Mettre ou ne pas mettre son enfant à l’école, telle est la question. C’est un dilemme presque shakespearien pour certains parents. Tour d’horizon des différentes motivations qui animent les uns et les autres en faveur ou non d’un retour à l’école le 11 mai.
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Si certains n’ont pas le choix, et le déplorent parfois, en raison d’impératifs professionnels ou financiers, d’autres ont la possibilité d’opter pour le retour à l’école ou non, comme l’y invite le gouvernement en proposant une reprise à partir du 11 mai sur la base du volontariat. Depuis l’annonce faite par le gouvernement, de nombreux parents oscillent entre l’envie de redonner à leur enfant le minimum de cadre scolaire et de vie sociale que promet l’après-confinement, et la crainte sanitaire.
En moyenne, les parents demeurent méfiants. Selon un sondage Odoxa-Dentsu Consulting pour Le Figaro et France Info publié le 23 avril, près de deux parents sur trois (64%) affirment qu’ils n’enverront pas au moins un enfant en classe à la levée du confinement. Aleteia a interrogé une centaine de parents afin de comprendre les différentes motivations qui animent les parents, largement partagés sur le sujet. Il est question de crainte sanitaire bien sûr, d’une expérience d’école à la maison plus ou moins bien vécue et des conditions dans lesquelles va se dérouler la réouverture des écoles.
Une peur inégale face au virus
La crainte sanitaire est perçue de manière différente selon les parents. D’abord, elle est plus ou moins prégnante selon si les familles habitent dans une région très touchée par le Covid-19 ou relativement épargnée. Ensuite, les avis divergent entre les rationnels, qui gardent en tête que les enfants sont peu sujets à des formes graves de la maladie, et les inquiets, qui redoutent la propagation du virus au sein de l’école. Crainte accentuée par la difficulté de faire respecter les gestes barrières par des enfants.
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Il y a les résignés, qui estiment que le virus n’aura pas disparu en septembre et qu’il faut bien y retourner un jour. Et puis il y a les empathiques, comme Amélie, infirmière, qui ne voit guère l’intérêt de retourner à l’école pour quelques semaines, « si ce n’est de prendre le risque de créer une deuxième vague alors que les équipes soignantes sont épuisées », souligne-t-elle.
Un enseignement à distance plus ou moins bien vécu
Certains parents se sont découvert une véritable âme de pédagogue tandis que d’autres sont épuisés par ces semaines d’école à la maison. Une expérience qui varie bien entendu selon si les parents avaient une activité professionnelle ou non, et qui contribue grandement au souhait de voir son enfant retrouver les bancs de l’école, même à temps partiel. C’est ce dont témoigne une autre Amélie, mère de deux enfants : « A la maison, ça devient compliqué à gérer et je perds littéralement patience pour l’école à la maison! ».
Même son de cloche chez cette maman fatiguée, mère de quatre enfants de 4 à 12 ans : « Franchement, je n’en peux plus de devoir superviser tous les niveaux, je ne suis pas prof, mes enfants ne peuvent plus me supporter et moi non plus ! Ils sont de moins en moins motivés pour travailler à la maison, vivement qu’ils retrouvent leurs enseignants bien mieux placés que moi pour leur faire cours ! ».
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Au contraire, chez d’autres, le rythme est pris, ils sont bien à la maison et n’ont pas envie d’en changer à la faveur d’une école aux allures de prison ou d’hôpital. « J’aime beaucoup faire l’école à la maison, et je trouve que c’est une super opportunité pour passer des moments top avec les enfants, donc je prolonge l’école à la maison ! » confie Marie-Armelle, mère de trois jeunes enfants.
D’autres, comme Marguerite, mère de trois enfants aussi, coupent la poire en deux et prennent des décisions différentes selon leurs enfants : « Notre grande, qui est en CP, très demandeuse, retournera à l’école si les conditions le permettent, mais nous ne remettrons pas notre « trois ans » avant septembre. Cela a peu d’intérêt face au risque de contamination vraiment important en petite section ».
Besoin de socialisation vs mesures de distanciation
Tout l’enjeu de l’école de demain est de réinvestir la vie en collectivité, tout en respectant les mesures de distanciation. Utopique ou pas ? Bon nombre de parents mettent en avant le besoin très fort de leur enfant de retrouver amis et vie sociale. Pour certains enfants, cela contribue à leur équilibre. « Les enfants ont besoin de lien social, mon aînée de bientôt 7 ans devient folle, littéralement ! Elle a perdu ses repères sociaux et verse dans la maniaquerie », assure Claire. Le manque de contacts avec des enfants de leur âge peut peser lourdement sur le moral.
Cependant, le protocole sanitaire et les mesures de distanciation refroidissent plus d’un parent. Relayé par le ministère de l’Education nationale, le protocole sanitaire en vue de la réouverture des écoles maternelles et élémentaires regroupe toutes les prescriptions à mettre en œuvre pour accueillir les élèves. Et c’est certain, l’école du 11 mai ne ressemblera pas à celle que nos enfants ont connu avant la crise.
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Le protocole repose sur cinq principes : maintien de la distanciation physique, application des gestes barrière, limitation du brassage des élèves, assurance d’un nettoyage et d’une désinfection des locaux et matériels, information – communication – formation. Dans ces conditions, certains parents redoutent l’aspect anxiogène que va revêtir l’école de demain : lavages de mains hyper fréquents, enseignants masqués, surcommunication sur les mesures d’hygiène… A titre d’exemple, le protocole précise que « les échanges manuels de ballons, jouets, crayons etc… doivent être évités ou accompagnés de modalités de désinfection après chaque utilisation ».
Les récréations se dérouleront en groupe classe. Il est demandé de privilégier la restauration dans les salles de classe, dont les bureaux seront séparés d’au moins un mètre. Pour Clémence, enseignante elle-même, ces modalités sont très anxiogènes : « J’ai réussi à les préserver du stress lié à cette situation en les gardant à la maison, si c’est pour retourner à l’école sans avoir le droit de jouer avec leurs amis, en empruntant un chemin bleu pour aller dans la classe et un chemin vert pour sortir, prendre son repas en classe sans avoir le droit de se défouler après, voir la maîtresse avec un masque, se faire isoler seul s’il a le malheur de se mettre à tousser dans la journée. Je pense que ça relève plus de l’angoisse totale pour eux », confie-t-elle.
Dans le cas d’un retour à l’école, il s’avère important de préparer un maximum son enfant en lui parlant de ces mesures exceptionnelles, en lui en expliquant la raison, en le rassurant et en demeurant attentif à ses questions et à son comportement.