L’utilisation de vaccins conçus à partir de fœtus avortés est “acceptable” en cas de “grave danger”, a indiqué en décembre dernier le Vatican.
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Aujourd’hui, quatre vaccins contre le Covid-19 sont disponibles en France ou en passe de l’être : le Comirnaty de Pfizer et BioNTech, l’ARNm de Moderna, l’AZD1222 d’AstraZeneca et bientôt le Janssen de Johnson & Johnson qui a reçu le 11 mars un feu vert européen. Mais à l’heure où chacun appelle à une accélération de la campagne de vaccination, il est légitime de se demander si tous ces vaccins se valent moralement. En cause, notamment, le recours à des lignées de cellules issues de fœtus avortés dans leur processus de développement ou de fabrication.
Fin décembre 2020, face aux premières interrogations, la Congrégation pour la doctrine de la foi avait estimé que le recours à des vaccins conçus à partir de cellules de fœtus avortés était “acceptable” en cas de “grave danger”. Le devoir moral d’éviter cette catégorie de médication ne prévalait pas s’il s’agissait de la seule façon d’éviter la “propagation de la pandémie” justifiait-elle. Mais le Saint-Siège insiste sur le fait que cette autorisation “ne constitue pas en soi une légitimation, même indirecte, de la pratique de l’avortement”, et “suppose nécessairement l’opposition à cette pratique” de ceux qui auraient recours à ce type de vaccins. Mais alors, existe-t-il différents degrés d’acceptation morale ? Tour d’horizon avec les vaccins existants.
1Pfizer BioNTech
Mise sur le marché en Europe : 21 décembre 2020
Technique utilisée : le vaccin appelé “Comirnaty” a été développé par le laboratoire américain Pfizer et le laboratoire allemand BioNTech. Il utilise un principe actif appelé ARN messager (ARNm) encore jamais utilisé pour des vaccins. L’ARNm est une copie temporaire d’un fragment d’ADN de la protéine de pointe S du virus. Les cellules du corps humain vont lire l’ARNm et synthétiser la protéine, ce qui va permettre une réponse immunitaire du corps humain en cas d’attaque du virus. Une fois lu, l’ARNm est éliminé du corps.
Caractéristiques : ses essais cliniques ont mis en évidence un très fort taux d’efficacité (95%). Deux injections sont nécessaires.
Présence de cellules issues de fœtus avortés : avant sa commercialisation Pfizer et BioNTech ont utilisé des lignées de cellules issues d’embryons avortés afin de tester son efficacité in vitro. Mais aucune lignée de cellules issues d’embryons avortés n’est utilisée dans la composition du vaccin.
Problème moral : comme le rappelle la Congrégation pour la doctrine de la foi, “il existe différents degrés de responsabilité dans la coopération avec le mal qu’est l’avortement”. Aucune cellule de fœtus avortés n’ayant été utilisée dans la composition du vaccin, cette coopération avec le mal est très éloignée de l’utilisateur final. Dans ce cas précis, “le vaccin ne contient pas de cellule humaine”, résume Mgr Jacques Suaudeau, médecin, théologien et chercheur. “Il n’y a pas de coopération de l’utilisateur avec le mal qu’est l’avortement”. Il n’est pas donc pas concerné. Les scientifiques qui ont décidé de tester le virus en laboratoire avec des lignées cellulaires issues de fœtus avortés sont eux concernés plus directement car la coopération avec le mal qu’est l’avortement est plus proche.
2Moderna
Mise sur le marché en Europe : 6 janvier 2021
Technique utilisée : mis au point par la firme américaine Moderna, il utilise une technologie similaire à celui du vaccin de Pfizer et BioNTech (ARNm). Lorsqu’on injecte ce vaccin (ARNm), les cellules de la personne injectée utilisent l’information contenue dans le messager pour produire une protéine. Dans le cas du vaccin contre le Covid-19, c’est une version de la protéine de spicule du coronavirus (qui engendre le Covid-19) qui est transportée. Le système immunitaire de la personne injectée reçoit le signal de produire des anticorps et des celles immunitaires.
Caractéristiques : très proches du Pfizer/BioNtech, le vaccin Moderna est efficace à 94,1%. Deux injections sont nécessaires.
Présence de cellules issues de fœtus avortés : des lignées de cellules de fœtus avortés ont été utilisées afin de tester le vaccin en laboratoire. Mais aucune lignée de cellules de fœtus avortés n’entre dans sa composition.
Problème moral : comme le rappelle la Congrégation pour la doctrine de la foi, “il existe différents degrés de responsabilité dans la coopération avec le mal qu’est l’avortement”. Aucune cellule de fœtus avortés n’ayant été utilisée dans la composition du vaccin, cette coopération avec le mal est très éloignée de l’utilisateur final. Dans ce cas précis, “le vaccin ne contient pas de cellule humaine”, résume Mgr Jacques Suaudeau, médecin, théologien et chercheur. “Il n’y a pas de coopération de l’utilisateur avec le mal qu’est l’avortement”. Il n’est pas donc pas concerné. Les scientifiques qui ont décidé de tester le virus en laboratoire avec des lignées cellulaires issues de fœtus avortés sont eux concernés plus directement car la coopération avec le mal qu’est l’avortement est plus proche.
3AstraZeneca
Mise sur le marché en Europe : le 29 janvier 2021
Technique utilisée : le vaccin AZD1222 développé par AstraZeneca emploie un vecteur adénoviral. C’est à dire qu’il utilise un autre virus (un adénovirus de chimpanzé) recombiné pour exprimer la protéine Spike du Sars-CoV-2.
