Parents de cinq enfants, Cyril et Sarah Chauvancy ont créé L’Espérance, une structure d’accueil qui leur permet d’accueillir des enfants que leur confie l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE).
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Un deux trois… onze ! Trois enfants biologiques, deux enfants adoptés – dont une petite fille trisomique – et six enfants venus d’ailleurs… La famille Chauvancy n’est décidément pas une famille comme les autres. Cyril et Sarah Chauvancy, 36 et 35 ans, ont créé L’Espérance, un lieu de vie à Romans-sur-Isère (Drôme), alternative entre foyer et famille d’accueil. Là-bas, en plus de leurs propres enfants, ils hébergent des jeunes que leur confie l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE). “C’est comme un foyer, mais dans une famille”, explique Sarah Chauvancy. “Nous vivons avec les jeunes que nous accueillons et nous sommes persuadés que cela change tout”.
Leurs propres enfants, Vincent, Timéo, Manoë, Elouan et Anaë, ont de 19 à 6 ans. S’ajoutent en ce moment Aloyis, Bertrand, Marie, Olga, Clarisse et Amélie, de 9 à 17 ans. Tous forment ensemble une joyeuse tribu haute en couleurs. Ici, l’accueil est un vrai projet familial. Éducatrice spécialisée, passionnée par son métier, Sarah a réalisé au cours de sa formation que bien souvent, les enfants placés dans des grandes structures ne trouvaient pas la stabilité affective nécessaire en raison du roulement régulier entre éducateurs, stagiaires et remplaçants. “Comment peut-on grandir et évoluer dans un contexte pareil ?”, s’est-elle interrogée à l’époque, avant de se promettre : “Un jour, je ferai un truc”. Un désir qui ne l’a ensuite plus quittée. Elle a rencontré Cyril, son époux, ambulancier de formation, dans un centre de vacances chrétien. Marqués tous deux par une enfance et une adolescence chaotiques, ils aspiraient à offrir ce dont ils avaient manqué. “Depuis que nous sommes mariés nous avons toujours accueilli des enfants via le Secours catholique ou le Secours populaire”, témoigne la mère de famille.
“Ils ont souhaité que leur vie commune puisse être utile”, commente Jéma Taboyan, pasteur de l’église évangélique de Valence, qui les connaît bien. “Leurs histoires se sont jointes. Donner de l’amour à des enfants avait du sens pour eux ; leur parcours de vie les y a préparé. Ils ont sorti du bien de leurs histoires et le transforment en projet de vie. Ils savent donner ce dont ils ont manqué. Cela nous donne de l’espérance et nous dit comment Dieu peut venir transformer nos blessures en bénédiction pour d’autres. Il vient nous relever et nous restaurer pour qu’à notre tour nous puissions nous donner. À un moment donné, la vie chrétienne ne devient pas que de la théorie, c’est du concret. Cyril et Sarah sont un rayon de soleil pour nous et nous encouragent”.
Nous leur proposons un schéma familial différent de celui qu’ils ont pu connaître.
Les deux époux se sont lancés en 2014, à la naissance de leur troisième enfant. Aujourd’hui, ils sont tous les deux salariés de l’association qu’ils ont créée, secondés par deux éducateurs salariés chacun à mi-temps. Les enfants placés habitent avec eux pendant deux, trois ou quatre ans, selon le temps nécessaire. Le fait d’être présent la nuit, le jour, le week-end, a une incidence très positive, explique la jeune femme. “Nous leur proposons un schéma familial différent de celui qu’ils ont pu connaître. Mon travail n’est pas de devenir la mère de tous ces enfants. Je les aime comme une maman mais je ne le suis pas. Ils ont une famille et mon job, c’est qu’ils arrivent à grandir avec cette famille qui a été défaillante pour ensuite amorcer le meilleur retour possible chez eux”. Dans la maison, tous sont logés à la même enseigne : “Les règles sont les mêmes pour tout le monde. Et pour les vacances, nous partons tous ensemble à la mer et à la montagne”. Une fois par mois, Cyril, Sarah et leurs propres enfants organisent un week-end en effectif réduit mais, ajoute la maman avec amusement, “ces derniers “parlent tout le temps des jeunes que l’on accueille. Ils aiment trop cette vie où nous sommes toujours tous ensemble”.
Leur vie quotidienne apporte aussi ses lots de tracas. “Ce sont des jeunes qui ont vécu des choses compliquées. Dans l’ensemble, cela se passe super bien mais ils restent avec leurs difficultés. Certains ont eu des problèmes avec la justice ou développent des troubles du comportement ; c’est parfois envahissant. Souvent, ce sont des adolescents qui viennent vérifier le lien. Il y a toujours une période de test pour voir si nous sommes là, si nous tenons bien”. Les sorties sportives, à la ferme ou culturelles sont très importantes pour Sarah, afin de proposer un extérieur aux jeunes : “Ils ont été malmenés donc nous mettons un point d’honneur à ce qu’ils aient des activités périscolaires”. À la maison, un potager et des poules leur permettent de développer le sens du concret et de rester en lien avec la nature. Les enfants ont d’ailleurs pour mission de noter les commandes puis de livrer les œufs frais aux maîtresses et aux parents de l’école.
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Concrètement, comment s’organise une journée ? Les onze enfants fréquentant pas moins de dix établissements différents, les petit-déjeuner s’échelonnent. Puis Sarah vole d’un rendez-vous à l’autre, que ce soit avec l’ASE, les parents des jeunes ou les partenaires, court à un bilan avant une audience ou à une réunion de suivi scolaire… À 15h30, l’éducateur arrive et il est temps d’aller chercher les enfants à l’école, puis de goûter, de s’occuper des devoirs, d’accompagner un enfant à un rendez-vous chez le psychologue, le psychomotricien ou l’orthophoniste. Douche, soupe, film ou jeu de société et la journée se termine.
Cette vie particulière se reflète sur la fratrie. “Nous trouvons que nos enfants sont épatants. Souvent nous leur disons : “Vous faites un tiers du travail””, sourit-elle. “Je suis émerveillée de voir l’amour qu’ils ont pour les autres”. Elle souligne les liens très forts qui les unissent aux jeunes. Quand ces derniers quittent la maison, c’est qu’ils rentrent chez eux. “Cela se prépare sur plusieurs années, progressivement. Ce n’est jamais brutal. En général, c’est une grande joie. Nous avons de leurs nouvelles : nous nous écrivons, nous nous envoyons des photos, nous restons en contact”.
Dieu n’est pas pour rien dans cet singulier projet familial. “Les enfants que nous accueillons savent que nous sommes chrétiens et que nous allons à l’église le dimanche”. Certains souhaitent se joindre à eux, d’autres pas. Sarah parle volontiers de “l’amour du prochain” qui lui “donne des ailes”. Une chose est certaine : leur engagement auprès des jeunes est une manifestation concrète de la foi qui les anime.
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