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A-t-on vraiment saisi le geste impressionnant du pape François pour comprendre la crise sanitaire mondiale et lui répondre dans notre désarroi spirituel et liturgique ? Quand le Vicaire du Christ, seul face au monde, offre le sommeil de Jésus au fond de la barque et Jésus sous les voiles du saint Sacrement, il ouvre nos consciences au désir ardent de la grâce.
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Durant la pandémie que nous traversons et le long sabbat qui en découle pour des milliards d’êtres humains, le discours dominant est médical, politique, ou socio-économique. La parole catholique s’entend peu. Pourtant plusieurs voix ont résonné juste.
Comme il convient au temps de la Passion, où les saintes femmes seules comprennent Jésus, ma sœur dominicaine Véronique Margron vit ce temps de pandémie comme un long samedi saint. « Le Christ est mort le vendredi. Ce samedi-là, c’est un long silence qui prévaut. Pour nous, chrétiens, cette période est un acte de foi. Jésus vient à nous pour partager nos inquiétudes, notre impuissance. » En docteur de la foi, Mgr de Blois approfondit la réflexion théologique. Rappelant que l’Écriture raconte les « châtiments » divins en termes d’histoires de salut, Jean-Pierre Batut interprète la pandémie actuelle comme une invitation pressante du Seigneur à la conversion, pour qu’Il trouve quelques justes à la suite du seul Juste et donne le salut. L’administrateur apostolique de notre Patriarcat latin de Jérusalem, le jour des Rameaux, recevait de la situation présente une « leçon sur l’écart entre nos attentes et la réponse de Dieu ». Comme les foules de Bethfagé, nous voulons « un messie qui résout nos problèmes », « nous sauve du coronavirus, que tout redevienne comme avant ». Mais « Jésus répond à sa manière. Précisément parce que Jésus dit oui à nos désirs les plus profonds, il devra dire non à nos désirs immédiats. Demandons-Lui aussi cette grâce, de comprendre ce dont nous avons vraiment besoin. »
L’éclipse liturgique
Une dimension de la crise liée à la pandémie actuelle a été peu commentée, son aspect liturgique. Pour le dire crûment : l’extinction du culte public. Deux méditations retiennent l’attention. Henri Vallançon, prêtre, docteur en sciences bibliques, propose un saisissant appel au mea culpa du monde ecclésiastique. De fait, la dernière interruption du culte public de Dieu dans son peuple pourrait bien remonter à 167-164 avant Jésus-Christ : il serait difficile de ne pas voir un signe dans l’actuelle éclipse liturgique… C’est à un retour sur soi pastoral et doctrinal (une conversion) qu’elle nous invite : pratiquons-nous encore le premier commandement du Décalogue, l’amour inconditionnel du Dieu vivant, en évitant les offenses en cette matière « qui excitent la jalousie du Seigneur » ?
Je ne sais pas si l’écran fait toujours écran. Je constate que quelques jours après qu’on se fut mis à diffuser messes et offices en ligne, le temps de la Passion a commencé.
Aux abus rappelés par l’abbé Vallançon, j’ajouterais que notre peu de cas de l’honneur de Dieu éloigne de Jésus-Christ nombre d’amis juifs ou musulmans étonnés de nos galvaudages religieux. À Pâques 2020 comme au temps des hiérarchies indignes fustigées par les prophètes, « la gloire de Dieu, lassée d’être autant méprisée, se retire. Elle se dérobe à nos offices, elle se refuse à notre ministère ». Le Bon Dieu n’abandonne pas son peuple pour autant, mais c’est Lui qui va prendre l’initiative. « Ce n’est pas à cause de vous que j’agis de la sorte, maison d’Israël ; c’est à cause de mon saint nom, que vous avez profané parmi les nations où vous êtes allés. Je sanctifierai mon grand nom » (Ez 36, 21-22).
Des messes-écran ?
