Diplomate portugais en poste à Bordeaux en 1940, Aristides de Sousa Mendes a délivré en quelques semaines, et contre les ordres de son gouvernement, plusieurs milliers de visas aux personnes menacées souhaitant fuir la France. “Un exemple de cohérence avec une conscience droite et illuminée par la Parole de Dieu”, a estimé il y a quelques jours le pape François.
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Son nom ne vous dira probablement rien. Pourtant, près de 34.000 personnes lui doivent la vie. Aristides de Sousa Mendes est consul général du Portugal à Bordeaux lorsque la Deuxième guerre mondiale éclate en 1939. Rapidement, le gouvernement de Salazar ordonne aux différents consuls de refuser l’octroi de visas aux “étrangers de nationalité indéfinie, contestée ou en litiges, aux apatrides, aux Juifs expulsés de leurs pays d’origine ou du pays dont ils sont ressortissants”. Catholique pratiquant, Aristides de Sousa Mendes juge ces directives inhumaines et contraires à sa morale.
Dès la fin de 1939, il décide de désobéir et fournit quelques visas dont un au rabbin polonais Jacob Kruger, réfugié à Bordeaux avec toute sa famille. L’avenir s’assombrissant au fil des semaines, il décide d’en donner à tous les réfugiés. “Désormais, je donnerai des visas à tout le monde, il n’y a plus de nationalité, de race, de religion“, déclare-t-il le 16 juin 1940. “Aidé de deux de ses enfants et neveux, ainsi que du rabbin Kruger, il tamponne les passeports à tour de bras, signe des visas sur formulaires, puis sur des feuilles blanches et tout morceau de papier disponible”, rapporte l’association des Anonymes, Justes et persécutés durant la période nazie (AJPN).
“S’il me faut désobéir, je préfère que ce soit à un ordre des hommes qu’à un ordre de Dieu.”
Aux premiers avertissements de Lisbonne, il aurait déclaré : “S’il me faut désobéir, je préfère que ce soit à un ordre des hommes qu’à un ordre de Dieu”, souligne encore l’association. Au total, il a ainsi délivré près de 34.000 visas, dont 10.000 à des juifs mais aussi à l’impératrice Zita de Bourbon-Parme et ses enfants, au général Leclerc, Salvador Dalí et son épouse, Otto de Habsbourg, Édouard, Henri et Robert de Rothschild…
Lui reprochant “d’avoir mis ses impératifs de conscience au-delà de ses obligations de fonctionnaire”, Salazar missionne à Bordeaux deux personnes pour le ramener à Lisbonne. Sur le chemin du retour, au poste de frontière d’Hendaye, il voit des réfugiés bloqués auxquels il avait donné des visas à Bordeaux. Aristides de Sousa Mendes demande alors aux réfugiés de le suivre et ordonne au chauffeur de sa voiture de rouler doucement et d’emprunter des routes de campagne. Jouant de son autorité, il réussit à les faire entrer au Portugal.
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De retour au Portugal le 8 juillet 1940, il est traduit devant le Conseil de discipline à Lisbonne qui le prive de son emploi, lui interdit la profession d’avocat (sa formation, ndlr) et diminue de moitié son traitement. Il décède en 1954, dans une relative indifférence. Ce n’est qu’en 1966 qu’il il est fait « Juste parmi les nations » à titre posthume avant d’être réhabilité, en 1986, par le gouvernement portugais en 1986. Le citant en exemple lors de l’audience générale de ce mercredi 17 juin, journée de conscience au Portugal qui honore la mémoire du consul, le pape François a déclaré : “Que la liberté de conscience puisse toujours être respectée partout et que chaque chrétien puisse donner un exemple de cohérence avec une conscience droite et illuminée par la Parole de Dieu”.