Quel est le vrai sens du jeûne ? Celui qui permet de tendre l’oreille et l’âme vers Dieu ? S’il faut prendre un seul modèle, saint Antoine le Grand (vers 251‑356) appelé aussi "saint Antoine du désert" s’impose. Ascète et ivre de Dieu, comme de nombreux anachorètes aux premiers siècles du christianisme, saint Antoine se retire dans le désert pour trouver dans le silence et la solitude les conditions idéales d’union à Dieu.
Cet Égyptien, né dans une famille aisée, prend la décision de quitter la ville de Koma, près de Memphis, où il a grandi, pour vivre les Évangiles dans l’imitation du Christ – par le jeûne, l’ascèse et la prière. Comme le Christ, c’est donc au désert qu’Antoine souhaite aller éprouver sa foi. Car le désert est le lieu des tentations. Il décide, malgré le sentiment de folie qui le traverse, la chaleur infernale du soleil et la fatigue extrême, de résister aux visions imposées par Satan : "Je vis tous les filets du diable déployés sur la terre". Ce dernier s’efforce à le distraire de ses prières en le poussant à renoncer en esprit au jeûne auquel il s’astreint et, en rêve, à se vautrer dans la goinfrerie… Mais n’est-ce pas justement le sens même du jeûne que de s’entraîner à combattre les passions qui assaillent l’esprit ?
Une sagesse de vie
Pour saint Antoine, le jeûne ne doit jamais être considéré comme une fin en soi. C’est le Christ qui, vivant lui, est vainqueur des tentations, c’est le Christ qui agit en lui quand il chasse les démons. Le salut vient de Dieu ; les dons d’Antoine témoignent tout simplement de ce salut. Comme il l’explique lui-même en donnant ce conseil précieux :
"Garde ce que je te commande : où que tu ailles, aie toujours Dieu devant les yeux ; quoi que tu fasses, aie le témoignage des Saintes Écritures ; et en quelque lieu que tu te tiennes, n’en bouge pas facilement. Garde ces trois choses et tu seras sauvé".