Grégory Solari, théologien laïc et père de famille, porte, lui, la critique jusqu’aux succédanés de liturgies qui foisonnent sur l’Internet, célébrations souvent sans aucune assemblée. Avec l’intention louable de célébrer les sacrements, y visons-nous vraiment le Seigneur, ou bien le monde ecclésiastique lui-même se met-il en spectacle pour avoir encore le sentiment d’exister, voire créer de la frustration et se rendre indispensable ? L’écran n’est-il pas ce qui cache, « fait écran » à ce qui est visé dans l’Eucharistie ? Et de recommander une revivification de l’ecclesiola domestique : de confier — pourquoi pas ? — le saint Sacrement aux familles confinées pour que dimanche, on puisse dire en vérité que « le soir étant venu ce jour-là, les portes du lieu où étaient les disciples étant fermées par crainte du virus, Jésus vint, et se tint au milieu d’eux » (Jn 20, 19).
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Je ne sais pas si l’écran fait toujours écran. Je constate que quelques jours après qu’on se fut mis à diffuser messes et offices en ligne, le temps de la Passion a commencé. Durant ce temps, la liturgie catholique demande qu’on voile les Croix. Pour les participants virtuels à nos célébrations diffusées par Internet, il y avait déjà peu à voir, un crucifix sur un autel, et voici qu’on le leur a caché ! Sur leurs écrans s’affichait une sorte de fantôme violet. Ils avaient à voir… un voile !
Le désir ardent de Dieu
Je crois, justement, que tout sacrement est voile et écran. Comme le dit Thomas d’Aquin devant le saint Sacrement : « Jésus que maintenant je contemple voilé, je t’en prie, quand viendra ce jour par moi tant désiré où te regardant la face dévoilée, je me réjouirai de ta gloire ? » (hymne Adoro devote). Les liturgies diffusées sur nos écrans ne peuvent-elles être du sacrement « au carré », voire « au cube » (quand en plus les images sont voilées), bref : une belle possibilité de revenir à l’essentiel dans la célébration qui est le désir ardent de Dieu lui-même sanctifiant, consacrant par son Esprit et le pain et le vin et l’assemblée pour en faire son Corps ?
Je crois qu’en éclipsant son clergé en ce moment, Jésus court-circuite les médiations ordinaires. Il veut, il va se manifester Lui-même, directement, aux consciences qui à lui veulent s’ouvrir.
Je ne sais pas si la gloire de Dieu s’est mise en retrait (n’est-ce pas sur la croix, où le Fils est « fait péché pour nous » qu’il est glorifié ?). Notre pape François, a ouvert le vendredi 27 mars une voie impressionnante. Faste baroque et vide sidéral coïncidant, le Vicaire du Christ seul face à un crucifix miraculeux où Jésus est si évidemment mort, à une icône de la Mère de Dieu invisible derrière les reflets de la vitre qui la protégeait, nous offrait le sommeil de Jésus au fond de la barque et brandissait, sous nos yeux, Jésus sous les voiles du saint Sacrement. « Prenons ces deux choses dans nos mains : le crucifix pour le regarder ; et ouvrons l’Évangile », a-t-il répété ce mercredi saint. Tout est dit !
Jésus se manifeste Lui-même
Je crois qu’en éclipsant son clergé en ce moment, JÉSUS court-circuite les médiations ordinaires, devenues si défectueuses (scandales moraux, économiques, politiques, théologaux). Il veut, il va se manifester Lui-même, directement, aux consciences qui à lui veulent s’ouvrir. Car c’est là son royaume et la source unique de toute autorité dans l’Église, comme l’enseigna John Henry Newman justement canonisé par nos deux papes actuels.
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C’est notre responsabilité de nous ouvrir aujourd’hui, en pleine conscience de notre état véritable, au désir de la grâce de Dieu. Il ne trouvera peut-être pas beaucoup de justes, dans notre monde globalisé où chacun finit par participer aux structures de péchés mises en place pour le confort de tous. Puisse-t-il me trouver au nombre des pécheurs qui, du fond de leur misère vivement ressentie, s’abritent comme filles et fils dans le Fils derrière le puissant bouclier de Jésus Messie (Ps 83, 10), mort et ressuscité.
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