Nous avons tous probablement expérimenté la force brûlante de nos passions affectives : ce désir puissant de posséder l’autre ou de vouloir être désiré. Nous connaissons peut-être tous cette sensation de vouloir séduire à tout prix l’autre. D’où vient cette violence ? Comment ne pas tomber dans le piège lorsque l’occasion d’un “adultère du cœur” frappe à la porte de votre cœur ? Tout avait commencé par un regard échangé, avant que se crée une bonne amitié au travail. C’était une chance, Bénédicte s’entendait bien avec son collègue. Même très bien… d’autant plus qu’avec son mari Jean, le couple passait par une période difficile. Quelques temps après, Bénédicte m’expliquait qu’elle se réjouissait de plus en plus d’aller travailler le matin. Elle considérait qu’avoir un tel lieu d’équilibre à l’extérieur de la maison était un vrai cadeau. Et dès que ça allait moins bien chez elle, il lui suffisait de penser à son collègue pour se sentir très vite rassurée. Cela lui permettait même d’être plus aimable avec Jean. Et comme il ne s’agissait que d’une amitié et rien de plus, Bénédicte arrivait à calmer la voix de son cœur qui avait commencé à lui faire des reproches. Pourtant, il n’a pas fallu très longtemps pour que cette amitié prenne une autre tournure et que le « plus » survienne. Bénédicte et son collègue sont finalement “allés jusqu’au bout”.
Jésus savait trop bien que dans toutes les questions qui touchent les domaines de l’affection et de la pureté, nous sommes souvent de très mauvais juges de nous-mêmes. C’est pour cela que dans son sermon sur la montagne, il ne laisse rien à l’interprétation :
« Vous avez appris qu’il a été dit : Tu ne commettras pas d’adultère. Eh bien ! moi, je vous dis : Tout homme qui regarde une femme avec convoitise a déjà commis l’adultère avec elle dans son cœur. » (Mt 5,27-28).
C’est dur, mais au moins c’est bien clair ! Et en plus, on sait au fond de nous-mêmes qu’il dit la vérité. C’est valable pour l’homme et pour la femme. Si Jésus utilise un langage si fort, voire même choquant, ce n’est certainement pas pour nous dire que nous sommes mauvais – car il sait que tout le monde rame parfois dans ce domaine – mais plutôt pour nous réveiller et pour nous protéger de nous-mêmes et de notre incroyable capacité de nous auto-justifier.
Pour cela, faisons mémoire de l’histoire du roi David. Tout le monde sait qu’il a vaincu Goliath. On sait aussi qu’il était un bel enfant, choisi par Dieu. Il devint roi d’Israël, un vrai ami de Dieu, au point que Dieu est resté avec lui pendant toute sa vie. Mais saviez-vous aussi qu’au sommet de son pouvoir, ce même roi David décida de faire tuer Ourias, l’un de ses propres soldats ? C’était pour couvrir de sang froid l’adultère qu’il avait commis avec Bethsabée, la femme de ce soldat. De quoi ternir la gloire de ce grand roi. Connaissez-vous l’enchaînement apparemment banal des faits qui l’ont poussé à ce crime ? C’était à l’époque où les rois étaient en guerre :
« Un soir, David se leva de sa couche pour se promener sur la terrasse du palais. De là, il aperçut une femme en train de se baigner. Cette femme était très belle » (2S 11, 2)
Ici, nous pourrions poser trois questions au roi David : Pourquoi n’es-tu pas en guerre comme les autres rois ? Pourquoi te lèves-tu le soir de ta couche ? Et que cherches-tu de ce côté de la terrasse où tu sais déjà qu’il y a une forte probabilité d’y voir secrètement une femme en train de se baigner ?
Le roi David sort de chez lui comme un prédateur, prêt à commettre un adultère rien qu’avec son regard, avec toutes les conséquences que cela pourra engendrer. Il cherche une femme à consommer. En vérité, il jette de l’huile sur le feu.
Le premier péché de David n’était pas l’assassinat d’Ourias. Ce n’était même pas l’adultère avec Bethsabée. Son vrai péché était de se mettre en condition de péché, de ne pas rejeter la tentation quand elle se présentait dans son cœur. Quand David se lève pour monter sur la terrasse, il est déjà prêt au péché. Son cœur est décidé de commettre un abus de pouvoir et à espionner une femme. Il sort de chez lui comme un prédateur, prêt à commettre un adultère rien qu’avec son regard, avec toutes les conséquences que cela pourra engendrer. Il cherche une femme à consommer, un objet pour apaiser sa concupiscence. En vérité, il jette de l’huile sur le feu.
Dans son sermon sur la montagne, Jésus n’accuse pas du tout l’attraction mutuelle entre les hommes et les femmes. Elle est normale et bonne. Mais il met en garde contre le cœur divisé, le regard qui désire pour s’approprier de l’autre. Une femme mariée qui fait mémoire d’une expérience romantique dans son passé avec un autre homme est autant dans l’adultère du cœur Le dernier cas semble bien sûr plus grave, mais le fond du problème est le même pour tous ces exemples : l’autre ne doit jamais être l’objet de mon plaisir ou de mon confort, même pas dans mes paroles, mes regards, mes rêves ou mes pensées.
