Le christianisme primitif est loin d’avoir rejeté l’héritage juif. Ce qui était pratiqué dans la Synagogue allait dès lors influencer le culte des premiers chrétiens notamment sur le plan musical. Aussi n’est-il pas étonnant de trouver de nombreuses similitudes entre les premiers chants de l’Église primitive et ceux de la Synagogue.
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Un héritage partagé. Un grand nombre des premiers chrétiens étaient des juifs convertis à la religion nouvelle. Rappelons que l’un des plus illustres se nommait Paul de Tarse, et même si l’apôtre des Gentils fera preuve d’un zèle qui lui fut propre pour justifier sa foi nouvelle, il n’en reniera pas pour autant l’héritage juif de ses ancêtres : « Dites entre vous des psaumes, des hymnes et des chants inspirés, chantez le Seigneur et célébrez-le de tout votre cœur ».
À ces psaumes de l’Ancien Testament repris et chantés par les premières communautés rattachées à la foi du Christ ressuscité, viendront également prendre place des hymnes et des cantiques spirituels dont nous n’avons malheureusement guère, de nos jours, conservé de traces, si ce n’est des bribes perceptibles dans l’Apocalypse de saint Jean, les cantiques de Zacharie et de Siméon et quelques autres sources fragmentaires. Cependant, lors des nombreuses fêtes chrétiennes, célébrées à l’origine aux mêmes dates que celles des juifs avant que les siècles et le développement de l’Église ne les distinguent, seul le chant est valorisé. Les instruments étaient dépréciés par les premiers chrétiens et n’avaient guère de place dans la liturgie.
Ambroise et Augustin
Saint Augustin se fit l’écho très tôt de ces premiers chants de l’Église primitive lui qui avertit de manière très claire au IVe siècle : « Une hymne est un chant qui comporte une louange à Dieu. Si vous louez Dieu sans chanter, ce n’est pas une hymne ». Il faut rappeler que le saint avait été particulièrement impressionné par les chants qu’il avait pu entendre lors d’une célébration à Milan. Il s’agissait d’hymnes dont l’origine était le fait de saint Ambroise lui-même afin d’encourager une plus grande participation des fidèles aux célébrations.
Ces hymnes ambrosiennes composées de huit strophes de quatre vers offraient un rythme propice à la prière tout en étant distinctes de la musique profane de cette époque. Néanmoins, Augustin avait également exprimé ses craintes de trop de « séductions » dans la musique sacrée, un risque propre selon le saint à détourner le pratiquant de sa prière.
Le pape Grégoire le Grand et la musique liturgique
Au VIe siècle, l’action du pape Grégoire le Grand fut déterminante dans une époque conflictuelle après la chute de l’Empire romain et les déferlements barbares. Rebâtissant sur les cendres du pouvoir romain, son action à la fois politique, économique et sociale incluait surtout de larges dimensions théologiques et missionnaires. L’objectif premier du successeur de Pierre fut, en effet, d’unifier l’Église, une église qui à l’époque connaissait trop de pratiques liturgiques différentes (ambrosienne, celte, gallicane, mozarabe).
Or, pour Grégoire le Grand, le meilleur vecteur unifiant se révéla être la musique sacrée et plus particulièrement le chant lui-même, le nom même de ce pape sera d’ailleurs donné au chant grégorien. Les différentes liturgies vont ainsi, sous son action, être unifiées progressivement sans pour autant disparaître cependant totalement, le rite ambrosien et ses hymnes pouvant encore de nos jours être pleinement appréciés au Duomo de Milan.
Siècle après siècle, ce sera ainsi un ensemble plus ou moins unifié de chants liturgiques qui s’établira à partir des récitatifs des différentes liturgies, chants aux mélodies simples avant de gagner en complexité. Ce répertoire que l’on qualifiera de plain-chant viendra rythmer l’année liturgique sous la forte influence notamment de Grégoire le Grand, mais la musique sacrée restera cependant longtemps strictement orale et ne sera consignée par écrit qu’à partir des Xe et XIe siècles.
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