Les conversations ou les débats qui nous engagent à répondre de notre foi sont souvent teintées d’agressivité. Derrière les questions posées, il y a souvent des blessures personnelles : comment les accueillir sans se dérober, avec douceur et respect ?
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Une journaliste de France Culture m’a contacté récemment afin que je réponde à des questions assez précises en vue d’une série d’émissions sur les religions et, en l’occurrence, sur le catholicisme. Il me revient alors en mémoire cette phrase dans la première épitre de saint Pierre : « Soyez prêts à tout moment à présenter une défense devant quiconque vous demande de rendre raison de l’espérance qui est en vous mais faites-le avec douceur et respect » (1 P, 3, 15-16). Méditant cette phrase de Pierre, je me demandais tout d’abord comment il me faudrait « présenter une défense » : la journaliste est affable, bienveillante et je ne sens pas chez elle une quelconque animosité contre le catholicisme. Bien au contraire, je me dis qu’il est plutôt intéressant que le service public enregistre des émissions sur le fait religieux et donne la parole à des personnes qui s’y connaissent un peu.
Les questions de notre temps
Afin de préparer l’enregistrement, je demande à la journaliste quelles sont les questions qu’elle souhaiterait me poser et je comprends mieux alors l’expression « présenter une défense ». Car la façon dont les questions sont formulées laisse souvent apparaître les sous-entendus qui les précèdent : les interdits, l’exclusion, une obéissance servile, la peur, l’incompréhension… Il ne s’agit pas de malveillance car, comme je l’ai dit, la journaliste est positive mais elle pose les questions de notre temps et ce qui agite le cœur de nos concitoyens lorsque l’on prononce le mot « catholicisme ».
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Lorsque nous voulons annoncer l’Évangile, ou défendre la foi, nous nous attachons souvent à ce que nous voulons dire mais nous devrions d’abord commencer par écouter la question en voyant ce qu’elle soulève comme peurs, blessures ou fragilités et permettre que ces sentiments soient exprimés avant de vouloir trop vite y répondre. La question pourra être agressive ou moqueuse car la personne a été blessée, ou a l’impression de l’être. Sommes-nous capables d’entendre cette blessure « avec douceur et respect » avant de nous justifier par notre réponse ? La question pourra être angoissée car la personne a peur d’être rejetée. Sommes-nous d’abord capables d’annoncer la miséricorde et l’amour de Dieu qui restaurent les personnes dans leur dignité avant de rappeler les exigences de l’Évangile ? La question pourra être pratique ou factuelle car la personne a une question précise. Sommes-nous formés et avons-nous l’humilité, quand nous ignorons la réponse, de savoir prendre le temps de nous informer pour apporter une réponse juste et claire aux personnes qui nous le demandent ?
Souvent, une question très personnelle
Dans les débats animés sur Internet ou dans des conversations à l’emporte-pièce, chacun essaye d’avoir raison sur l’autre et de « gagner ». Les grandes discussions politiques qui peuvent nous enflammer ont trait à la gestion d’un pays, aux lois, à l’économie mais ne touchent habituellement pas à ce qu’il y a de plus intime dans le cœur de l’homme contrairement à la foi. Quand ils ont trait à la foi je n’aime pas ces grands débats à plusieurs car je devine souvent que les participants ont chacun une question très personnelle qu’ils voudraient voir abordée et, par souci de délicatesse, d’explication et de discrétion, je ne peux pas y répondre à la cantonade.
Notre réponse sera reçue à la mesure de l’amour avec laquelle la personne aura été écoutée et de l’amour avec lequel la réponse sera apportée
Il ne s’agit jamais ici de gagner une joute verbale. Ces échanges passionnés sur la religion ne permettent pas un vrai dialogue à savoir une écoute bienveillante de ce que l’autre veut dire et un travail pour essayer de comprendre quelle est réellement la question, en faisant droit à tout ce que la personne a vécu dans sa vie. Notre réponse sera reçue à la mesure de l’amour avec laquelle la personne aura été écoutée et de l’amour avec lequel la réponse sera apportée. L’amour est d’abord un accueil de l’autre tel qu’il est et il ne peut y avoir d’évangélisation sans amour. Comme baptisés nous avons cette mission fraternelle d’écoute et d’annonce de l’Évangile et devons réfléchir à la façon dont nous l’exerçons.
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