Pas plus qu’il n’a à rougir du christianisme dans l’Histoire, le chrétien ne doit se sentir coupable d’apprécier les charmes de la vie moderne.
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Quel chrétien ne garde à l’esprit cette parole du Christ : « Celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant la face de mon Père qui est aux cieux » (Mt 10,33) ? Jésus ne l’a pas prononcée seulement pour les martyrs de l’Antiquité. L’écho de cet avertissement retentit encore aujourd’hui. Car il n’est pas facile de vivre en chrétien de nos jours. Non seulement notre monde a cessé de croire au Christ, mais de plus, l’air du temps voudrait nous persuader qu’il s’agit là d’une croyance révolue que l’« ancien monde » aurait emportée avec lui dans les oubliettes de l’Histoire.
Il est impératif pour les chrétiens de se débarrasser de deux complexes connexes : le complexe du passé et celui du présent.
Aucune opinion n’est plus dommageable à l’élan missionnaire de l’Église que l’idée selon laquelle la foi ayant été solidaire des structures et des modes de vie du passé, la fin de ceux-ci entraîne de facto la disparition de celle-là. Rien n’est plus faux. Le Christ n’appartient à aucune civilisation, et encore moins à aucune époque historique particulière. Il est impératif pour les chrétiens de se débarrasser de deux complexes connexes : le complexe du passé et celui du présent.
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Le complexe du passé
Le complexe du passé consiste à rougir du christianisme en tant que religion de nos pères. La Modernité s’étant construite contre les traditions des époques antérieures, un jugement superficiel pourrait laisser penser que la foi en Christ a été emporté avec les coutumes, les pensées et les pratiques de jadis. Comme nos lieux de culte ont un âge vénérable, la tentation est grande d’en conclure que les croyances des chrétiens, à l’image de ces édifices, sont des convictions sclérosées ayant peu évolué.
Notre époque, qui se revendique « rebelle » mais qui reste néanmoins empressée d’obéir à l’impératif catégorique de s’adapter et de progresser sans jamais toujours savoir vers où, regarde d’un œil défavorable tout ce qui paraît figé dans le passé. Voilà pourquoi beaucoup de nos contemporains considèrent la foi comme une opinion « dépassée ».
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Inhibés devant le présent
Le second écueil pour la foi est le complexe du présent. Quelle réalité recouvre-t-il ? En fait, il s’agit du préjugé inhibiteur selon lequel la foi en Jésus-Christ nous couperait inexorablement de toutes les joies de l’existence présente. On ne pourrait être chrétien qu’en étant ronchon, mauvais-coucheur et en tonnant sans cesse contre toutes les innovations et nouveautés. Ce complexe est en lien très fort avec le premier. C’est ainsi que de jeunes croyants croient mener une double-vie : d’un côté, ils « pratiquent », vont à la messe, ont des activités caritatives, et d’un autre côté ils vivent comme les jeunes de leur âge. Or il est important de les détromper en les persuadant que ce n’est pas là une anomalie. Le disciple du Christ, sauf appel particulier, n’a pas à sortir de la vie pour s’échapper dans une condition en apesanteur. Chaque vocation est unique. Si certains croyants ressentent un appel à vivre leur foi en se retirant du monde, d’autres assumeront la leur en menant une existence semblable à celle de monsieur tout le monde. La différence se manifestera dans le degré de charité que le disciple mettra dans ses gestes quotidiens.
Un chrétien doit être aussi à l’aise avec les Pères de l’Église, l’art roman, la règle de saint Benoît qu’avec son smartphone, la musique rock ou les films d’avant-garde.
Pas plus le christianisme n’est une religion « du passé » qui nous ferait vivre selon des codes surannés, pas davantage il n’est une foi qui fuirait le présent en snobant orgueilleusement la condition moderne. Le Christ est éternellement jeune. Ni le passé, ni le présent, ni même un futur fantasmé, n’ont le droit de le confisquer et de le monopoliser. Un chrétien doit être aussi à l’aise avec les Pères de l’Église, l’art roman, la règle de saint Benoît qu’avec son smartphone, la musique rock ou les films d’avant-garde.
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Le chrétien ne vit pas dans un autre monde
Dieu est partout. Certes, un discernement s’avère nécessaire pour ne pas Le chercher là où Il ne saurait Se trouver. La vie de foi ne peut faire l’économie non plus de la vertu de force pour maîtriser les pulsions auxquelles les nouvelles technologies laissent la bride sur le cou. Pensons par l’exemple à l’utilisation compulsive de son fameux smartphone. Toutefois, pas plus qu’il ne doit rougir du passé (le Christ, qui n’est pas une « idée », nous est venu de l’Histoire en tant que personnage ayant réellement existé), le chrétien n’a pas à nourrir de scrupules à partager la même existence, les mêmes goûts, que ses contemporains que Dieu lui a donnés comme frères.