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Couple : est-il bon de vouloir changer l’autre ?

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Paul Habsburg - published on 29/06/20 - updated on 03/08/23
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Dans la vie de couple, on est souvent tenté par le désir de dominer l’autre. Pour le convaincre, on n’en arrive parfois à manipuler la vérité et favoriser nos préférences. Ce n’est jamais bon… mais c’est normal, comme toutes les mauvaises conséquences de la chute originelle. Pour s’en sortir, il faut prendre le risque de déposer les armes... et faire un pacte avec Dieu.

Dans la vie de couple, on est souvent tenté par le désir de dominer l’autre. Pour le convaincre, on n’en arrive parfois à manipuler la vérité et favoriser nos préférences. Ce n’est jamais bon… mais c’est normal, comme toutes les mauvaises conséquences de la chute originelle. Pour s’en sortir, il faut prendre le risque de déposer les armes… et faire un pacte avec Dieu.

Stéphane, un homme en voie de séparation avec sa femme, me disait un jour la chose suivante: « Au début de notre vie de couple, nous avons bien marqué notre territoire, nous avons indiqué ce que nous considérons que l’autre devrait changer, et nous n’avons plus jamais bougé de nos positions ». Ce n’est pas surprenant qu’en quinze ans de mariage, le couple n’ait pas progressé, que la relation n’ait jamais mûri. Parfois, je rencontre des couples fiancés qui n’accueillent pas complètement l’autre avec son histoire, avec ses imperfections et ses particularités. Ils risquent alors de se marier – un peu comme Stéphane – avec leur idée de l’autre. Et chaque fois que l’autre ne correspond pas à cette attente, c’est la déception.

Comme c’est beau, courageux et libérateur quand un couple apprend à déposer les armes ! Mais faut-il abandonner tout idéal de changement ?

En revanche, comme c’est beau, courageux et libérateur quand un couple apprend à déposer les armes ! Quand vient le temps où cessent les exigences et l’amour sous condition (celui qui n’est pas un vrai amour). Quand vient le temps où les époux osent l’aventure de la communion, lorsque chacun accueille vraiment l’autre… C’est beau ce désir de vouloir devenir un avec quelqu’un que je ne vais jamais pouvoir contrôler : quelqu’un qui me dépasse dans son altérité et son unicité. J’ai employé cette expression de déposer les armes… mais faut-il abandonner tout idéal de changement ? Oui, s’il s’agit de vouloir changer l’autre. Non, s’il s’agit de l’aider à atteindre sa plénitude.

Au cours de leur préparation au mariage, Louis et Christine avaient pris conscience des obstacles chez l’autre qu’ils voulaient absolument changer. Louis avait beaucoup d’amitiés féminines, et il trouvait ça normal. Ces relations lui étaient agréables, sans qu’il y voit la moindre contradiction avec son engagement de fidélité totale envers Christine. La vision de celle-ci n’était bien évidemment pas la même… Elle percevait le danger, elle sentait dans son cœur de femme à quel point cela les empêchait de devenir vraiment un.



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De son côté, Louis sentait que Christine avait besoin de booster son estime de soi. Il essayait de la convaincre à chercher du travail. Mais Christine voulait être mère au foyer, elle ne ressentait pas du tout le même besoin. Chacun des deux voulait changer une dimension dans l’autre, un peu pour l’autre, mais un peu pour soi-même aussi. Ils employaient différents moyens pour cela : l’intelligence, la force, parfois même la violence… Le résultat ? Des tensions et des situations de domination mutuelle. Leur couple en a pas mal souffert…

Parfois, nous n’hésitons pas à manipuler la vérité pour favoriser nos préférences et nos désirs. Bonne nouvelle, cette tendance à la domination n’est pas d’abord notre faute à nous seuls : elle est une blessure que nous portons tous au fond de notre cœur.

C’est toujours avec soulagement que je retrouve ces paroles dans la Bible qui expliquent nos comportements destructifs et nos mauvaises inclinations. Dans le chapitre 3 de la Genèse, nous lisons qu’une des conséquences de la chute originelle, c’est la domination mutuelle. Dieu dit à la femme : « Ton désir te portera vers ton mari, et celui-ci dominera sur toi » (Gen 3,16). La bonne nouvelle, c’est donc que cette tendance à la domination n’est pas d’abord notre faute à nous seuls : elle est une blessure que nous portons tous au fond de notre cœur. Tous, nous sommes convaincus d’avoir raison, c’est pourquoi nous affirmons nos opinions propres. Parfois, nous n’hésitons pas à manipuler la vérité pour favoriser nos préférences et nos désirs. Ce n’est jamais bon, mais c’est normal, comme toutes les mauvaises conséquences de la chute originelle. Il faut donc accepter le fait que l’autre, lui aussi, est porteur comme nous de cette même prédisposition, sans le juger.



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À cet égard, le pape Jean Paul II a trouvé la lumière dans un passage de saint Paul, souvent mal interprété parce qu’il est lu trop souvent hors contexte ou avec la méconnaissance du texte entier :

« Par respect pour le Christ, soyez soumis les uns aux autres ; les femmes, à leur mari, comme au Seigneur Jésus (…) Vous, les hommes, aimez votre femme à l’exemple du Christ : il a aimé l’Église, il s’est livré lui-même pour elle » (Ephésiens 5,21-25).

