Elle était pianiste, elle devint religieuse, « mendiante de l’amour ». L’Église fête cette « petite Thérèse » québécoise le 4 septembre.
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Le 1er juin 2018, le pape François rappelait aux directeurs nationaux des Œuvres pontificales missionnaires, que notre vie elle-même est mission, en lien avec notre baptême et l’appel à la sainteté : « Notre vie est, dans le Christ, une mission ! Nous-mêmes nous sommes mission puisque nous sommes amour de Dieu communiqué, nous sommes sainteté de Dieu créé à son image. La mission consiste donc dans notre sanctification et dans celle du monde entier, depuis la Création (Ep 1, 3-6). La dimension missionnaire de notre baptême se traduit ainsi en témoignage de sainteté qui donne vie et beauté au monde. »
Un chant d’amour
Le Christ a préparé très tôt la jeune québécoise Dina Bélanger à une mission particulière, celle de manifester l’amour infini de la Trinité en elle et pour nous, donnant ainsi « vie et beauté au monde ». Née à Québec le 30 avril 1897 de parents très chrétiens, elle s’éprend de Jésus dès le début de sa vie. « Jésus m’a mise sur la terre pour ne m’occuper que de lui », écrit-elle dans son Autobiographie, qu’elle appelle « Cantique d’actions de grâces ou Chant d’amour ». À l’aube de ses vingt ans, alors qu’elle était pianiste de concert, Jésus lui avait dit intérieurement : « Tes connaissances musicales protégeront ta vocation ; mais tu feras du bien surtout par tes écrits. » L’histoire de sa vie atteindra une dimension universelle par son authenticité et sa profondeur.
Douée pour la musique, elle devient une élégante pianiste de concert, après avoir étudié deux ans au Conservatoire de New-York.
À quatorze ans, la jeune Dina se consacre à Dieu en faisant une promesse privée de virginité. C’est à cette époque qu’elle lit l’Histoire d’une âme de Thérèse de l’Enfant-Jésus, qui deviendra sa patronne avec sainte Cécile. Douée pour la musique, elle devient une élégante pianiste de concert, après avoir étudié deux ans au Conservatoire de New-York. Elle entre au couvent Jésus-Marie de Sillery et y fait profession, en 1923, sous le nom de Marie Sainte-Cécile de Rome. La Congrégation des Religieuses de Jésus-Marie, fondée à Lyon en 1818 par sainte Claudine Thévenet, a pour mission première de faire connaître et aimer Jésus et Marie par l’éducation chrétienne.
C’est en grande partie à l’infirmerie de la communauté que la jeune religieuse vivra sa mission, où Jésus conjugue en elle amour et souffrance pour le salut des âmes.
Dina n’enseignera pas longtemps la musique, car elle contractera la scarlatine en soignant une élève. Cette maladie se transformera en tuberculose. C’est en grande partie à l’infirmerie de la communauté que la jeune religieuse vivra sa mission, où Jésus conjugue en elle amour et souffrance pour le salut des âmes. Elle avait entrevue sa mission dès sa jeunesse : « Notre Seigneur m’apprit que j’avais une mission à remplir. Il me fit prier beaucoup pour cette mission, me démontra la nécessité et l’importance de m’y préparer. Il ne me la découvrit pas. Je compris que le salut d’un grand nombre d’âmes y était attaché » (Autobiographie).
Rassasier l’amour de la Trinité
Dina ressent une grande responsabilité face à la mission que le Seigneur lui destine, car elle reste libre de correspondre ou non à la grâce. Elle renouvelle donc constamment à Jésus la ferme résolution de répondre à ses désirs, lui permettant de se substituer en elle pour y accomplir la volonté du Père et faire sa joie. « Je comprends qu’il s’agit de ma mission. Dieu m’a choisie par amour, il m’a donné une mission pour sa gloire à lui seul. Quelle est-elle selon les plans divins ? – Je l’ignore. Je sais que Jésus en parle avec la Trinité sainte. Il prie ; je n’entends que cette demande : Père, ne permettez pas qu’aucun de ceux que vous m’avez donnés se perde » (Autobiographie).
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Dina Bélanger voulait “donner de la joie”
Cette mission sera de rassasier l’amour de la Trinité par le cœur eucharistique de Jésus, en conformité avec sa devise : « Aimer et laisser faire Jésus et Marie ». Tout un renversement de perspective. Augustin, Thomas d’Aquin et bien d’autres théologiens ont surtout montré que Dieu se donne pour nous rassasier, que la Trinité existe pour notre propre rassasiement, et c’est vrai. Mais Dina montre que c’est Jésus, substitué à elle, qui s’offre au Père pour le rassasier.
