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Sainte Marie, Mère de Dieu : une maternité portée par tous les baptisés

vierge à l'enfant
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Jean-Michel Castaing - publié le 31/12/20
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À l’image de la Vierge Marie, les chrétiens peuvent « mettre Dieu au monde » en accomplissant Sa volonté. Ce privilège est attesté par les paroles de Jésus lui-même.

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La Tradition a toujours compris la Vierge Marie comme la figure de l’Église. Autrement dit, tout ce qui est dit de la mère du Christ peut être affirmé également de l’Église. Par exemple, en professant l’assomption de la Vierge à la fin de son existence terrestre, la foi nous apprend qu’un jour toute l’Église sera elle aussi élevée au ciel comme l’assemblée des ressuscités chantant avec les anges la louange du Très-Haut. Dans cet ordre d’idée, cette équivalence entre mystère marial et mystère de l’Église vaut-elle également pour le dogme de la maternité divine de Marie ? Rappelons au passage que Marie est mère de la personne divine du Verbe, non de sa divinité — car la génération humaine a toujours pour terme une personne, non un simple corps organique. Or, la personne à laquelle appartiennent toutes les actions du Christ, vrai Dieu et vrai homme, est la seconde personne de la Trinité, c’est-à-dire une personne divine. Voilà pourquoi Marie est mère de Dieu, non d’un être humain qui « porterait » Dieu.

Revenons à notre question : pouvons-nous enfanter Jésus en nous comme le fit Marie ? On objectera que seule la Vierge a engendré à la vie humaine le Fils éternel du Père en lui donnant une nature similaire à la nôtre. Jésus ne pouvant naître humainement qu’une seule fois (comme tous les hommes), comment pourrions-nous à notre tour donner naissance charnellement au Verbe divin, à la deuxième Personne de la Trinité ? C’est ici qu’il convient de saisir spirituellement la manière convenable de transposer la maternité divine de Marie à l’Église et à ses membres, c’est-à-dire à nous-mêmes.

Mettre Jésus au monde en faisant la volonté de Dieu

Jean Tauleur, un mystique du XVIe siècle, disait qu’à Noël étaient célébrées trois naissances : la naissance dans l’éternité du Fils auquel le Père donne la divinité ; la naissance de Jésus à Bethléem de la Vierge Marie ; enfin la naissance de Dieu en nos âmes. Il s’agit donc de donner naissance à Dieu en nous, de même que Marie le fit charnellement dans la ville de David. Mais de quelle façon ? Pour éclaircir ce mystère, le plus simple est de reprendre les paroles que Jésus adressa à ses disciples à un moment précis de son ministère public, tandis que sa famille charnelle désirait le voir : « Qui est ma mère ? Qui sont mes frères ? […] Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère et ma sœur et ma mère » répondit-il à ceux qui l’avertissaient que les siens le cherchaient (Mc 3, 34-35). Donc, en accomplissant la volonté du Père, nous devenons la mère de Jésus ! Essayons de pénétrer la raison profonde de la réponse déconcertante du Christ.

L’agir du chrétien, s’il est conforme à la charité de Jésus, s’apparente de la sorte à un enfantement du Christ en lui.

D’abord, faire la volonté de Dieu fut la nourriture de Jésus toute sa vie (Jn 4, 34). Il ne vivait que pour elle. Aimant le Père passionnément, son existence n’avait d’autre boussole que l’accomplissement de Ses desseins. Telle était la conséquence de son statut de Fils de Dieu. Chaque geste qu’il posait était comme un engendrement prolongé par le Père. Aussi, le fidèle qui met ses pas dans les siens en accomplissant la volonté divine, devient-il pareillement un autre Christ. Ses actes reflètent et concrétisent ici et maintenant le dessein de Dieu que le Christ a porté à la perfection en sa personne et en ses actes — actes dont son disciple peut s’inspirer avec son talent propre, car le christianisme est une école de créativité, non un conditionnement pour automates mimétiques. L’agir du chrétien, s’il est conforme à la charité de Jésus, s’apparente de la sorte à un enfantement du Christ en lui. Il met au monde le Fils de Dieu en faisant progresser le Royaume, ce Royaume que le Christ est lui-même selon Origène.

Enfanter Jésus pour nos frères

Tout chrétien conséquent qui met en pratique ce qu’il a appris de la bouche de Jésus, enfante donc en lui la volonté du Père — cette volonté incarnée en Jésus. Il consolide de la sorte son être de fils de Dieu. À l’instar de Marie, il donne Jésus au monde en étendant le règne du Christ dans les cœurs. En servant ses frères, il contribue à ce que l’Amour relie les hommes entre eux et qu’ainsi la paternité divine gagne du terrain sur la rivalité mimétique, la compétition, la jalousie et la défiance entre les enfants de Dieu.


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Certes, à Bethléem, Marie a déjà donné naissance à Dieu en enfantant Jésus, vrai Dieu et vrai homme. Cependant, la Vierge n’a pas achevé son rôle d’engendrement le jour de Noël. Elle continue son office de maternité divine en enfantant Jésus dans les disciples de son Fils qui sont ses enfants. Avec l’aide de la Vierge et dans le prolongement de leur baptême, les chrétiens, devenus enfants de Dieu, sont appelés eux aussi à donner chair à Jésus en aimant leurs frères comme Jésus les aima et continue de les aimer au Ciel. De même que Jésus fut conçu de l’Esprit, de même le baptisé, qui est né une seconde fois d’eau et d’Esprit (Jn 3, 5), devient capable à son tour d’incarner en sa personne la beauté et la bonté de l’Évangile.

Ne pas rester spectateurs

Surtout, le chrétien doit être persuadé que sa « maternité divine » est de l’ordre de la foi et de la charité. Or, en cela, la grâce qui lui est donnée est similaire à la maternité de Marie. En effet, la Tradition a toujours reconnu que la Vierge était plus méritante d’avoir porté le Christ dans son cœur que dans son sein. Marie fut digne de donner naissance à Dieu. À ce titre, sa maternité divine, sans rien enlever à sa dimension charnelle, découle plus encore des grâces incomparables qui étaient celles de la jeune femme de Galilée. Sa maternité spirituelle fut plus importante que sa maternité physique. Cette primauté du spirituel est précisément ce qui fonde notre faculté de donner Jésus au monde sous la forme de notre charité et de notre serviabilité fraternelle. Dès lors, en aimant comme Marie, le chrétien engendre lui aussi Jésus de façon très concrète autour de lui et jusque dans sa propre personne. « Nous pouvons toujours être quelques spectateurs de plus à la crèche. Mais ce que Dieu nous demande, c’est d’être les acteurs de sa mise au monde » (Bruno Chenu, Croire sur Parole, Bayard, 2008).



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