Si l’origine de l’orgue remonte à la plus haute antiquité, et si cet instrument ne cessera de gagner en importance et en taille, ce dernier ne prendra place dans les églises qu’à partir du Moyen Âge pour les offices. Véritable instrument polyphonique, les sons célestes qu’il délivre avec majesté l’associeront alors définitivement à la musique sacrée.
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Alors que l’orgue était à Byzance l’instrument privilégié pour honorer la toute-puissance de l’empereur, ce n’est que progressivement, à partir du début du Moyen Âge, qu’il s’introduit dans les églises en Occident. Les orgues héritées du Moyen Âge et parvenues jusqu’à nous surprennent encore par la complexité de leur mécanique et la richesse des sons qu’ils autorisent avec leurs multiples tuyaux.
C’est avant tout avec l’essor de l’architecture gothique et des cathédrales toujours plus majestueuses que l’orgue pourra s’imposer comme le seul instrument capable d’être à l’échelle de ce gigantisme. Ainsi, du XIIIe au XVIe siècle, l’orgue acquiert-il une place unique et fixe au cœur de l’église, une place de choix dont l’instrument ne se départira quasiment plus jamais.
Le roi des instruments
S’il est un instrument qui surpasse, en effet, en majesté et en complexité tous les autres, c’est bien l’orgue, masculin au singulier alors qu’au pluriel on parlera de belles orgues… Ces orgues installées en hauteur, dont la structure en menuiserie appelée buffet sera toujours plus raffinée, rivalisent en virtuosité sous les doigts des artisans qui les élaborent et que l’on nomme facteurs d’orgues. De multiples claviers se superposent, un impressionnant bataillon de tuyaux se comptant par milliers, du plus petit avec 1 cm de hauteur jusqu’au plus important de plus de 10 mètres. La soufflerie servant à actionner ce géant et ses multiples jeux permettant de moduler le son produit offrent une infinie variation de mélodies toujours plus complexes, sans oublier le pédalier qui ajoute à la difficulté de cet instrument décidément orchestre à lui seul.
L’orgue luthérien
La Réforme réservera également une place importante à l’orgue qui accompagnera de plus en plus le chant des fidèles, si essentiel dans la liturgie. Le compositeur allemand Samuel Scheidt, au XVIIe siècle, aura un rôle déterminant avec son Tabulaturbuch, un livre de chorals pour orgue qui se substituera souvent aux hymnes chantées par les fidèles. Son style marquera fortement l’école d’orgue allemande, y compris pour le jeune Bach.
Avec cette pratique, l’organiste lui-même prend progressivement une place importante dans le déroulement des offices dont il souligne et ponctue les étapes essentielles. Plus qu’un « accessoire » musical, l’orgue participe ainsi pleinement au déroulement de la liturgie. Jean-Sébastien Bach magnifiera après Scheidt l’instrument dans la lignée luthérienne.
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Mais, le génie allemand réalisera surtout une œuvre monumentale pour orgue nommée Orgel-Büchlein qui opérera une heureuse synthèse entre le style du Nord et les influences italiennes. Ce célèbre Orgel-Büchlein inspirera bien des générations d’organistes avec la pratique d’un choral d’orgue en accord avec les textes des Écritures selon l’année liturgique. C’est, en effet, une véritable théologie musicale qu’a su élaborer Bach, selon laquelle chaque note de la composition vient en un parfait écho répondre et magnifier les paroles des textes sacrés (BWV 600, 603, 607, 622…).
Franz Liszt et la musique d’orgue sacrée
Les compositions pour orgue du grand pianiste Franz Liszt ont longtemps été méconnues, au profit de ses pièces pour piano ayant consacré sa si légendaire virtuosité. Pourtant, c’est un aspect plus secret de ce génie romantique du XIXe siècle qui se révèle dans ses compositions pour orgue. Cette âme éprise de Dieu qui allait se tourner vers les ordres dans les dernières années de sa vie, et que l’on surnommera alors l’abbé Liszt, écrira, en effet, des pages somptueuses pour l’instrument qu’il chérissait. Qu’il s’agisse de l’Ave Maria d’Arcadelt, du recueil de Noëls Weihnachtsbaum, de la sublime Évocation à la Chapelle Sixtine lors de son séjour à Rome, de la prière Ave Maris Stella, et de bien d’autres œuvres encore inspirées, Liszt délaissera à l’orgue quelque peu sa légendaire virtuosité pour permettre à toute la beauté de l’instrument d’exprimer cette rare intériorité tendue vers le divin – même si certaines compositions pour orgue sont d’une redoutable difficulté !
Avec lui, la musique des anges trouve des échos profonds et infinis au sommet des buffets d’orgue, sans que jamais les textes des Écritures n’en soient pour autant relégués au profit de la gloire du compositeur. La porte sera désormais ouverte pour d’autres inoubliables compositions pour orgue aux siècles suivants avec notamment Widor, Franck, Messiaen, Dupré, Vierne, Alain… et bien d’autres encore compositeurs inspirés par le roi des instruments et sa divine musique.
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