Donc, rien à voir avec une domination unilatérale ou avec un devoir de la femme de se soumettre aux caprices de l’homme. Mais tout au contraire, « le mari et la femme sont soumis l’un à l’autre, subordonnés l’un à l’autre (…). La communauté ou unité qu’ils constituent en raison de leur mariage se réalise dans un don réciproque qui est aussi une soumission réciproque » (Jean Paul II, Catéchèse du 11 août 2981, n°3 et 4).

Le sacrement du mariage est un chemin à trois, c’est un pacte avec le Créateur. Cela signifie que je peux me soumettre à l’autre parce qu’en vérité je me soumets à Dieu.

Posons-nous un instant cette question : cette soumission à l’autre, même « par respect pour le Christ » (Eph 5,21), n’est-ce pas un risque ? Si je me soumets simplement à un autre, sans protection pour ainsi dire, alors oui, dans ce cas, on peut parler d’un risque réel. Mais le sacrement du mariage est un chemin à trois, c’est un pacte avec le Créateur. Cela signifie que je peux me soumettre à l’autre parce qu’en vérité je me soumets à Dieu. Il s’est engagé avec l’autre et Il est fidèle. Si les deux époux s’engagent à se laisser guider par ce Dieu qui leur parle à travers le conjoint, alors oui, ça marche. Bien-sûr, cela exige un niveau de confiance énorme : j’accueille l’autre en moi, avec ses décisions, ses visions comme ses émotions. Ce qui est en jeu ici, c’est la communion dans le couple, avec cette finalité que les deux deviennent vraiment un. Pas à travers des compromis, mais par le sacrifice de la confiance.  Comme le dit le Pape François, l’un des maîtres du sujet :

« Cette même confiance permet une relation de liberté. Il n’est pas nécessaire de contrôler l’autre, de suivre minutieusement ses pas pour éviter qu’il nous échappe. L’amour fait confiance, il préserve la liberté, il renonce à tout contrôler, à posséder, à dominer. (…) En même temps, cela favorise la sincérité et la transparence, car lorsque quelqu’un sait que les autres ont confiance en lui et valorisent la bonté fondamentale de son être, il se montre alors tel qu’il est, sans rien cacher. Celui qui sait qu’on se méfie toujours de lui, qu’on le juge sans compassion, qu’on ne l’aime pas de manière inconditionnelle, préférera garder ses secrets, cacher ses chutes et ses faiblesses, feindre ce qu’il n’est pas » (Amoris Laetitia 115).

Quel courage faut-il pour vraiment s’abandonner ? Pour se donner, se soumettre à l’autre qui pense, juge et réfléchit différemment ? Quel courage faut-il pour croire que dans la mesure que j’accueille l’autre, Dieu me guidera a travers l’autre ?

Se soumettre l’un à l’autre et chacun à Dieu dans l’autre

Louis et Christine ont changé de stratégie. Au lieu de vouloir changer l’autre avec un pied de biche, ils ont choisi d’essayer d’agir vraiment par amour de l’autre, en commençant par la purification des intentions de chacun. Ils ont d’abord prié ensemble, ce qui a renforcé la confiance de l’un envers l’autre. Leur regard sur l’autre a changé. Sans s’en rendre compte, ils ont commencé à se soumettre l’un à l’autre, et chacun à Dieu dans l’autre.


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Par amour pour sa femme, et vraiment uniquement par amour, Louis a choisi de changer sa vision sur ses amitiés féminines. Il a établi des limites que sa femme l’a aidé à poser. Aujourd’hui, cette limite lui donne un plus grand bien-être. Elle le rend plus libre de se donner davantage à sa femme. Ayant découvert à quel point il est plus heureux, il a rencontré une confiance plus grande de la part de sa femme. Dans la prière, Christine a trouvé la force de faire confiance à son mari dans un domaine où elle pensait qu’il se trompait. Aujourd’hui, elle travaille à temps partiel et je peux témoigner qu’elle est beaucoup plus épanouie… et qu’elle a ainsi appris à mieux aimer son mari.

Un autre couple a partagé avec moi une parole lumineuse : « Quand tu n’es pas d’accord, mais que les deux ont un peu raison chacun de son côté, alors je me dis que c’est certainement Dieu qui a raison. Nous essayons alors d’appliquer ses chemins le mieux possible : renouveler mon amour inconditionnel pour l’autre, faire un grand acte de confiance dans l’autre qui est bon et qui est aussi inspiré par Dieu, avoir l’humilité de déposer mon orgueil de vouloir avoir raison, se pardonner l’un l’autre nos limites respectives.



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Tout cela n’est possible que dans la prière à deux ! ». C’est exactement comme cela qu’il faut faire ! Plutôt que d’imposer le point de vue de l’un quand l’autre n’est pas convaincu, il faut remettre Dieu au milieu du couple. Il existe toujours en Lui une option meilleure, qu’il faut chercher en couple. Pour conclure, j’aimerais souligner la grande fécondité de tous les choix qui sont pris à deux. C’est le témoignage de ce couple marié depuis 40 ans qui l’illustre le mieux :  « Nous avons fait beaucoup de mauvais choix dans nos vies. Mais tous les choix que nous avons posés ensemble étaient des bons choix ! ». Car quand on décide à deux, vraiment ensemble, alors Dieu s’engage.

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