Caractéristiques : il est efficace à 60% selon l’Agence européenne du médicament, tout en étant moins cher et plus facile à stocker que les deux précédents. Deux doses sont nécessaires.
Présence de cellules issues de fœtus avortés : Au cours du processus de production de ce vaccin, les chercheurs se sont appuyés sur des cellules vivantes, les cellules HEK 293, qui sont une lignée cellulaire issue de cellules embryonnaires rénales d’un fœtus avorté en 1973. “On a au départ un fœtus avorté dont on a pris une cellule rénale que l’on a mis en culture”, détaille Mgr Suaudeau. “Ces cellules, qui se sont multipliées, ont été divisées puis repiquées etc”. C’est ce qu’on appelle les fameuses ‘lignées’. Aujourd’hui ces cellules se trouvent de manière assez courante dans le commerce. AstraZeneca a donc bien eu recours à des lignées cellulaires d’un fœtus avorté, mais aucune cellule de fœtus n’est présente dans le vaccin.
Problème moral : lorsque des vaccins éthiquement irréprochables ne sont pas disponibles, la Congrégation pour la doctrine de la foi estime qu’il est moralement acceptable de recevoir des vaccins qui ont utilisé des lignées cellulaires de fœtus avortés dans leurs recherches et processus de production. En d’autres termes, si aucun autre vaccin plus éthique n’est accessible, “le devoir moral d’éviter une telle coopération (matérielle passive) avec le mal qu’est l’avortement n’est pas obligatoire en cas de danger grave, tel que la propagation du Covid-19”. “En l’absence d’autres moyens pour arrêter voire prévenir la pandémie, le bien commun peut recommander la vaccination, notamment pour protéger les plus faibles et les plus exposés”, reprend la Congrégation dans sa note. Pour l’utilisateur il ne s’agit en aucun cas d’une coopération directe à l’avortement. Une coopération directe à l’avortement est un acte nécessaire à la réalisation proprement dite de l’avortement lui-même comme l’anesthésie par exemple. Mais si l’utilisateur a la possibilité de choisir entre différents vaccins dont des vaccins ne faisant pas entrer dans leur composition des lignées de cellules issues de fœtus avortés, ces derniers sont à privilégier.
4Johnson & Johnson
Mise sur le marché en Europe : il a reçu le feu vert de l’Agence européenne du médicament jeudi 11 mars.
Technique utilisée : le vaccin Janssen du laboratoire Johnson & Johnson est un vaccin à vecteur viral. Pour le fabriquer, les scientifiques utilisent un adénovirus – responsable de rhumes hivernaux chez l’homme – dont ils ont modifié l’ADN afin que ce virus, bénin lorsqu’il est injecté chez l’homme, entraîne la fabrication de la protéine Spike, spécifique du Sars-CoV-2. Elle ne provoque pas de maladie mais amène le système immunitaire à apprendre à réagir de manière défensive.
Caractéristiques : il est efficace à 66% en général et à 85% contre les formes graves, selon ses concepteurs. Contrairement aux autres vaccins, le Janssen ne nécessite qu’une injection et non deux.
Présence de cellules issues de fœtus avortés : ce vaccin a été élaboré à partir de lignées de cellules issues de fœtus avortés. Il s’agit d’une lignée de cellules fœtales PER.C6, dérivée du tissu rétinien d’un fœtus de 4 mois avorté aux Pays-Bas en 1985, détaille l’Institut européen de bioéthique.
Problème moral : lorsque des vaccins éthiquement irréprochables ne sont pas disponibles, la Congrégation pour la doctrine de la foi estime qu’il est moralement acceptable de recevoir des vaccins qui ont utilisé des lignées cellulaires de fœtus avortés dans leurs recherches et processus de production. En d’autres termes, si aucun autre vaccin plus éthique n’est accessible, “le devoir moral d’éviter une telle coopération (matérielle passive) avec le mal qu’est l’avortement n’est pas obligatoire en cas de danger grave, tel que la propagation du Covid-19”. “En l’absence d’autres moyens pour arrêter voire prévenir la pandémie, le bien commun peut recommander la vaccination, notamment pour protéger les plus faibles et les plus exposés”, reprend la Congrégation dans sa note. Pour l’utilisateur il ne s’agit en aucun cas d’une coopération directe à l’avortement. Une coopération directe à l’avortement est un acte nécessaire à la réalisation proprement dite de l’avortement lui-même comme l’anesthésie par exemple. Mais si l’utilisateur a la possibilité de choisir entre différents vaccins dont des vaccins ne faisant pas entrer dans leur composition des lignées de cellules issues de fœtus avortés, celui de Johnson & Johnson, parce qu’il fait intervenir des lignées de cellules issues de fœtus avortés dans sa composition, est moins acceptable moralement que les deux précédents. La coopération avec le mal qu’est l’avortement est beaucoup plus directe, y compris pour l’utilisateur. Ce vaccin soulève “des préoccupations morales supplémentaires” alertent d’ailleurs les évêques des États-Unis où le vaccin est commercialisé, parce qu’il “a été développé, testé et produit avec des lignées cellulaires dérivées de l’avortement”. “S’il est possible de choisir entre des vaccins à efficacité et sécurité équivalentes, le vaccin avec le moins de connexions à des lignées cellulaires dérivées d’avortement devrait être choisi”, ont-ils encouragé. “En conséquence, si on a la possibilité de choisir un vaccin, les vaccins de Pfizer ou Moderna devraient être choisis plutôt que celui de Johnson & Johnson”.
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