Le regard pour désirer qui contient une double intention, il crée une rupture dans le cœur humain. On prétend être dans le don, mais on cherche son propre plaisir.
Ce regard du désir, le pape Jean Paul II explique qu’il révèle « une duperie du cœur humain à l’égard de l’éternelle vocation de l’homme et de la femme à la communion par un don réciproque ». Le regard pour désirer qui contient une double intention, il crée une rupture dans le cœur humain. On prétend être dans le don, mais on cherche son propre plaisir. Et le Pape poursuit : « Une chose est, en effet, d’avoir conscience que la valeur du sexe fait partie de toute la richesse de valeurs avec laquelle l’être féminin se révèle à l’être masculin. Une autre chose est de “réduire” toute la richesse personnelle de la féminité à cette seule valeur, c’est-à-dire au sexe comme objet convenant à la satisfaction de sa propre sexualité » (catéchèse du 17.09.1980).
L’homme a été créé pour être habité naturellement par Dieu. Mais en raison de la chute originelle, le lieu prévu en lui pour accueillir Dieu est resté vide. Plus l’homme comble ce lieu avec des objets de plaisir, plus le “trou noir” grandit.
Nous avons tous probablement expérimenté la force brûlante de nos passions affectives : ce désir puissant de posséder l’autre ou de vouloir être désiré. Nous connaissons peut-être tous cette sensation de vouloir séduire à tout prix l’autre. D’où vient toute cette violence ? L’homme a été créé pour être habité naturellement par Dieu. Mais en raison de la chute originelle, le lieu prévu en lui pour accueillir Dieu est resté vide. Il a donné place à une espèce de trou noir qui, parfois, semble tout attirer vers lui. Un vide qui cherche la plénitude sous toutes ses formes et à tout prix, en David comme en Bénédicte, comme en chacun de nous… Une plénitude que pourtant Dieu seul peut habiter. Plus l’homme comble ce lieu avec des objets de plaisir, plus le trou noir grandit. En revanche, plus l’homme re-choisit Dieu, en toute simplicité, plus Dieu vient à nouveau habiter ce lieu. Et alors, plus la paix reprend toute sa place, plus l’amour grandit et peut à nouveau devenir un amour don-de-soi.
“Viens Esprit de Dieu, renouvelle la face de la terre, de mon cœur, de mes affections !” (Psaume 130,30)
Nous savons bien que le plaisir immédiat est plus facile à atteindre que cette plénitude de Dieu… Alors, comment pouvons-nous vaincre cette attitude parfois extrême de posséder ou de consommer ? À ce sujet, le pape François nous parle de la tendresse. Elle est une « forme d’amour qui est libre de l’impérieuse nécessité de posséder l’autre ». Selon lui, « la tendresse, est une manifestation de cet amour qui se libère du désir de possession égoïste. Elle nous conduit à vibrer face à une personne avec un immense respect et avec une certaine peur de lui faire du tort ou de la priver de sa liberté. L’amour de l’autre implique ce goût de contempler et de valoriser le beau et la sacralité de son être personnel, qui existe au-delà de mes nécessités… » (Amoris Laetitia nr. 127). Avec toute simplicité, demandez cette tendresse au Créateur : Il est toujours de votre côté, car sa plus grande joie est que vous appreniez à aimer en plénitude. Et il sait bien que sans Lui, ça ne marche pas. C’est pour cela qu’il vous a dit « oui » le jour de votre mariage, Lui aussi.
Lorsque l’occasion d’un adultère du cœur frappe à la porte de votre cœur, il n’y a pas lieu d’avoir peur, dites-vous la chose suivante : si l’herbe semble plus verte de l’autre côté de la clôture, alors arrosez mieux votre propre côté !
J’aimerais vous suggérer cette petite astuce que m’ont apprises mes presque 30 années de vie religieuse et sacerdotale : Lorsque l’occasion d’un adultère du cœur frappe à la porte de votre cœur, il n’y a pas lieu d’avoir peur. Généralement, cela signifie tout simplement que vous n’avez pas suffisamment cultivé votre amour. Dans mon cas, Jésus. Dans votre cas, le conjoint. Vous pourriez aussi vous dire la chose suivante : si l’herbe semble plus verte de l’autre côté de la clôture, alors arrosez mieux votre propre côté ! Quand je me sens un peu tenté par le monde qui m’appelle à le goûter, alors je re-choisis le Seigneur comme ma seule joie et je lui dis que je le préfère à toute autre réalité.
Et depuis 30 ans, ça a plutôt bien marché. D’ailleurs, Bénédicte a fait la même chose. Je ne vous cache pas que ce n’était pas si facile au début, mais avec la force de Dieu, elle a vaincu le mensonge. D’abord, elle a re-choisi le Seigneur en renouvelant sa vie de prière. Ensuite, elle a clairement dévoilé et rejeté l’adultère du cœur et elle a re-choisi son mari. Plus tard, elle a renouvelé sa promesse de mariage. Aujourd’hui, Jean et Bénédicte sont vraiment un très bon couple, marié depuis plus de 15 ans et plus fort que jamais. Dieu soit loué !