Cette mission de rassasier l’amour infini de Dieu, elle ne le vivra pas seulement sur la terre, mais aussi au ciel, à l’exemple de sa patronne, Thérèse de Lisieux…
Cette mission de rassasier l’amour infini de Dieu, elle ne le vivra pas seulement sur la terre, mais aussi au ciel, à l’exemple de sa patronne, Thérèse de Lisieux, qui passe son ciel à faire du bien sur la terre. « Au ciel, je veux rassasier l’Amour infini du bon Dieu. Pour réaliser mon idéal, il me faut réaliser les trésors infinis de Notre Seigneur ; ce bon Maître a dit : Demandez et vous recevrez, eh bien ! au ciel, je serai une petite mendiante d’amour : la voilà, ma mission ! et je la commence immédiatement. Jésus, dans son immense charité, a besoin de se donner aux âmes ; s’il le pouvait, il épuiserait des trésors de grâces pour chacune d’elles. Oui, je veux épuiser Jésus infini pour rassasier l’Amour infini ! » (Autobiographie.)
La petite mendiante d’amour
Le caractère universel et ecclésial de sa mission de mendiante d’amour s’insère dans la nature même de l’Église qui est missionnaire. Comme elle, Dina n’est pas là pour elle-même, mais pour que Dieu soit aimé, connu, offert, partagé, rassasié, par les cœurs de Jésus et de Marie. Elle laisse Jésus la conduire jusqu’au sanctuaire de la Trinité, n’ayant pas d’autres mérites que ceux de Jésus. Sa mission est d’offrir Jésus au Père, d’engendrer des âmes au salut. C’est une mission d’enfantement de l’Église. « L’offrande de Jésus à son divin Père me devient un devoir plus pressant. Par cette offrande, je me sens comme toute-puissante auprès du Père éternel, c’est-à-dire que cette puissance est celle de Notre Seigneur à qui son divin Père ne peut rien refuser » (Autobiographie).
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Le 22 janvier 1927, Dina boit au calice de l’agonie de Jésus en recevant les stigmates invisibles de ses plaies : « C’est pour sa gloire et pour les âmes que Notre Seigneur me donne tant de grâces. Depuis hier soir, c’est comme si j’avais la responsabilité du monde entier. » À partir de juillet 1929, la jeune mystique n’a plus la force de tenir le crayon pour noter ce qui se passe dans son âme. Les derniers mots de son autobiographie sont attribués à Jésus. Ils concernent directement sa mission d’être une petite mendiante d’amour pour les âmes : « Je t’ai donné mon Cœur, c’est pour jamais. Tu devras donc distribuer mes richesses par ma très sainte Mère. » Sa mission dans l’éternité sera de rayonner, par Marie, le cœur de Jésus sur toutes les âmes.
Je donnerai de la joie
Celle que Jésus appelait « ma petite Moi-même » meurt le 4 septembre 1929 à l’âge de trente-deux ans. Elle avait dit à ses sœurs : « Au ciel, je donnerai de la joie. » Son autobiographie, confiée à dom Léonce Crenier, prieur de l’abbaye de Saint-Benoît-du-Lac, paraît en deux tomes en 1934 sous le titre Une vie dans le Christ. Les éditions et les traductions de l’ouvrage se multiplieront dans des dizaines de pays, rejoignant des centaines de milliers de lecteurs à travers le monde.
Après la mort de la « petite mendiante d’amour », les chrétiens ont spontanément manifesté une grande confiance envers Dina. Plusieurs faveurs ont été obtenues par son intercession.
En Dina se vérifie la parole brûlante de saint Paul : « Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi » (Ga 2, 20). Elle écrit : « J’écoute dans la solitude la parole de mon Dieu, et je vis d’amour en attendant de m’envoler d’amour. Ou plutôt, je laisse vivre Jésus en attendant qu’il me ressuscite dans l’amour » (Autobiographie). Après la mort de la « petite mendiante d’amour », les chrétiens ont spontanément manifesté une grande confiance envers Dina. Plusieurs faveurs ont été obtenues par son intercession. En 1939, dans le petit village de Lamèque au Nouveau-Brunswick, un jeune bébé était condamné suite à une hydrocéphalie. Selon les médecins, il ne pouvait guérir ni vivre longtemps. Après une neuvaine à la jeune religieuse par la famille, l’enfant de neuf mois se rétablit, sans séquelles. La Congrégation pour la cause des saints reconnaîtra plus tard cette guérison comme miraculeuse, pour la béatification de Dina.
Le 20 mars 1993, Jean-Paul II béatifie, à Rome, Dina Bélanger. Dans son homélie, il revient sur sa mission d’amour au cœur de la Trinité : « Dina Bélanger veut “consumer le monde entier dans l’amour” ; elle devient apôtre et missionnaire selon le cœur de Dieu ».
Pour aller plus loin lire le blog de Jacques Gauthier
Je donnerai de la joie. Entretiens avec Dina Bélanger,
Novalis/Emmanuel, 2019, 206 pages, 17€
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Cécile, Grégoire, Dina, Antonio… Ils ont fait de la musique un chemin de sainteté