’à cela, nous le faisons très spontanément. Le “vivre avec”, pour moi, c’est la solution à tout. Il reste encore des disparités mais nous partageons le même quotidien et nous faisons tout ensemble”.

Dans ce quartier très majoritairement musulman, le dialogue interreligieux est un véritable enjeu. “Il y a un grand respect de la foi de chacun. Nous parlons de Dieu sans trop entrer dans les débats et en sachant que l’autre est différent. On ne nie pas les différences. Dieu est présent, il rassemble. L’enjeu, c’est d’être en dialogue”, soutient Geoffroy. D’ailleurs, le couple a de nombreux amis musulmans. À commencer par Aïcha, une voisine algérienne du septième étage, grande amie de Camille. Elle a dix ans de plus qu’elle mais qu’importe, la fraternité ne compte pas les années ! “Tout de suite elle m’a appelée “ma sœur””, se réjouit Camille, qui ajoute qu’ici, “on s’envoie du “mon frère, ma sœur” dans l’ascenseur” régulièrement. “On fait nos courses ensemble, on se raconte nos galères et nos joies, on se garde les enfants…”. Et pourtant, elles n’ont pas grand-chose en commun dans leurs histoires de vie. 

De son côté, Geoffroy évoque Alain, un gitan de 56 ans qu’il croise le samedi matin quand il promène son pitbull. “Il a vécu énormément de galères dans sa jeunesse : la drogue, la prison, la rue, les ruptures, les petits boulots… On a appris à se connaître au fil du temps. Cela s’est fait doucement, d’abord dans la rue, puis chez lui. C’est un petit rendez-vous fidèle du samedi matin”. “Dans Fratelli Tutti, on parle du prochain”, ajoute-t-il. Ce prochain, ce peut être  le préfet qui vient en visite, un membre de l’équipe ou un étranger. “L’idée”, conclut le jeune père de famille, “c’est qu’on ne va pas attendre de savoir qui est notre prochain, mais qu’on se fait le prochain de l'autre".

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